Gabriel Auer et Carlos Andreu : Donner la parole à ceux qui ont vécu l’histoire
En Juin 1980, Andrée Tournès s'entretient avec le réalisateur et le coscénariste de Vacances Royales. Gabriel Auer1
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En 1976, le roi Juan Carlos est en visite en France. Une douzaine d’anarchistes espagnols sont alors assignés à résidence pendant cinq jours à Belle-Ile-en-Mer.
En 1976, le roi Juan Carlos effectuait une visite officielle en France. A cette occasion, une douzaine d’anarchistes espagnols furent assignés à résidence pendant cinq jours à Belle-Ile-en-Mer... surveillés par 130 CRS ! Le réalisateur a combiné la fiction et les interviews des protagonistes pour raconter cet événement qui dévoile la terreur des pouvoirs face à quelques individus épris de liberté. De quel côté est le terrorisme ?
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" il pose avec une particulière lucidité le problème du terrorisme et de la violence dans les démocraties occidentales. Pour Auer aussi, la
" il pose avec une particulière lucidité le problème du terrorisme et de la violence dans les démocraties occidentales. Pour Auer aussi, la guerre est finie mais la situation cocasse qu'il nous décrit illustre avec intelligence ce sujet grave. Et le montage vidéo qui, lui, nous met en présence des authentiques immigrés espagnols, est loin d'être inintéressant tant l'analyse, qui y affleure, la sincérité qui en émane et l'humour en sont les pièces maîtresses. De plus, le comique de situation (qui joue sur l'opposition libre/prisonnier) est plaisamment exploité..."
François Fonvieille" En 1976, quelques réfugiés espagnols réputés anarchistes et résidents en France, avaient été «déportés » pour quelques jours à Belle-Ile-
" En 1976, quelques réfugiés espagnols réputés anarchistes et résidents en France, avaient été «déportés » pour quelques jours à Belle-Ile-en-Mer le temps de la visite à Paris du roi Juan Carlos. C'est de cet épisode authentique des rapports franco- espagnols que s'inspire Gabriel Auer pour Vacances royales (...)
Auer part de l'anecdote pour se livrer à une réflexion sur le terrorisme à travers le principal personnage, Toni, qui s'interroge sur la légitimité de l'action violente. (...) à la fois metteur en scène et journaliste politique, un pied dans le cinéma, l'autre à la télévision, Gabriel Auer fait de la corde raide et perd parfois l'équilibre. Mais ça ne fait rien ; pour une fois qu’un film français parle de problèmes d’actualités autrement qu’en termes manichéens à la Cayatte, on ne va pas refuser de l’écouter ; surtout lorsqu’il s'agit de celui du terrorisme opposé à la violence « légale » de l’Etat. On voit que Gabriel Auer ne tourne pas pour dire n’importe quoi."
C’est un « premier » film rigoureux, complexe mais non confus, qui donne l’impression qu’Auer et son co-auteur Carlos Andreu ont exactement
C’est un « premier » film rigoureux, complexe mais non confus, qui donne l’impression qu’Auer et son co-auteur Carlos Andreu ont exactement et précisément réalisé leur projet. Au départ, un fait de chronique : l’aventure de douze émigrés espagnols relégués par le pouvoir giscardien à Belle-Ile le temps d’une visite de Juan Carlos en France. Espagne, exil, répression, terrorisme : des mots qui font lever des images et des émotions ; en visée un appel des cinéastes à une réflexion sur le terrorisme ; et cette réflexion Auer s’est interdit de la brouiller par le pathos.
Des trois niveaux de récits dont l’intrication tisse le réseau serré du film Auer s’explique longuement dans l’interview ci-jointe. Un épisode central est consacré aux « vacances » ; morceau de cinéma cocasse où s’ébrouent les prisonniers, s’agitent les gendarmes locaux et s’interrogent des Bretons : du beau « grand cinéma » qui fait chaud et gai au cœur. Et cette « représentation » conforme à la réalité — Carlos Andreu, le co-scénariste l’a vécue — vient illustrer les témoignages télévisés où les vrais relégués parlent de leur arrestation.
