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Au XVIIIe siècle, Kitagawa Utamoro est un peintre spécialiste du portrait féminin et il entretient avec ses différents modèles des rapports ambigus.
"Cinq femmes autour d'Utamaro" est une biographie du peintre et graveur Utamaro Kitagawa (1753-1806), peintre considéré comme un spécialiste du portrait féminin. Il entretient avec ses différents modèles des rapports ambigus, dans un tourbillon passionnel qui va bientôt le dépasser.
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Cet autoportrait de l’artiste en peintre d’estampes du 18ème siècle célèbre l’art éph&e
Cet autoportrait de l’artiste en peintre d’estampes du 18ème siècle célèbre l’art éphémère, l’amour sans demi-mesures, et la fragilité du monde flottant. L’argument : Au XVIIIe siècle, Kitagawa Utamaro est un peintre considéré comme un spécialiste du portrait féminin. Il entretient avec ses différents modèles des rapports ambigus, dans un tourbillon passionnel qui va bientôt le dépasser… Notre avis : Entre 1945 et 1949 l’oeuvre de Mizoguchi, qui avait atteint un degré d’accomplissement apparemment indépassable avec des titres tels que Zangiku monogatari / Contes des chrysanthèmes tardifs (1939), traverse une passionnante période de crise. Josei no shôri / La victoire des femmes, Joyû Sumako no koi / L’amour de l’actrice Sumako, Yoru no Onna Tachi / Femmes de la nuit ou Waga koi wa moenu/ Flamme de mon amour, ardents plaidoyers féministes, sont des films admirables, souvent saisissants, mais à la forme parfois un brin figée et aux dialogues volontiers explicatifs. Ces scories et hésitations sont absentes de Utamaro o meguru gonin no onna/ Cinq femmes autours d’Utamaro qui est assurément le fleuron de cette période intermédiaire. Le fameux peintre d’estampes Kitagawa Utamaro (v. 1753 - 1806) y apparaît, sous les traits de Minnosuke Bando, comme un double du cinéaste. Dans ses Souvenirs, publiés en français dans les Cahiers du Cinéma de 1965 à 1968 et plusieurs fois réédités en volume depuis, Yoshikata Yoda, le scénariste fidèle, avouait avoir voulu faire presque inconsciemment le portrait de Mizoguchi. Citant ses propres notes préparatoires il décrivait : Utamaro noyé dans le féminin. Il abrège sa vie à consacrer toute son énergie aux femmes. Mais cette vie qu’il a gaspillée avec elles, pour elles, ressuscite dans sa peinture. Loin des hagiographies grandiloquentes et empesées, l’artiste y est montré comme un homme parfois ridicule, faible, velléitaire, facilement apeuré, mais aussi orgueilleux et sûr de son talent, dont l’oeil s’illumine d’une joie gourmande, enfantine, lorsque son envie de peindre s’éveille à la vue d’un support inédit (le dos de la courtisane), d’un motif nouveau (les corps des dizaines de jeunes femmes se dévêtant avant de se jeter à l’eau pour satisfaire le caprice d’un potentat) ou quand on lui délie les mains après cinquante jours d’ abstinence imposée. Consacrant sa vie à la célébration de la beauté vivante il entre forcément en conflit avec les peintres académiques, adeptes d’un art décoratif et figé, mais aussi avec l’ordre établi en général. Cet pratique d’un art sans compromission, exercé en pure perte, insoucieux des règles à fixer et de la postérité (le tatouage qu’on verra une dernière fois sur la peau de la jeune femme assassinée) trouve un écho dans la conception de l’amour professée et vécue jusqu’au crime par la courtisane Okita (sublime Kinuyo Tanaka) qui est le pendant féminin d’Utamaro dans le film. Lorsque, hagarde mais calme, elle vient le voir une dernière fois avant de se livrer à la police, elle lui déclare à peu-près : Je suis comme toi. Loin de se réduire à une profession de foi, l’oeuvre déploie une grande variété de motifs. Le pathétique et le tragique n’y sont pas soulignés et le soin maniaque de la reconstitution historique y est contrebalancé par un humour permanent, un sens aigu du dérisoire et du grotesque (le duel des deux courtisanes se disputant leur homme-objet). La photo splendide, signée Shigeto Miki, ressuscite l’univers de l’estampe (Utamaro bien sûr, mais aussi Utagawa Hiroshige pour les scènes d’ensemble) sans tomber dans les travers du pictural. L’art de la mise en scène, le jeu du montré et du caché, est ici d’une sûreté de main sidérante. Les déplacements latéraux, figure de style mizoguchienne par excellence, sont d’une lenteur voluptueuse, et les fréquents fondus au noir séparant des scènes inachevées et comme laissées en suspens installent une troublante sensation de discontinuité temporelle. Il n’y a guère d’autre film qui ressuscite avec un tel bonheur expressif l’esprit du monde flottant.
