Navigateur non compatible. Veuillez utiliser un navigateur récent
Un réalisateur méconnu et sans le sou est sollicité par un festival pour être membre du jury. Il accepte malgré lui. Peut-être y fera-t-il des rencontres ?
Encore méconnu, pas assez riche, et désespérant d'y changer quoique ce soit à l'âge de quarante ans, Ku Kyung-nam ne peut plus échapper à l'étiquette de "réalisateur art et essai". Lorsque le Festival de Jecheon le sollicite pour être membre de son jury, il accepte avec une idée derrière la tête : peut-être y fera-t-il des rencontres ? Mais il s'endort tous les jours devant des films inintéressants, et passe ses nuits à boire en compagnie de festivalier(e)s aussi ennuyé(e)s que lui. Il pense pourtant avoir trouvé l'âme soeur, mais ce n'est qu'un rêve qui tournera à l'humiliation. Douze jours plus tard, Ku Kyung-nam se rend sur l'île de Jeju pour donner une conférence, à la demande de son ancienne école de cinéma. Devant quelques étudiants, il raconte sa carrière, mais plus il s'anime, plus son auditoire semble indifférent. Le directeur l'entraîne ensuite au restaurant, où leur ancien professeur, devenu un peintre renommé, les rejoint. Le vieil artiste s'est remarié, et sa jeune épouse n'est autre que l'amour de jeunesse de Ku Kyung-nam, qui lui écrit bientôt : "J'aimerais savoir si nous pourrions être plus qu'amis." Ku Kyung-nam décide de vérifier la chose…Tout le monde s'accorde à dire que c'est un été à la chaleur meurtrière.
Le lecteur n'est pas installé ?
Pour votre information, la lecture en mode hors-ligne n'est pas compatible avec le système d'exploitation Linux
" Les femmes de ses amis sont peut-être les siennes, ou celles de son personnage ; la seule certitude, de taille, est qu&rs
" Les femmes de ses amis sont peut-être les siennes, ou celles de son personnage ; la seule certitude, de taille, est qu’avec Hong Sang-soo, on dispose d’un compagnon de cinéma des plus fidèles et précieux. (...) À l’image du précédent Woman on the Beach, Les Femmes de mes amis est plié par une césure centrale à partir de laquelle le personnage principal navigue dans une première situation, un premier triangle possible, puis, avec la même détermination à voir l’âme sœur dans des épouses d’amis, un second. À la périphérie de ces triangles, d’autres possibles sentimentaux traversent plus ou moins furtivement le film ; entre autres, le membre d’un jury, la directrice d’un festival, une étudiante entreprenante… (...)
Comme toujours, le geste cinématographique repose sur une grande liberté. On retrouve une forme mise entre parenthèse depuis Conte de cinéma, alors que Night and Day et Woman on the Beach se signalaient par une fixité qui n’était remise en cause que par des mouvements lents, essentiellement des panoramiques. Tout repose ici sur une vivacité alerte faite de cadrages, recadrages, décadrages, beaucoup moins par le montage que par l’usage du zoom. Le ressenti est celui d’une mise en scène spontanée, comme décidée en direct, dans l’instant ; ce qui confère une grande respiration et légèreté à l’ensemble. Mais loin d’une confusion, cette grammaire visuelle inclut ou exclut les uns et les autres, elle est aussi l’aiguillon des multiples combinaisons sentimentales. Être uni ou désuni dans le plan a parfois valeur de sentence, par exemple quand le troisième personnage du triangle est chassé du cadre par un recadrage. S’organise ainsi une circulation très fluide, cruelle et touchante entre les êtres, mais aussi avec leur environnement – ici le paysage est particulièrement convoqué ; autant de figures d’un monde mouvant et instable, auquel il est difficile de prendre part, à l’image de l’état de flottement perpétuel de Monsieur le réalisateur Ku."
" On a parfois comparé le cinéma d'Hong Sang-soo à celui d'Eric Rohmer. Certes il y a ce sentiment d'
" On a parfois comparé le cinéma d'Hong Sang-soo à celui d'Eric Rohmer. Certes il y a ce sentiment d'être face à un monde familier, immédiat, à une vision limpide des événements enregistrée par la caméra. Mais la comparaison n'a de sens que si l'on constate que, tout autant que chez l'auteur des Nuits de la pleine lune, Hong Sang-soo traque la capacité de ses personnages à vivre de significations imaginaires, à noyer sous les mots la vérité des sentiments et des pulsions, à parler le réel pour mieux le perdre par une sorte de fatalité. Elle prend ici la forme d'une répétition des situations vécues par Ku Kyung-nam, qui semble ne tirer aucun profit des expériences qu'il vit.