Auer revient plusieurs fois dans son interview à l’idée de dynamisme, et c’est vraiment là ce qui fait la qualité de ce film. Une tension qui s’établit entre la réalité qui donne son poids au film et une fiction qu’Auer introduit dans la reconstitution de cette réalité : présence des témoignages sur l’écran, présence de nos souvenirs dans notre conscience de spectateurs ; de ce fait l’histoire de Toni, le garçon emmené par « bavure » à Belle-Ile qui devient terroriste et décide de rompre avec son groupe devient un élément de notre réflexion puisque Auer le marque clairement comme élément inventé.
L’autre élément qui dynamise le film — et on sait l’admiration que porte Auer à Resnais — c'est le fait que la chronique qui constitue le noyau du film s'insère dans une durée où passé et avenir, fantasmes et souvenirs, rappel de la dictature espagnole et tracasseries de nos états modernes s’organisent en un réseau serré. Un film réussi dans sa tentative d’atteindre le grand public sans faire de concession. Un film courageux parce qu’à la dénonciation — toujours aisée — de l’injustice d’Etat se lie la plus difficile interrogation sur la légitimité de nos ripostes.
" Voici un film qui, dans sa structure et son écriture mêmes, pose le problème de la relation entre la représentation et son objet, un film
" Voici un film qui, dans sa structure et son écriture mêmes, pose le problème de la relation entre la représentation et son objet, un film qui met en cause l’illusion référentielle sans, pour autant, abandonner le projet de rendre compte de faits réels, et de leur donner — recréés — leur espace et leur temps. Les faits : l’arrestation d’anarchistes espagnols, en octobre 1976, lors de la visite en France du roi Juan Carlos et leur exil à Belle-Ile sous la surveillance d’une compagnie de CRS. Affaire exemplaire que Gabriel Auer aurait pu reconstituer pour en « tirer-la-leçon » : comme on sait, depuis 1976, le sort des réfugiés politiques n’a cessé d’empirer dans notre pays... Or, s’il y a, dans Vacances royales, des fragments de reconstitution, c’est par le biais d’un récit qui tantôt se replie sur lui-même et tantôt se dédouble pour mieux rendre compte du réel. Rendre compte du réel, c’est-à-dire non le représenter « tel qu’il fut », mais le restituer dans une structure imaginaire.
Cette structure est multiple : il y a, en vidéo, la parole-souvenir des exilés (il s’agit d’extraits d’une enquête, préalable au tournage do film, menée par Gabriel Auer et par Carlos Andreu, l’un des Espagnols de Belle-Ile), parole présentée sur un écran de télévision par le biais du reportage qu’un Canadien consacre au terrorisme et à la lutte armée dans différents pays d’Europe ; il y a aussi les images fictives de leur séjour à Belle-Ile, images qui composent un récit classique, dont ne sont exclus ni le « pittoresque » du lieu ni le comique (ubuesque)... de la situation ; il y a enfin une fiction-fiction qui introduit un personnage imaginaire derrière lequel le réalisateur est « présent », même s’il n’apparaît pas sur l’écran. C’est ce personnage qui introduit la réflexion sur le terrorisme, thème central de la seconde partie du film.
Gabriel Auer ne se cache pas d’admirer le cinéma de Resnais. Son film en porte la marque. Mais la comparaison qu’on peut faire, moins avec Mon oncle d'Amérique, qui lui est postérieur, qu’avec Muriel, n’est pas accablante pour Vacances royales. Au demeurant, ce premier long métrage de Gabriel Auer s’inscrit aussi dans la voie d’une expérimentation des rapports fiction-documentaire qui appartient en propre à son auteur : les courts métrages qu’il a réalisés depuis 1971 en témoignent à des degrés divers même si Le destin de Jean-Noël (1975) représente, de ce point de vue, la démarche la plus consciente et la plus élaborée.
Ajoutons que Vacances royales est aussi un film de réflexion. Le « personnage » du film est un jeune révolté qui a été tenté par la lutte armée et qui se rend compte que celle-ci est inadaptée à la société occidentale, telle qu’elle est aujourd’hui. Ce n’est pas un « terroriste repenti » (deux vilains mots dont les media dominants usent et abusent) mais un homme de doutes et d’interrogations. Il n’est pas, dans le film, entièrement convaincant, sans doute, en raison de son caractère trop épisodique et du jeu un rien chargé de Didier Sauvegrain, mais il est celui à travers lequel Gabriel Auer s’explique le plus complètement avec le présent. Et cette « explication » est passionnante."
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