Claude RieffelCinq femmes autour d’Utamaro : Seinosuke est jeune élève dans l’école de peinture traditionnelle Kano et s&
Cinq femmes autour d’Utamaro : Seinosuke est jeune élève dans l’école de peinture traditionnelle Kano et s’apprête à épouser la fille du maître lorsqu’il fait la connaissance d’Utamaro, graveur d’estampes reconnu pour ses portraits de femmes. Conquis par la sincérité et la technique du graveur, Seinosuke décide de quitter l’école et par là de perdre tout ses privilèges pour le suivre et s’épanouir dans son art. Il ne faut pas chercher loin pour comprendre l’intérêt que porte Mizoguchi pour les petites gens, les saltimbanques et les prostituées… En 1905, au lendemain de la guerre nippo-japonaise, le pays traverse une grave crise économique, Mizoguchi a 7 ans quand la petite entreprise dirigée par son père fait faillite. Plongée dans la misère, la famille déménage dans un taudis d’Asakuza, quartier mal famé de Tokyo où le jeune Mizoguchi passera son enfance, traînant souvent après l’école dans les nombreux théâtres populaires d’un quartier peuplé de prostituées et de marginaux. Les souvenirs de cette époque et de ses déambulations sont le terreau d’une grande partie de son œuvre… Dès qu’il en a l’âge, son père le met au travail comme apprenti chez un dessinateur sur soie. Mizoguchi attrape très vite le goût du dessin. « Ce que je voulais, c’était devenir peintre, un vrai peintre, et j’allais fréquenter l’école Aoibashi (le pont bleu) à Tameike.(1) » Il commence ainsi des études artistiques dans une académie dont il sortira diplômé en 1915. En 1917, il a quitté Tokyo et rejoint le port de Kobe sur la côte nord du Japon, où il trouve un poste de dessinateur dans une gazette locale. Cette passion pour la peinture ne le quittera plus et débordera sur son cinéma, où il s'attachera à faire de chaque plan une splendeur visuelle, une composition parfaite digne d’une toile. C’est d’ailleurs principalement d’un point de vue pictural que Mizoguchi va s’impliquer dans le cinéma, déléguant à son équipe les autres contingences d’un film (2). En adaptant en 1946 un épisode romancé de la vie du célèbre peintre japonais Utamaro Kitagawa (1753 – 1806), Mizoguchi rend un vibrant et passionné hommage à l’art qui l’a vu commencer (le dessin). Il n’est d'ailleurs pas difficile de voir en Utamaro un alter-ego du réalisateur tant leurs personnalités se rejoignent. Le principal refuge du peintre était Yoshiwara, quartier des plaisirs d’Edo où il fréquentait essentiellement maisons de thé et courtisanes (3). Spécialiste de l’Ukiyo-e (4), Utamaro s'était fait une renommée pour ses portraits de courtisanes (Bijin-ga) admirés dans tout Edo. Mizoguchi dépeint un homme dévoré de passion pour les femmes et pour son art, toujours à l'affût d'une beauté à saisir, toujours prêt à capter la sensualité d'un geste ou d'un corps. Interprété par Minosuke Bando qui lui prête son air malicieux, le peintre est présenté comme un personnage pétillant, facétieux mais non dénué par moments d'une certaine mélancolie. Poète graphique sensible à l'âme qui se cache derrière des