Disparu le 16 juillet 2017, George Andrew Romero naît le 4 février 1940 dans le Bronx, pour partir bientôt à Pittsburgh, ville-partenaire cinématographique (à l’instar de Baltimore pour John Waters) qu’il ne quittera jamais plus et qui servira de toile de fond à plusieurs de ses films...
Nourri au cinéma fantastique et aux contes macabres des bandes dessinées « EC Comics », sa passion précoce pour les images lui fait réaliser de nombreux courts-métrages dès l’adolescence et l’amènera, aux termes d’études d’arts et de design, à fonder une société de production, « Latent Image », centrée sur les films publicitaires, les films industriels, les films de propagande et les documentaires.
C’est en compagnie d’amis et associés au sein de Latent Image, ainsi que de quelques partenaires extérieurs que Romero fonde « Image Ten » pour la production de La Nuit des morts-vivants (1969). Suite au succès de ce film, le réalisateur n’embraye bizarrement pas ni sur une « sequel » ni sur une des multiples autres propositions qui tombent sur son bureau. Plutôt, il continue dans la publicité et le reportage sportif avant de finalement faire son retour au cinéma avec There’s Always Vanilla (1972), petite guimauve aujourd’hui oubliée.
Suivront, avant que Romero ne donne une seconde chance à ses zombies, Season of the Witch (1973), histoire de sorcellerie domestique tout à fait ratée dans l’esprit d’Adorable voisine, The Crazies (1973, (La Nuit des fous vivants en français…, que l’on peut également assimiler aux films de zombies), histoire d’épidémie bactériologique et Martin (1977), variation sur le thème du vampire souvent considérée comme le meilleur film de Romero hors tétralogie et première collaboration du réalisateur avec le spécialiste des effets spéciaux et futur réalisateur du remake de La Nuit des morts-vivants, Tom Savini.
Suite au succès commercial de son Zombie coproduit par Dario Argento, Romero enchaîne sur son projet le plus personnel et son film préféré, Knightriders (1981), objet étrange avec Ed Harris et Tom Savini croisant le monde des « bikers » avec celui des Chevaliers de la Table Ronde, puis avec un Creepshow (1982) bas en couleurs, avant de resservir la soupe aux morts-vivants en 1985 avec Le Jour des morts-vivants, gros échec pour un film d’horreur trop sérieux dans une époque nourrie aux parodies farcesques (Re-Animator de Stuart Gordon (1985), Street Trash de Jim Muro (1986) ou Le Retour des morts-vivants de Dan O’Bannon (1984) par exemple.
La suite de la carrière de Romero jusqu’à son Land of the Dead sera hautement erratique, le réalisateur enchaînant à distance de purs petits produits fantastiques plus ou moins bien ourlés, Incidents de parcours (1988), au scénario terrifiant mais à la réalisation trop lâche, Deux yeux maléfiques (1990), film à sketchs très plat d’après Edgar Allan Poe qui marque ses retrouvailles avec Dario Argento et enfin La Part des ténèbres (1993), adaptation d’un roman de Stephen King. Après une longue éclipse, le réalisateur fait un retour catastrophique avec Bruiser (2000), projet pourtant ambitieux et fascinant sur le papier de variation sur Les Yeux sans visage de Franju.
Remis en selle par le succès de Land of the Dead, Romero n’est pas ce que l’on appelle un auteur prolifique. Son parcours est jalonné d’occasions manquées et de projets avortés. Il est impossible de répertorier les films qu’il aurait pu ou dû tourner s’il s’était montré plus docile envers ses producteurs ou s’il s’était mieux fondu dans le gotha hollywoodien. On peut néanmoins citer Simetierre (1989, finalement confié à Mary Lambert), Resident Evil (2002, Paul Anderson), ou encore une nouvelle Guerre des mondes et une adaptation du Fléau de Stephen King.
Personnage cultivé, bien au-delà de la culture fantastique ou cinématographique, intéressant et intègre, artisan assez individualiste et misanthrope, George Romero n’a jamais navigué avec aisance dans le milieu du cinéma. Il semble également souffrir de pas mal d’atermoiements dans ses choix et décisions, résigné trop facilement, il promène en bandoulière son goût du travail bien fait pour sombrer parfois de façon inexplicable dans la plus insane facilité lorsqu’il prend finalement les commandes d’un projet.
De façon générale, pour des raisons de contraintes de production ou autres, les films de Romero sont quasiment toujours beaucoup plus alléchants sur le papier qu’ils ne fascinent effectivement à l’écran.
C'est qu'en dehors de ses films de morts-vivants, Romero n’a jamais réussi à obtenir de véritable reconnaissance, ni de la critique, ni du public, et cela ne peut malheureusement pas être considéré comme une injustice majeure au regard du travail effectivement réalisé. C’est un peu comme s’il n’avait pu s’épanouir et donner la mesure de ses capacités de bon artisan qu’au sein d’un sous-genre unique, le film de zombies, un peu comme son ami Argento avec le « giallo ». Dès lors, et au seul motif de cette série, son nom et sa réputation résonnent bien plus fort que ce que son œuvre ne justifie. Cela dit, nul ne peut nier que les zombies... c’est lui qui les a faits tels qu’ils sont aujourd’hui.