Noël Simsolo : Miklós Jancsó, la conquête de l'espace
VIDEO | 2015, 12' | Ses mouvements de caméra virtuoses à travers les plaines de Hongrie, unissant et désunissant l1
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En 1869, l'empire austro-hongrois pourchasse les Sans-espoir, sorte de bandits d'honneur qui vivaient parmi les paysans hongrois.
Au lendemain du Compromis austro-hongrois de 1867, les Sans Espoir, des bandits d'honneur, vivent parmi les paysans. Pour les arrêter, la police propose aux paysans de s'engager dans l'armée... "Les Sans-Espoir" est tourné dix ans après la répression qui a suivi l’insurrection de Budapest en 1956. Les derniers prisonniers politiques sont à peine relâchés et la mémoire des disparus est encore vive. Si la dictature est "assouplie", le pouvoir oppressif n’en demeure pas moins constamment présent. La parole, pas encore libérée, tend à dénoncer ce qui s’est passé par l’emploi de paraboles et de symboles – tel le rapprochement effectué ici entre les événements de 1860 et ceux de 1956. C'est aussi avec ce film, unanimement salué, que le style, lyrique et opératique, de Jancso s'imposa comme une écriture unique dans le panorama du cinéma. Martin Scorsese salua en 2010 cet auteur célébré puis délaissé. "J'admire les films de Jancsó. En effet, je n'ai jamais vu avant autant de sensibilité et élégance dans les mouvements de caméra et dans l'adaptation dramatique. Le propos politique est très fort. La fin des "Sans-Espoir" est une des meilleures scènes finales de l'histoire du cinéma."
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" On sait que Miklos Jancso se sert de l’histoire comme La Fontaine se servait d’animaux. Les héros du cinéaste sont des hommes d'autrefois
" On sait que Miklos Jancso se sert de l’histoire comme La Fontaine se servait d’animaux. Les héros du cinéaste sont des hommes d'autrefois qui servent de miroir aux hommes d'aujourd'hui. L'oppression, le mensonge, la ruse, l’hypocrisie et le crime n'ont pas disparu. L'anecdote est un prétexte pour servir la vérité, et la photographie un moyen de l’illustrer. Reste l'art de la mise en scène, ce qui, pour Jancso, semble naturel comme l'eau qui jaillît de la source: nul ne lui demande les tourments subis dans les entrailles de la création.
L’action des Sans-Espoir se déroule donc vers 1860, quand le gouvernement de Vienne qui occupe la Hongrie, décide d'anéantir les maquisards et résistants qui se dissimulent dans la Grande Plaine, au milieu des paysans. Des centaines de paysans sont ainsi enfermés et on leur demanda de livrer ceux d’entre eux qui, contre vents et marées, tiennent tête aux oppresseurs. Mais la force, des hommes est têtue, et les bourreaux le savent, ils usent donc de ruses, en même temps que de violences... À la violence répond l’entêtement, comme le courage. A la ruse répond la ruse encore plus dramatique. Nul auteur de film policier ou fantastique n'a réussi avec autant d'esprit à faire cheminer le spectateur dans les méandres d'un suspense épouvantable, que Jancso le fait dans Les Sans- Espoir.
Pièges tendus qui ouvrent et referment inlassablement leurs mâchoires sanglantes saisissant à chaque instant des proies qui ne sont pas les bonnes... Les bourreaux sont atroces, cyniques et vrais. Aussi humains et désespérés que leurs victimes, malgré leur puissance — qui n'est que celle des coups, des humiliations, des meurtres : la lutte est égale. Même si le crime triomphe, sa victoire n'est que momentanée et dérisoire.
C'est l'art du cinéaste que de savoir montrer jusqu'où peuvent descendre dans la bassesse des êtres qui pourtant vous ressemblent comme des frères. Chaque personnage de Jancso est décrit dans sa complexité, dans ses contradictions, dans ses sentiments. Son oeuvre est tourmentée, douloureuse, et profondément humaine, en dépit des symboles, des paraboles, des allusions. On y entre comme dans un cauchemar, on en sort grandi, mais marqué, troublé, transformé. Du vrai cinéma. "
Il y a ces longs plans sur un paysage vide, abruti de soleil et rendu si paisible par l’inlassable chant des alouettes. Il y a ces hommes b
Il y a ces longs plans sur un paysage vide, abruti de soleil et rendu si paisible par l’inlassable chant des alouettes. Il y a ces hommes burinés par la vie, habillés de misère, dont le visage étrangement muet est comme un long discours emprisonné. Il y a ces brusques révoltes qui sont autant de spasmes d’une mort déjà annoncée, avancée. Le film de Miklos Jancso est construit d’ombre et de lumière. Et de silence. C’est un cinéma du regard. Un cinéma de la déduction où le dialogue importe moins que le plan fixe sur un personnage, un groupe comme tétanisé par ce qu’il sait et qu’il ne veut pas dire. La caméra fixe les acteurs pris au piège de la lumière et du mensonge, comme elle le ferait d’un taureau pris au piège d’une corrida où la seule issue est la mort.
Les sans-espoir. Le titre est presque abusif car l’espoir irréel d’une survie subsiste jusqu’au bout, jusqu’à l’ultime trahison, dans ce groupe de révolutionnaires et de paysans rafflés par l’armée hongroise après 1848. Et dont il s’agit de tirer, non par la torture physique, mais par l’anéantissement moral, les renseignements qui permettront de débusquer le chef. Chacun sait, sait sur les autres et sur lui-même, sait qu’il peut trahir et être trahi, maillon d’une chaîne de silence qui, si elle est rompue, brisera du même coup le groupe, et au-delà la Cause.
L’on comprend progressivement que la seule vérité qui aimante ces hommes, c’est cette cause qu’ils défendent, mais qu’au-delà, tout les sépare, leurs ambitions, leur peur, leur histoire. Et que Miklos Jancso joue remarquablement sur la parabole pour démontrer que l’homme n’est rien quand il a perdu sa raison d’être, son idéologie, qu’il perd son humanité à partir du moment où il envisage simplement de trahir cette idéologie. Leçon politique certes, propre à la Hongrie de 1965 où fut tourné le film, leçon philosophique aussi, sur la valeur du silence et de la parole, de la vérité et du mensonge. Un film à multiples facettes qu’il faut voir et revoir pour en débusquer chacun des symboles.
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