WES CRAVEN
LE MAÎTRE DE L'HORREUR EN 10 FILMS

Pendant près de 40 ans, Wes Craven a été l’un des cinéastes qui ont façonné l’horreur moderne, passant d’un sous-genre à l’autre, faisant évoluer les formes. Dès le rape and revenge La Dernière Maison sur la gauche et le survival La Colline a des yeux, le réalisateur suit le tournant des années 1970 qui précipite l’horreur dans le quotidien et l’hyperréalisme et déconstruit la famille – et par là, la société  – américaine. Lors de la décennie suivante, il redéfinit les règles du slasher en créant l’un des boogeymen les plus iconiques, Freddy Krueger. S’interrogeant sans cesse sur le genre, Craven prend ses distances avec les codes qu’il a contribué à créer, et fait basculer l’horreur dans le post-modernisme et la mise en abyme ludique avec la saga Scream, dans la deuxième moitié des années 1990. De La Dernière Maison sur la gauche à Scream 4, retour sur 40 ans de carrière, en 10 films. 


La Dernière Maison sur la gauche (1972)

Initialement conçu comme un film à caractère pornographique empreint de violence, le premier long métrage de Wes Craven résonne comme un petit séisme dans le paysage du film d’épouvante. Inspiré notamment par le film de Bergman La Source, La Dernière Maison sur la gauche porte en lui un peu de la désillusion cauchemardesque du Viêt-Nam et la fin d’une insouciance longuement torturée. Si le film fait autant date, c’est évidemment par sa brutalité frontale et le tournant qu’il opère quant à la représentation de la violence dans le cinéma américain. Un premier geste puissant. 

Pour son troisième long métrage, Craven s’attaque à la déconstruction des valeurs de l’Amérique traditionnelle en plongeant une famille de vacanciers aux prises avec une famille de troglodytes cannibales dégénérés dans le désert du Nouveau Mexique. Dans la lignée de Massacre à la tronçonneuse, La Colline a des yeux fait figure de borne incontestable de l’horreur moderne qui, dès les années 1970, se plait à montrer la violence primale qui ressurgit dès lors que le vernis de la civilisation se craquelle et que la survie est en jeu.

Les Griffes de la nuit (1984)

Alors que le slasher, officiellement né en 1978 avec Halloween de John Carpenter, est déjà sur le déclin, Wes Craven révolutionne le genre en y introduisant l’élément surnaturel. Ce qui lui permet de mettre en scène un boogeyman aux apparitions plus folles les unes que les autres, puisque le terrain de jeu de Freddy Krueger n’est autre que les rêves de ses victimes. Un boogeyman bavard, auxpunchlines aussi acérées que les lames de son gant mythique, et qui rompt avec le mutisme de Michael Myers et autres JasonVoorhees. 

L'Emprise des ténèbres (1988)

 

L’un des films majeurs dans la création du zombie, Vaudou (Jacques Tourneur, 1943) le suggérait déjà : les rites vaudous existent bel et bien. Il n’en fallait pas moins pour que Craven, armé de son plus gros budget jusqu’alors (7 millions de dollrs) parte en Haïti pour expérimenter le culte local. En résulte une œuvre un peu à part dans la filmographie du réalisateur, avec des éclats lorsqu’il s’agit de confondre le réel et le cauchemar, dans un Haïti au bord de l’implosion. 

 

Dans les murs de votre maison, vous entendez des pas. Normal, des gens y vivent. C’est le point de départ de la satire sociale à la sauce Craven, drôle et gore à la fois, avec le malaise constant de la maison “habitée”. Si on a qualifié le film de série B à sa sortie, coincé dans la carrière du cinéaste entre Les Griffes de la Nuit et Scream quelques années plus tard, il n’en demeure pas moins extrêmement bien écrit.Derrière l’horreur, on sent tout le poids des années Reagan remonter “à la surface”. 

Freddy sort de la nuit (1994) 


Dix ans après le premier volet de la saga Freddy, qui lui avait échappé au profit d’autres réalisateurs et scénaristes, Craven se réconcilie avec Bob Shaye, emblématique producteur à la tête de New Line et revient enterrer son iconique boogeyman. Craven se met en scène dans ce septième opus de la saga, aux côtés de ses acteurs Robert Englund et Heather Langenkamp, attaqués sur un tournage par un Freddy Krueger quittant le monde des rêves pour celui de la réalité. Le chaînon manquant entre le slasher traditionnel et le slasher méta, que Wes Craven et Kevin Williamson inventeront deux ans plus tard avec Scream

Scream (1996) 

Douze ans après Les Griffes de la nuit, Wes Craven révolutionne une seconde fois le slasher avec Scream. Le scénariste Kevin Williamson introduit un aspect méta : lespersonnages sont des ados qui connaissent les films d’horreur et utilisent leurs codes pour tenter de rester en vie face à un psychopathe masqué, Ghostface. Une manière ludique de réinventer le slasher en incluant le spectateur qui, à l’instar des protagonistes, connaît lui aussi les tropes du genre et doit deviner qui se cache derrière le masque de Ghostface. 

La Musique de mon cœur (1999)

 

Difficile d’accéder aux Oscars lorsqu’on ne verse que dans l’horreur et le gore. Avec sa première incursion dans la comédie dramatique, Wes Craven a failli diriger Madonna mais c’est à Meryl Streep que reviendra le rôle de Roberta Guaspari, nommée cette année-là aux Oscars. Le film est un biopic, loin des standards habituels mais grâce auquel Craven va démontrer tout son talent pour se fondre dans un classicisme qu’on ne lui connaissait pas. Ce sera sa seule véritable incursion dans le “conventionnel” pour un doux drame habité, qui conte les bienfaits sociaux de la musique comme vecteur d’intégration sociale. Mineur mais révélateur.

 

De l’horreur au thriller, la frontière peut être ténue. L'épouvante est ici incarnée par le magnétique Cillian Murphy, charmeur avant de se dévoiler dans un rôle de bad guy qu’on ne lui connaissait pas. La majeure partie du film se passant dans un Boeing, l’équipe a dû en reconstruire une partie en studio pour pouvoir en explorer toutes les coutures. Thriller psychologique que Craven dit être loin de l’horreur, Red Eye n’en est pas moins diablement efficace et terrifiant. Lorsqu’on est pris au piège dans un cercueil volant, pas étonnant que la peur revienne au galop...

Scream 4 (2011) 

Dernier film du réalisateur, Scream 4 conclut la carrière de WesCraven, décédé en 2015. Entre hommage et échos au premier film de la saga, Scream 4 présente une nouvelle génération de personnages incarnés par Emma Roberts, Hayden Panettiere et Rory Culkin, venus seconder les comédiens emblématiques de la franchise : Neve Campbell, Courteney Cox et David Arquette. Poursuivant son discours méta, Scream 4 entend s’adresser à une nouvelle génération de spectateurs, biberonnée aux réseaux sociaux, à Youtube, et à la culture de l’image tout en satisfaisant les fans historiques. 

© Images tous droits réservés : La Dernière maison sur la gauche : MGM, La Colline a des yeux : Carlotta Films, Les Griffes de la nuit, Freddy sort de la nuit : Warner Bros., L'Emprise des Ténèbres, Le Sous-sol de la peur : Universal, Scream : Les Films Number One, La Musique de mon coeur : Bac Films, Red Eye : Sous haute pression : United International Pictures, Scream 4 : SND

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