Si le cinéaste, qui a par ailleurs fréquemment montré son goût pour les jeux narratifs et temporels, semble moins "déconstructeur" avec ce film, il n'a pas néanmoins abandonné toute expérimentation. Une ellipse brutale du récit, à la fin de sa première partie, laisse le spectateur dans l'ignorance d'un événement important (celui qui a valu au héros l'inimitié de son ami). Ce black-out de la conscience du personnage principal est sans doute la conséquence d'une sorte d'amnésie éthylique. L'alcool, dans ce film, dont les protagonistes boivent beaucoup, est, tout comme la parole, une manière possible de faire disparaître le réel."
" Le dernier film de Hong Sangsoo prend place sous un soleil de plomb, assommant comme une gueule de bois, et plonge Ku, le personnage
" Le dernier film de Hong Sangsoo prend place sous un soleil de plomb, assommant comme une gueule de bois, et plonge Ku, le personnage principal, dans une lumière crue peu flatteuse. L’ingratitude est là dès le départ, pas seulement liée au climat mais aussi au choix pas nouveau du cinéaste coréen de s’intéresser à son double : un réalisateur estimé des cinéphiles mais peu vu et compris du grand public. De quoi redouter une mise en abyme nombriliste, porteuse des pires poncifs sur la création.
Mais c’est oublier que l’un des moteurs de Hong Sangsoo, c’est une matière certes intime, mais aussi retorse, qu’il regarde sans complaisance, et ici avec un humour féroce. Ainsi, Les Femmes de mes amis aurait pu tout autant s’intituler Conte de cinéma, comme l’un de ses précédents films, que porter le titre facétieux de son prochain long métrage sélectionné à Cannes, Hahaha. Nous sommes à la moitié du film, et déjà passés par de drôles d’états (un festival de cinéma cauchemardesque), quand Ku arrive sur l’île de Jeju pour faire une conférence auprès d’étudiants en cinéma. A son ami professeur qui lui demande d’où vient l’égratignure qu’il a sur le visage, l’invité répond fièrement qu’il s’est bagarré avec des types qui lui reprochaient de regarder les jambes de leur copine. Puis il s’empresse de préciser que ses agresseurs se trompaient sur son compte. L’anecdote en dit long sur le réalisateur qui, tout en mentant (nous connaissons les véritables raisons de sa blessure, bien plus tordues), reste dans le vrai par rapport à ce qu’il incarne au sein du film : un artiste content de faire son intéressant et finalement pris au piège, au sein de ses propres fantasmes, du fantasme des autres qui le perçoivent souvent comme un épouvantable séducteur.
Les zooms sont là, étonnamment supportables, pour brouiller les pistes tout en recadrant à froid un orgueil souvent mal placé. Car son égocentrisme et son hypocrisie prêtent aussi le flanc à la critique – l’organisatrice du festival dont il est membre du jury lui reproche de faire des promesses en l’air – et il est étonnant de voir à quel point, dans la chaleur ambiante imbibée d’alcool, les faiblesses de ce vrai faux Ku lui échappent et semblent être absorbées par tout ce qui l’entoure au point de rendre difficilement discernable le rêve de la réalité, truffée de mirages.
En témoigne cette nuit (très buñuelienne) que le cinéaste passe chez un ancien ami qui lui présente sa femme. Que se passe-t-il pour que le lendemain ce même ami menace de le tuer ? Tout laisse alors à penser qu’un bête fantasme de Ku a bel et bien interféré avec la réalité. Comme si le monde autour de lui s’empressait d’amplifier ses failles en leur donnant des conséquences pathétiques et démesurées.
Cette vérité honteuse, forcément sexuelle, dont le cas Ku serait directement ou indirectement coupable (un viol, un adultère), se dérobe la plupart du temps de manière moqueuse : même les buissons et arbres alentour semblent se marrer. Les seuls indices restent des gémissements (ou vomissements !) de femmes entendus à travers des cloisons dont le réalisateur ne sera qu’une seule fois réellement responsable, lorsqu’il couche à la fin du film avec son amour de jeunesse, devenue la femme d’un ancien prof. Comme si les reproches qui lui étaient faits, à force d’être grossis, finissaient par trouver une justification.
