Stephan Elliott est né à Sydney, Australie et a passé l’essentiel de son enfance derrière une caméra super 8. Il fut un pionnier des films de mariage après l’invention de la Betacam. A l’époque, il fallait une équipe de trois personnes : le matériel d’enregistrement du son, séparé de la caméra pesait le poids de Pavarotti et il fallait deux personnes pour le porter.
Entre 13 et 18 ans, il a filmé plus de 900 mariages, à une époque où les gens étaient si admiratifs qu’ils acceptaient de refaire quatre fois la cérémonie sous quatre angles différents. Parfois, ils acceptaient de remettre le glaçage sur le gâteau.
Stephan Elliott a quitté l’école en 1981 pour rejoindre une formation de monteur à la prestigieuse North Sydney Tech. Il y avait 2000 candidats pour 12 postes. Bien qu’il possédât de nombreux exemples matrimoniaux pour prouver sa compétence, il devait passer des examens en maths et en anglais. Sachant pertinemment que sa dyslexie serait rédhibitoire, il demanda à son meilleur ami de se joindre à lui pour l’examen. Pendant les épreuves, ils échangèrent leur nom. Stephan récolta 95 points sur 100. Son ami 27.
Stephan fut accepté dans la prestigieuse école qui ne mit pas longtemps à réaliser qu’il avait triché.
Pendant ses études, il continua à chercher du travail – le plus notable dans ce domaine étant sa menace de s’enchaîner à la porte du tandem Kennedy/Miller pour décrocher un job sur Mad Max 2.
Plus tard, il décrocha un poste à la cantine d’un film baptisé Silver City.
Quand le troisième assistant tomba malade (certains parlèrent d’empoisonnement alimentaire), Elliot le remplaça. Il passa la décennie suivante à travailler sur d’improbables films australiens comme assistant. Ce sont ses années de formation : il apprit COMMENT IL NE FAUT PAS FAIRE LES FILMS.
Epuisé, Stephan partit pour de longues vacances en Nouvelle Zélande, d’où il revint avec son premier scénario, Frauds. Il aurait commencé à écrire plus tôt si les vérificateurs d’orthographe avaient été inventés… Le projet fut remarqué par un fabricant de vin qui venait de monter une société de production. Ils sont depuis devenus inséparables.
Le tournage se transforma en cauchemar quand les financiers firent faillite – cela dit, Frauds, avec Phil Collins et Hugo Weaving, fut sélectionné en compétition au Festival de Cannes 1991.
A cette époque, une productrice demanda à Stephan s’il avait une idée pas trop chère qu’ils pourraient envisager de vendre pendant leur séjour cannois. Stephan venait de voir une drag queen dans une parade de Mardi Gras et il caressait l’idée d’un western australien à la Sergio Leone – avec des travestis.
En 14 jours, il écrivit Priscilla, folle du désert. Le film triompha à Cannes deux ans plus tard, véritable coup de coeur du public, bientôt suivi par des Bafta et des Oscars…
Désorienté par ce succès, Stephan Elliott passa la décennie suivante à prendre ses distances avec Priscilla. Quand on lui parlait d’une adaptation sur scène, il répondait par une question : Comment pouvez-vous imaginer mettre le décor d’un film situé en plein désert sur une scène de théâtre ? Il passa quelques années à éviter l’idée.
C’est un grand naïf, parfois.
Deux films suivirent : une comédie noire, Welcome to the Woop Woop et un thriller, Voyeur (Eye of the Beholder), remake de Mortelle randonnée de Claude Miller où Ashley Judd et Ewan Mc Gregor se substituent à Isabelle Adjani et Michel Serrault. Les deux tournages furent catastrophiques. Dans le premier cas parce que Sam Goldwyn company, qui produisait Woop Woop, fut racheté par la MGM à la moitié du tournage. Le studio ne savait pas quoi faire d’un petit film « à mauvais esprit ». Dans le second cas, les financiers firent faillite au milieu du tournage, lui coupant tous les vivres. Curieusement, les deux films furent invités respectivement à Cannes puis à Venise.
Stephan prit sa retraite, jurant d’abandonner le cinéma mais continuant à skier trois mois par an.
Le reste est de l’Histoire.
Car Stephan Elliot a connu quelques années de silence. S'étant retiré dans les Alpes françaises, il se casse le dos, le bassin et les jambes en faisant du ski.
On lui a dit qu’il ne survivrait pas – mais il a déjoué le pronostic et repris son ordinateur depuis un lit d’hôpital. Il s’est attellé à la première version d’Un mariage de rêve (Easy Virtue), d'après une pièce de Noel Coward, et à une adaptation pour la scène de Priscilla, folle du désert, le film qui l’avait révélé en 1994.
Depuis, Priscilla the musical a battu tous les records de box-office dans son Australie natale et voyage en grande pompe jusqu'au Palace Theatre de Londres.