traits fins (ou non). Amoureux de la femme sans arriver à réellement s'en faire aimer en retour, Utamaro se présente dans le film comme une sorte de Cyrano nippon; confident (d'Okita ou de Yukie) mais jamais amant, entremetteur malgré lui, trouvant dans son art le sens de sa vie et dans la femme son inspiration la plus pure. Il est d'ailleurs significatif que les rares moments d'amertume ou de déception sentimentale coincideront avec des périodes de stérilité artistique. Pour Mizoguchi, cet abandon total dans l'art est la seule voie vers la réussite et c'est parce qu'il s'abîmera dans les plaisirs faciles, délaissant l'essence de son art que Seinosuke ne touchera jamais à la grâce d'Utamaro. Comme le sera plus tard L'amour de l'actrice Sumako, Cinq femmes autour d'Utamaro est un formidable film sur la passion dévorante d'un homme par rapport à son art, doublé d'une passionnante réflexion sur la création artistique. Comme les protagonistes de L'amour de l'actrice Sumako, le peintre ne peut envisager sa vie qu'au travers de son art et avec son art. Sumako se suicidera après le décès de celui qui la faisait vivre à travers le théâtre, Utamaro ne vit qu'en dessinant et il n'aura de cesse de reprendre le pinceau, comme mû par une nécessité vitale lorsque les liens imposés par la censure seront déliés. Le choix de cet épisode de la vie du peintre où il est contraint, par décision du pouvoir, à vivre les mains liées (et par là, incapable d'exercer) pour avoir réalisé un dessin à caractère politique, ce qui était à l'époque strictement prohibé, permet à Mizoguchi d'aborder le thème de la censure qui le touche particulièrement. En effet, pendant toute la durée de la guerre, le cinéaste vit excessivement mal la censure qu'impose le pouvoir mis en place depuis la fin de l'occupation de l'Indochine par le Japon. "A cette époque, le cinéma devenait pour moi un art extrêmement difficile" (5). Bien que la censure ait été officiellement supprimée, elle s'exerce encore par l'entremise de David Conde chargé de contrôler l'industrie cinématographique par les forces d'occupation américaines. Le film à ce titre peu aisément être vu comme un pamphlet en faveur de toute liberté d'expression.
Christophe BuchetEdo, fin du XVIIIème. Cérémonial printanier, sous les cerisiers en fleurs, de la procession annuelle de pr&e
Edo, fin du XVIIIème. Cérémonial printanier, sous les cerisiers en fleurs, de la procession annuelle de présentation des courtisanes, femmes et fillettes.Dans un quartier populaire, un jeune noble veut acheter pour divertir sa fiancée, fille d'un artiste reconnu, une estampe d'Utamaro. D'abord séduit par le dessin, il se révolte devant l'inscription qu'Utamaro y a inscrite où il affirme que les artistes officiels avec leur débauche de couleurs peignent des femmes qui ressemblent à des monstres alors que, d'un simple croquis, il sait lui saisir la vie de ses modèles. Le jeune noble, lui-même disciple du peintre officiel Kano, se sent outragé. Au grand dam des vendeurs d'estampes et de sa fiancée, il exige de rencontrer Utamaro pour se battre en duel avec lui.
