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La mort imminente de son grand-père projette David, 14 ans, dans le monde adulte. Alors qu'il refuse sa nouvelle place dans la maison, son enfance s'éloigne...
Un été brûlant à Lisbonne. David, 14 ans, sait que son grand‑père va mourir mais refuse de lui rendre visite de peur de le perdre. Sa mère, elle, passe des nuits entières à son chevet. Le vide que laisse déjà son grand‑père oblige David à devenir l’homme de la maison. Il sent qu’il n’est pas prêt à endosser ce nouveau rôle, mais sans s’en rendre compte, plus il cherche à éviter la vie d’adulte, plus il s’en rapproche...
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" Ces expériences que [Montanha] décrit, il s’en fait une montagne, et nous avec lui. Mais préciséme
" Ces expériences que [Montanha] décrit, il s’en fait une montagne, et nous avec lui. Mais précisément parce que ces pics d’intensité n’existent pas pour David, dans le calme plat de son quartier, dans son ennui. Il ne participe pas aux drames d’une soi-disant expérience adulte (la mort du grand-père pour sa mère, la tristesse d’une séparation pour le copain de celle-ci, l’échec scolaire pour une professeure). Il ne participe plus aux joies directes d’une soi-disant innocence enfantine (dans les plans avec sa petite sœur, éloge de la folie des enfants).
Son émotion, transformée en ennui, en indifférence, en non-vécu, se dépose à un endroit futur, point de départ d’un regard qui est celui du film. C’est cette distance, entre une inexpérience impassible et un excès d’émotion futur, que vise la tentative autobiographique, pour un jeune cinéaste, de répéter l’adolescence. João Salaviza l’atteint, il montre d’abord cette distance, pour nous donner accès à ses deux directions. Si David finit par brûler la moto dans un terrain vague, ce n’est pas qu’il interrompe sa fuite. S’il fait l’amour avec Paulinha, ce n’est pas qu’il devienne un homme. Il n’y a pas de rite de passage. Un premier film n’en est pas un non plus. Il n’y a que des déclarations d’inexpérience, et des efforts pour contenir la voix tremblante qui les prononce."
" Décidément, Manoel de Oliveira peut reposer en paix, sa descendance en talents singuliers n’en finit pas de prol
" Décidément, Manoel de Oliveira peut reposer en paix, sa descendance en talents singuliers n’en finit pas de proliférer et de placer le petit Portugal tout en haut de la cinéplanisphère qui nous importe.
(...) La jeunesse qui s’ennuie l’été en ville : le sujet semble banal, mais la mise en scène de Salaviza lui redonne toute sa singularité, son acuité, sa fraîcheur. Le cinéaste filme un Lisbonne que les touristes ne connaissent pas, entre terrasses secrètes, escaliers de barres d’immeubles, piscines désaffectées, chantiers, no man’s lands, tout un réseau de friches et d’interstices urbains secrètement nichés comme dans toutes les métropoles et dont seuls les gamins des rues connaissent la cartographie et l’usage détourné.
(...) Montanha évoque des échos lointains de Pasolini et de Pedro Costa, des souvenirs de la nouvelle vague chinoise, des images mentales de Goodbye South, Goodbye (Hou Hsiao-hsien) ou de Plaisirs inconnus (Jia Zhangke), tout un cinéma laconique et sensuel de la jeunesse érotisée des quartiers populaires, de l’ennui urbain, de la mélancolie estivale, de la fatigue de vivre, de la douleur de quitter l’enfance et d’aborder l’âge adulte sans boussole.
Comme ces films cités, Montanha ne vrombit pas d’une dramaturgie trépidante mais procède par ellipses, silences, trous du récit et suggestions, par imprégnation progressive, infusion lente, immersion irrésistible, telle une plante grimpante, un virus de plus en plus contagieux, un élixir puissant et concentré. Au bout d’un moment, on est contaminé, conquis, sous l’emprise de ces songes de nuits d’été, de leur rythme torpide, de leur beauté vénéneuse.
David suit le trajet difficile de la sortie de l’enfance mais plus il perd, plus le spectateur gagne, s’attache à ce gamin, à son environnement et au regard que Salaviza porte sur lui. Car si le scénario est contre David, le cinéaste est toujours magnifiquement avec lui. Montanha nous rappelle que le cinéma peut aussi faire le même effet qu’une délicieuse maladie, qu’un film peut susciter une addiction aussi âpre que suave."
Montanha s’ouvre sur une image sublime, celle d’un enfant allongé sur son lit, nous tournant le dos, et dont l’&ea
Montanha s’ouvre sur une image sublime, celle d’un enfant allongé sur son lit, nous tournant le dos, et dont l’échine ensoleillée fend la pénombre ambiante comme une cicatrice incandescente. Avant même que le récit ne démarre, il y a là un mélange de douleur et d’alanguissement qui contient en secret toute la formule du film à venir. Ce dos, c’est celui d’un garçon de 14 ans, David, et ce soleil ardent, celui d’un été caniculaire, inondant ces grands ensembles immobiliers de Lisbonne, où l’enfant vit.
