Bruno Dumont : le sensible, divine bestialité
C'est le grand rendez-vous des cinéphiles du début de l'été : le Festival de La Rochelle s'ouvre ce week-end et se1
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Près d'un hameau, de sa rivière et ses marais, demeure un gars étrange qui vivote, braconne, prie et fait des feux au bord des étangs, là où rode le démon...
Dans une région maritime aux dunes balayées par le vent, une sorte d'ermite aux pouvoirs mystérieux devient l'ange gardien d'une jeune fille. L'étranger aux yeux clairs a un beau visage ravagé, sa compagne est une brune gracile à la peau blanche, à la grâce fragile. Lorsqu'il ne tue pas, à coups résolus de fusil ou de bâton, les hommes qui exercent le mal sur la jeune femme, il marche longuement avec elle dans la lande et dans les bois, s'agenouillant parfois devant le soleil ou la mer, adressant à la majesté du paysage une prière silencieuse dont on ne connaît ni l'objet, ni la teneur, ni le destinataire.
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" Il y a du Bresson dans les premiers plans de Hors Satan : cette main en gros plan qui cogne à une porte, juste entrouverte pour laisser pa
" Il y a du Bresson dans les premiers plans de Hors Satan : cette main en gros plan qui cogne à une porte, juste entrouverte pour laisser passer, telle une aumône, deux tranches de pain... Et il y a du Bernanos dans son titre, qui évoque aussi cette formule, due à l'évangéliste Marc, destinée à éloigner le diable : « Vade retro, Satana ! », « Casse-toi, démon ! » « Dégage ! », comme on dit aujourd'hui...
Celui qui veille, comme une sentinelle, à le faire reculer, mais à sa façon, soit en ôtant la vie, soit en la rendant, est un clochard aux yeux délavés et christiques, un traîne-misère, un vagabond céleste qui, de temps en temps, s'agenouille devant le ciel, paumes tendues, comme s'il rechargeait ses batteries, comme s'il attendait d'en haut une énergie nouvelle... Bruno Dumont le filme, silhouette minuscule, obstinée, dans des lieux magnifiques, magnifiés, ceux de la Côte d'Opale, où la verdure côtoie le sable, pour finir sur la mer.
Paysages aussi étranges et symboliques que ceux d'Andreï Tarkovski dans Le Miroir, où les personnages, leur corps, leur voix, les mots qu'ils prononcent (rares : ce sont tous des taiseux) semblent se perdre dans l'infini. S'y confondre... A tel point que la vraie vedette du film, c'est le vent, ou plutôt ce souffle permanent qui semble en freiner certains, alors qu'il pousse, au contraire, le vagabond à aller de l'avant pour mieux les aider.
Car le Mal rôde dans ces lieux faussement paisibles : le cinéaste en fait - image magnifique - un trou noir dans des buissons que frôle d'un peu trop près une petite punkette, petite bouille toute ronde et toute sombre, l'amie du vagabond, sa copine d'errance, tout en ignorance et en bonté d'âme. C'est sa pureté qui la sauvera...
C'est, donc, un film sur la transcendance. Pas forcément chrétienne, dans ce monde déchristianisé où elle est devenue inutile, superflue. Dumont lui rend sa force, son emportement, sa bravoure, sa sauvagerie...
Pourtant, en dépit d'une exigence intacte, il reste bien en deçà d'Hadewijch, son film précédent, qui était la rencontre privilégiée - miraculeuse pour rester dans le ton - entre sa rigueur mystique et son engagement politique. Ici, alors même qu'il avait, avec ce sujet, l'occasion rêvée de dépasser ses limites, de s'ouvrir davantage au lyrisme - se rapprocher de Dostoïevski et s'éloigner de Dreyer, pour tout dire -, il semble avoir freiné des quatre fers pour rester en terrain connu. Seul, un peu au-dessus des autres. Pas dans la chair, rien que dans l'esprit."
" Dans ce film sans musique, la ritournelle se joue mezzo voce,comme une voix de tête. Probablement du rock anglais, minimaliste et glacial.
" Dans ce film sans musique, la ritournelle se joue mezzo voce,comme une voix de tête. Probablement du rock anglais, minimaliste et glacial. Dans ce film sans beaucoup de déplacements, la topographie arpente ou survole un grand espace de dunes, de marais et de bois. Une zone de bord de mer désolée. Désolé, au sens navrant du terme.
(...) Le gars et la fille pactisent sous la bannière de leur commune déveine. Dont ils font, à leur façon, un étendard. En repoussant, par exemple, toute forme de relation sexuelle. Le gars est possédé par quelques particularités. Notamment celle de tuer les présumés salauds qui importunent la fille, comme on écrase un insecte, sans trop y réfléchir, bêtement. Mais aussi, les jambes du gars souvent défaillent et il tombe à genoux.
Or, cet affaissement l’exhausse. C’est devant la beauté du monde que ses genoux ploient. Une beauté à ses yeux, rectangle découpé dans les paysages, tel qu’il est cadré en scope par Bruno Dumont, comme pour donner de la noblesse et du mérite à l’insignifiant (...) Pour preuve, un plan littéralement extraordinaire : afin de conjurer la fumée d’un incendie de broussailles, le gars lance à la fille le défi de marcher sur les eaux. Ou presque. Une poutrelle de béton traversant une ancienne citerne. Le visage du gars entre dans le plan par la porte du travelling latéral qui suit la fille. Ainsi fait avec un tel naturel et aisance qu’il instille le sentiment que le gars est partout chez lui, qu’il logeait déjà dans le film avant d’y vivre.
Hors Satan en effet est un film habité, voire hanté. Le Horla de Maupassant n’est pas loin lorsque, léger détail, on découvre que les pouvoirs du gars ne se limitent pas à ses seuls talents de guérisseur des petits maux locaux.
Hors Satan comme on dit hors de soi. Les yeux du gars font cette impression : ils ne nous regardent pas, aperçoivent à peine la fille, comme s’ils avaient mieux à voir à côté, un peu plus loin, toujours de biais : le gars en étranger (saint laïque ou démon païen ?), les autres en fantôme d’eux-mêmes.
Hors Satan ne croit en rien, mais Dumont a la foi : la foi du cinéma, dont la fonction primale est de faire des miracles."
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