Utamaro est chez la geisha Okita qu'il a rendue célèbre en la dessinant mais qui le délaisse pour le jeune Shozaburo. A peine est-elle rentrée et a-t-elle ironiquement salué Utamaro que l'on vient avertir celui-ci que le disciple de Kano veut se battre en duel avec lui. Celui-ci déboule fou de rage avant qu'Utamaro ne réussisse à le convaincre qu'étant donné qu'ils sont tous les deux artistes, il serait lâche de régler ce différent par les armes.
Il lui propose donc de régler l'affaire par le dessin. Devant l'assistance réunit, le jeune noble, Seinosuke, dessine une déesse. Utamaro approuve mollement, lui déclarant qu'il n'a pas su en faire un personnage vivant. De quelques coups de pinceaux, il transforme le dessin. Les sourires de l'assistance, sa tranquilleassurance et le regard stupéfait de Seinosuke suffisent à exprimer le triomphe d'Utamaro.
C'est à ce moment que l'on vient les avertir qu'un tatoueur célèbre refuse de graver un dessin sur la peau d'une femme qu'il trouve trop belle pour cela. Tous décident donc d'aller sur place constater cette merveille.
Utamaro s'émerveille du corps parfait de Takasode dont le kimono entrouvert laisse découvrir le haut de son dos. Il lui propose ainsi qu'au tatoueur de faire un dessin qui pourra être à la hauteur de la beauté de la jeune femme. Devant l'assistance émerveillée, il dessine sur le dos de Takasode l'enfant prodige et sa nourrice. "Ils pleureront quand tu seras triste et souriront lorsque tu seras gaie" affirme-t-il à la jeune femme reconnaissante.
Seinosuke, convaincu de la maîtrise absolue d'Utamaro, décide de devenir son disciple acceptant de vivre humblement dans les bas-quartiers parmi le peuple et les geishas. Il renonce pour cela à son mariage avec Yokie, la fille de Kano, que celui-ci chasse de sa maison.
Un matin, un vendeur de journaux apprend à tous que Takasode s'est enfuie avec Shozaburo. Okita qui en est très amoureuse, achète tous les journaux et les jette au feu. Utamaro ironise sur son manque de perspicacité tout en s'étonnant de la séduction de Shozaburo sur la gent féminine. Sur un pont Shozaburo et Takasode s'enfuient joyeusement.Un soir, à la stupeur de Utamaro et deTakemaro, son fidèle assistant, Yokie débarque chez eux déclarant s'être enfuie de chez elle et être à la recherche de Seinosuke. Utamaro envoie Takemaro chercher celui-ci chez Okita. Mais Seinosuke n'a aucune envie de revoir Yokie à laquelle il reproche son goût de la mesure en toute chose ; Il préfère les plaisirs de rustre que lui accorde généreusement Okita. Takemaro étant revenu seul devant Utamaro et Yokie, ceux ci se rendent chez la geisha. Mais c'est cette fois celle-ci qui refuse catégoriquement que Seinosuke la quitte.
Au matin, Utamaro fait la leçon à Okita, lui demandant de laisser libre Seinosuke d'épouser Yokie qui a sacrifié sa réputation. Okita fait semblant de croire que c'est par jalousie personnelle afin qu'elle retourne vers lui qu'agit Utamaro. Devant ses provocations, celui-ci à du mal à ne pas la fouetter comme elle le lui suggère sournoisement.
Utamaro manque d'inspiration à la lumière du jour ou avec une bougie, il n'arrive à rien. Ses amis et marchands d'estampes s'inquiètent de son improductivité. L'un d'eux propose de l'amener voir un spectacle propre à la stimuler. Un seigneur du voisinage s'entoure de jolies femmes qu'il fait mettre nues sous prétexte de les faire pêcher des poissons dans la mer. La ruse réussit. Les quatre hommes assistent au spectacle de ce parterre d'une quarantaine de femmes ôtant leur peignoir pour aller en chemise légère pêcher des poissons. Utamaro est subjugué par l'une d'elle, Oran, à laquelle il demande la permission de la dessiner nue. Celle-ci accepte et ne garde qu'une légère chemise qui lui comprime la taille pour se laisser peindre par Utamaro.