Bientôt, celui-ci apprend que son grand-père, qui veillait sur lui, gît à l’hôpital entre la vie et la mort. David se retrouve au centre d’une famille en lambeaux : père absent, mère effondrée, demi-sœur en couches-culottes, beau-père aigri venu fouiner dans les parages. Alors il prend la tangente et s’entête à vivre ce que son âge lui réserve, du chahut adolescent (sécher les cours, traîner avec son ami Rafael, piquer un scooter) aux premiers émois amoureux (les baisers échangés avec Paulinha, « la plus belle fille du bâtiment »).
Rien de bien original dans le sujet de ce premier long-métrage de João Salaviza, jeune cinéaste lisboète dont certaines des œuvres courtes avaient reçu les récompenses suprêmes à Cannes (Arena, 2009) et à Berlin (Rafa, 2012). En effet, on ne compte plus ces premiers films qui traitent des « premières fois », les réalisateurs en herbe s’identifiant aisément à ces héros adolescents qui font leurs débuts dans la vie, comme eux derrière la caméra.
A force de remuer les mêmes situations et les mêmes affects, bon nombre de ceux-ci ont fini par se ressembler et l’étendard brandi de la jeunesse par virer au conformisme. Or, dans Montanha, le sujet compte moins que la façon dont Salaviza s’en empare, le revisite parfois jusque dans ses clichés (fête foraine, soirée, transe musicale, baisers volés, rébellions), le trempant dans un noir d’encre, le soumettant à un ralentissement général, bien loin de la fébrilité et de l’effervescence qu’on attache d’habitude au parcours adolescent.
Cette noirceur, c’est d’abord celle du visage du jeune héros, mine ombrageuse qui ne s’éclaire qu’à de rares occasions, et son regard toujours froncé, si acéré qu’il semble fendre tout ce sur quoi il se pose. David porte en lui une gravité, une dureté farouche et solitaire, qui ne couve pas d’éruption violente, comme on pouvait s’y attendre, mais débouche parfois sur la douceur et l’abandon (les étreintes dérobées avec sa petite amie, le sommeil, les heures perdues), quand rien ne s’y oppose.
Ses allées et venues entre l’appartement et l’hôpital, les chambres des uns et des autres, les terrains vagues et les soirées nocturnes, se creusent dans les contrastes puissants d’une image contaminée par les ténèbres. Lisbonne et ses intérieurs sont filmés comme une série de cavernes enfouies, de grottes où l’on se calfeutre pour se protéger d’un soleil inquisiteur. La lumière n’y filtre qu’à travers brèches et voilures, projetant ses liserés mordorés sur les corps, alors détourés comme des statues, et dont les épidermes brûlent d’un incroyable éclat. Enfin, la nuit venue, la ville n’est plus qu’une constellation de lueurs artificielles flottant dans l’obscurité.
La chaleur écrase les corps, ralentit les personnages, qui ne se meuvent plus que comme des somnambules ou des figures de cire ramollie. La mise en scène épouse leur rythme altéré et languide, à coup de durées taillées en bloc, mais jamais insistantes, de coupes sèches et d’espaces morcelés, mais sans brutalité. Salaviza s’attache moins à la vivacité des personnages qu’à leur torpeur, leur exténuation, cet étrange état de transe hypnotique (la scène du concert rock où David se noie dans la musique), comme suspension de la psychologie ordinaire pour atteindre à une pure densité de l’être. Cet état est accentué par l’espace sonore – pales des ventilateurs, ronron de la circulation lointaine, souffleries et halos d’échos nocturnes – dont la rumeur lancinante submerge les personnages.
Le film pourrait vite s’enfermer dans un hiératisme plombant, s’il ne modulait heureusement son régime statique, laissant par moments affleurer les passions : David perdant patience envers une professeure qui lui fait la morale, se fâchant avec Rafael qui courtise Paulinha, éclatant de rire quand celui-ci évoque une série de décès absurdes. Ainsi, par ces sobres modulations, Salaviza ne se laisse jamais enfermer dans le système d’un cinéma autoritaire et plombé de solennité – ce vers quoi Montanha aurait facilement pu tendre.
David traverse les expériences de son âge, ces fameuses « premières fois » – dont l’ultime stade est peut-être celui du sexe – avec au-dessus de la tête le spectre d’une mort qui plane dans chacun de ses faits et gestes, par ses visites répétées à l’hôpital, au chevet d’un aïeul dont l’état s’aggrave. Ici, la croissance de la force vitale et du désir (envers Paulinha) communiquent directement avec l’agonie d’une autre existence, dans un saisissant circuit de vases communicants.
Sans jamais tirer sur la corde du pathos (ce qui lui donne a contrario un aspect un peu sec), Montanha puise sa force et sa pertinence de ceci, qu’il ne considère pas le fait de grandir comme le gain de quelque chose, mais comme une perte irrémédiable. Pour lui, l’adolescence n’est pas une naissance à soi-même, mais bien une forme de deuil, celui d’une existence et de mondes qu’il faut bien se résoudre à laisser derrière soi. Et dans la disparition de ce grand-père que nous ne verrons jamais gît sans doute ce dernier arrachement qui fait de David un éternel orphelin ; en d’autres termes, un adulte.
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