Au meilleur de sa forme, Hong Sangsoo excelle dans l’art de stopper un moment (des signatures d’autographes abrégées, une nuit d’ivresse) – tel un coitus interruptus – pour mieux le réinjecter, détourné, dans le cours et le décor du film et creuser ainsi une profonde lacune. Le “si tu savais tout” qui ouvre le film semble alors se prolonger et se conclure par un ironique “tu ne saurais rien”, tel un serpent qui se mord la queue, car le doute règne en maître sur ce conte métaphysique et trivial d’une lucidité moite et hallucinée effroyablement hilarante."
" (...) c’est aussi une vraie comédie, dont le sous-titre pourrait être «in vino veritas» - ou «i
" (...) c’est aussi une vraie comédie, dont le sous-titre pourrait être «in vino veritas» - ou «in cervisia» en l’occurrence, mélangée à du whisky. Sauf que Ku ne connaîtra la vérité qu’à titre onirique, ou du moins en forme de donut, puisqu’à chaque fois qu’on le fait picoler on l’accuse quelques jours plus tard de faits honteux et indéfinis dont il ne se rappelle rien, coma éthylique oblige.
Le titre coréen original signifie «Tu ne savais même pas». En le comparant au titre international, «Comme chacun sait» (Like You Know it All), on comprend à peu près la dramaturgie humoristique du cinéaste. Le plus drôle est que Ku est une sorte de Bartleby qui «préférerait ne pas». Rester couché est apparemment son état normal, même s’il apprécie qu’on s’intéresse à lui. Dès qu’il accepte de sympathiser, il est cependant irrésistiblement entraîné dans des relations triangulaires discordantes.
A chaque fois, les gens commencent par couvrir Ku d’éloges et d’amitié, mais l’affection, pour peu qu’il y réponde, se métamorphose bizarrement en motif de différend, pouvant aller jusqu’au caillou dans la gueule. Et finalement, alors que c’est toujours sur Ku que tombent les reproches, c’est aussi pratiquement lui qui paraît le moins timbré parmi tous ces passifs-agressifs qui confondent (mais c’est une névrose banale) amour et haine. Son seul mais impardonnable tort est de croire au père Noël, c’est-à-dire à l’âme sœur et à l’amitié réelle.
Bien sûr, rien n’empêche de regarder Les Femmes de mes amis par l’autre bout des relations humaines et de considérer que Ku n’y comprend tellement rien que c’est lui le coupable et le malfaiteur de lui-même. Truelle. Le rire de Hong ne s’arrête pas à ce flottement toujours indécis des espoirs et des rôles, à cette réversibilité légère du marivaudage. Il recycle sa syntaxe habituelle (panoramiques découvreurs et recadrages à la truelle) en une théâtralisation qui mime les désirs et les craintes de Ku. Il nous met au niveau de ses yeux simplets ou dans la peau d’Epicure regardant les atomes tomber. L’inertie, filmée de l’intérieur, ne manque pas de joyeusetés."
Nos offres d'abonnement
BASIQUE ETUDIANTS
1 | € |
le 1er mois(1) |
SANS ENGAGEMENT puis 4,99€ /mois
Sur présentation d'un justificatif(2)
BASIQUE
1 | € |
le 1er mois(1) |
SANS ENGAGEMENT puis 6,99€ /mois
PREMIUM
9 | ,99€ |
/mois |
SANS ENGAGEMENT
* A l'exception des films signalés
CINÉPHILE
15 | ,99€ |
/mois |
SANS ENGAGEMENT
*A l'exception des films signalés
BASIQUE ETUDIANTS
49 | ,99€ |
/an |
Sur présentation d'un justificatif(2)
BASIQUE
69 | ,99€ |
pour 1 an |
PREMIUM
99 | ,99€ |
pour 1 an |
* A l'exception des films signalés
CINÉPHILE
175 | ,99€ |
pour 1 an |
* A l'exception des films signalés
Vous devrez fournir un justificatif de scolarité (carte étudiante ou certificat, en .pdf ou .jpg).
UniversCiné se réserve le droit d'annuler l'abonnement sans possibilité de remboursement si la pièce
jointe envoyée n'est pas conforme.
Offre valable 12 mois à partir de la date de l'abonnement
_TITLE