Pendant ce temps, Okita s'est mise en chasse de Shozaburo et le retrouve grâce à deux porteurs dont l'un a vu le tatouage de Takasode. Okita trouve celle-ci seule devant la maison où elle vit avec Shozaburo. Les deux femmes se disputent et Takasode essaie de cacher son amant qui pêchait tranquillement dans le fleuve. Peine perdue, Okita le fait enlever par les deux porteurs. Shozaburo comparait donc penaud devant elle avoue sa faute et accepte bien volontiers de la suivre.
Parallèlement Utamaro essaie de réconcilier Seinosuke et Yokie demandant au premier de visiter son atelier ou travaille modestement celle-là. Quelques jours plus tard, il est arrêté pour une gravure du shogoun quia déplu au souverain. Seinosuke, aussi ébloui par les dessins que son maître a faits d'elle que par sa beauté, supplie Oran de poser pour lui maintenant que son maître est en prison. Yokie, humiliée et honteuse devant son insistance qui fléchie Oran, s'enfuit.
Utamaro revient chez lui, condamné à cinquante jours de menottes pendant lesquelles il ne pourra rien faire et surtout qui lui interdisent de dessiner. Il reçoit bientôt des nouvelles de Seinosuke qui se dit malade et demande de l'argent. Le fidèle Také et Yokie s'en vont lui en apporter jusque dans la vallée voisine. Mais ils découvrent bientôt que cet argent n'est destiné qu'à vivre pleinement son escapade amoureuse avec Oran.
Plus tard, Takemaro averti Okita qu'il a vu roder Takasode qui semble bien vouloir reprendre son amant. Effectivement lorsque Okita rentre chez elle, Shozaburo a disparu. Elle se saisit d'un couteau et part à leur poursuite. Elle les a bientôt rejoint et somme son amant de désigner celle qu'il préfère entre Takasode et elle. Shozaburo répond qu'il les aime toutes les deux. Okita lui enfonce alors le couteau dans le corps puis se retourne contre Takasode.
On vient annoncer à Utamaro encore menotté le drame qui s'est déroulé. Okita surgit tout de site après venant lui dire que son esprit vient lui dire adieu. Quelle ne pouvait supporter un amour tiède et que pour éviter tout compromis avec son sens de l'amour, elle ne regrette pas son geste qui va la conduire à la mort. Elle va se livrer.
Plus tard, les cinquante jours étant passé, on vient délier les mains d'Utamaro. Ses amis se prépare à fêter cela, Utamaro les renvoie, la fête peut attendre pas l'envie de peindre. Il demande à Takemaro de lui apporter son matériel, trace quelques coups de pinceau. En plan serré viennent se superposer des estampes d'Utamaro.
Autour d'Utamaro, figure légendaire de l'estampes japonaises (1753-1806), gravitent cinq femmes : Okita, la geisha dont il a été amoureux, Takasode, la femme sur laquelle il réalise le dessin, Oran, celle qui pêchait nue des poissons, Yokie la fille de l'artiste officiel dont il se sent responsable de la chute et Oshin la robuste geisha qui finira par épouser son assistant.
Ces cinq figures de femmes sont intiment mêlées à l'art d'Utamaro. Ainsi que l'indique Jacques Lourcelles :
"Pour Utamaro comme pour Mizoguchi, la beauté de la femme représente à la fois le contenu ultime de l'œuvre et la plus ardente stimulation à créer. La femme est au terme et à l'origine de l'œuvre. L'obsession de la femme, l'obsession de la beauté idéale et celle de la création se confondent pour l'artiste et c'est justement le caractère polyvalent de cette obsession -elle n'est jamais uniquement sexuelle ou sentimentale ou esthétique- qui sauve l'artiste de la tragédie où basculent souvent ses modèles et leurs partenaires ".
