" A Face in the Crowd développement scénaristique de la nouvelle Your Arkansas Traveller de Budd Schulberg ressemble comme un frère "triplé" aux deux premiers enfants du romancier, les célèbres What makes Sammy run et The harder they fall : même schéma narratif (le destin abusif d'un colosse aux pieds d'argile), même jugement moral timidement incarné par un observateur lucide, même amertume, même humour sauvage, même dynamisme incontrôlable, même rapidité.
Il suffisait pour faire brûler tout cela sur un écran d'un metteur en scène capable d'allier le brillant de Panique dans la rue, le grinçant de Baby Doll et l'ampleur de Viva Zapata. Il suffisait d'Elia Kazan, certes, mais d'un Kazan débarrassé des pensums, généreux ou non, de la grosse machine hollywoodienne, les Gentleman's Agreement et les Sea of Grass.Tourné en quatorze semaines dans les vieux studios VItagraph de la Côte Est, Un homme dans la foule est une chasse perpétuelle, et fructueuse, à la fébrilité spontanée.
Patricia Neal a décrit, dans Films and Filming, les méthodes de travail du maître. Kazan fait peu répéter, mais tire beaucoup de prises (...) puis il choisit dans ces prises de spontanéité toute fraîche, mais qui va s'émoussant, les mments les plus vrais, les plus criants, de simples éclairs aprfois. D'où un montage souvent court dans les moments intenses mais soutenue, de "sur le vif" survolté, de naturel atteint de fièvre.
Et puis il y a, entre ces pandémoniums de frénésie hurlante, les trous d'ombre de l'accalmie, les moments où un ange passe (...) ici, c'est Patricia Neal (...) Ces mouvements violents et contradictoires de la cyclothymie, Kazan ne les fait pas seulement succéder à l'intérieur de ses films , mais dans l'oeuvre même, d'un film à l'autre (...) Mais ce va-et-vient incessant du trépidant au relaxé, du hot au cold , est moins peut-être une névrose que le silgne inhabituel d'une impérieuse vitalité. Il reflète la vie de l'Amérique toute entière. Il retrouve la vieille alternance des arts charnels, instinctifs et sanguins, tel le jazz... "
Roger Tailleur