L'intérêt particulier de ce film dans l'œuvre de Mizoguchi est de mettre totalement hors champ les puissances masculines de l'argent et de la contrainte militaire ou politique. Le caractère tragique du destin de Okita, comme dans une moindre mesure de Takasode et de Yokie, ne leur est pas imposé de l'extérieur mais provient de leur propre cheminement. Lorsque Utamaro est arrêté, nous ne voyons ni la gravure à l'origine de son emprisonnement, ni le jugement, ni ses quelques jours passés en prison. La sanction n'aura pour effet que de le persuader un peu plus de reprendre fiévreusement son activé artistique.
Le cheminement d'Okita est plus atypique encore dans l'œuvre de Mizoguchi. C'est elle qui domine dans toutes ses relations avec les hommes : elle peut faire enrager le sage Utamaro, rendre esclave le faible Seinosuke et ramener à elle le trop volage Shozaburo. Elle fait preuve de décision et c'est elle-même qui décide de son destin. Le plan où, en ombre chinoise, elle se saisit d'un couteau ne laisse aucun doute sur l'usage fatal qu'elle en fera. Si les femmes s'en tirent ici moins bien que les hommes, c'est que leur passion, l'amour, exige de s'appliquer avec constance à des êtres par nature changeants. Même Utamaro a besoin de sujets d'inspiration différents pour poursuivre son œuvre. C'est bien la pureté de son sentiment qui condamne Okita comme leur amour exclusif qui conduit au malheur Takasode et Yokie.
L'éloge du mouvement, du changement passe aussi dans quelques-uns uns des plus beaux plans du film. Lorsque Seinosuke déboule chez Utamaro pour exiger le duel, il arrive par la droite du plan, bloquant violemment Utamaro qui s'apprêtait à sortir au centre de la pièce. Utamaro est contraint de se mettre à terre dans une position humiliante pour échapper au courroux de son interlocuteur. Il finit par le convaincre de régler l'affaire par le dessin. L'affaire se calme, on apporte les feuilles de dessin puis la caméra se déplace légèrement sur la droite pour recadrer les deux protagonistes de face devant la feuille de papier. Ce simple mouvement dit que les choses sont revenus à leur place et que l'issue du duel n'a plus rien à voir à avec celui que Seinosuke voulait imposer par la violence.
A l'inverse, chez Yokie, Seinosuke lui fait part de son intention de quitter la maison de Kano. Le cadrage fixe alors le mur du fond et enclos ceux que l'on croit encore deux amants dans un espace serré et chaleureux. Kano surgit alors par la porte du fond et chasse Seinosuke. La caméra glisse alors sur la droite découvrant la porte mais aussi l'ensemble des couloirs et des portes de la maison par lesquels s'enfuit le jeune homme pour ne plus revenir.
L'usage du recadrage est d'ailleurs assez constant dans ce film où, comme toujours chez Mizoguchi, l'usage du montage est parcimonieux et le choix de l'échelle des plans réduit du plan large au plan rapproché. Seul un flash très bref saisit en gros plan sur le visage d'Oran lorsque Utamaro la désigne au milieu de ses compagnes. Un plan d'élection, de perception plus que d'émotion. Celle-ci provient du seul mouvement des âmes que Mizoguchi sait saisir avec sa grâce habituelle dans ce film où la structure narrative est plus dense qu'habituellement parce que les relations de désirs entre personnages y sont plus nombreuses.
Film excluant le hors champs du pouvoir, le film fait également un usage réduit des échappées dans la nature. Les quelques plans de rivières ou de forêt n'en sont que plus émouvants et magnifiques, exprimant tout à la fois la possibilité d'une vie amoureuse simple et heureuse (musique allègre de la fuite de Takasode et de Shozaburo.) et la fragilité de cet espoir (Také et Yokie franchissant le col pour rejoindre Seinosuke).
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