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Aya et Louis se sont aimés, ont eu une fille ensemble et se sont séparés. Chacun a refait sa vie de son coté...Mais il y a des histoires qui ne s’oublient...
Du haut de ses 7 ans, Lina s’interroge : ses parents, très aimés et bien séparés, se retrouvent-ils en douce ? Elle en a bientôt la preuve. C’est dingue ! Et sa mère qui lui confie qu’elle veut un autre enfant comme si elle, Lina, ne suffisait pas. Et avec qui cet enfant, on se demande ? Oui, c’est dingue !
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Cette classification "Pourquoi pas" s'est rarement aussi bien appliquée à un film qui semble être mu par ce principe d'incertitude. Jacques
Cette classification "Pourquoi pas" s'est rarement aussi bien appliquée à un film qui semble être mu par ce principe d'incertitude. Jacques Doillon explique qu'il est parti de bribes d'un scénario inutilisé – pourquoi pas en faire un film ? Au sommet obtus de ce triangle amoureux, il y a Aya (Lou Doillon), qui vit avec Victor (Malik Zidi) et Lina (Olga Milshtein) la petite fille qu'elle a eu jadis avec Louis (Samuel Benchetrit). Aya se dit " faire un autre enfant, pourquoi pas ? ". De Victor, le dentiste rationnel ? De Louis, qui joue pour l'éternité les prolongations de son adolescence ? Pourquoi pas ?.
Cent trente six minutes plus tard, Aya parvient à la conclusion de cette oscillation. Dès les premiers plans, qui montrent ses retrouvailles avec Louis, on est pris dans une hésitation proche de l'aboulie. Le jeune homme se dandine d'un pied sur l'autre et la caméra portée mime son mouvement. Pour les spectacteurs sujets au mal de mer, l'effet est pénible. Tout comme sont pénibles les bévues, inattendues d'un cinéaste aussi sensible. Victor est dentiste, pour signifier la banalité de son être, c'est un lieu commun, il suffit d'avoir vu Un plan parfait, comédie sentimentale ratée dans laquelle Diane Kruger tentait d'échapper à sa condition odontologique pour s'en convaincre. On peut s'agacer, légitimement, de l'inconsistance des dialogues. Doillon, qui les a écrits, aspirait sans doute à la légèreté, mais les duos entre Aya et Louis font l'effet d'un concours d'inconséquence, de mesquinerie déguisée en libertinage.
La petite Olga Milshtein, merveilleuse
Respectant l'ordonnancement réquisitoire-plaidoirie, on a fait passer le "pas" avant le "pourquoi". Il y a des raisons d'aller voir Un enfant de toi. La principale s'appelle Olga Milshtein, la petite fille qui tient le rôle de Lina. Pour la filmer, Doillon retrouve l'attention fiévreuse qu'il accordait à Ponette ou à Mado, dans La Drôlesse. Contrairement à celles qui l'ont précédée, Lina n'a pas de tragédie à affronter, à moins que l'inconsistance (et l'on suppose que le mot que l'auteur visait était "inconstance") des adultes qui l'entoure en soit une. Elle fait face avec un mélange de joie de vivre et de malice qu'elle étale avec la complaisance enjouée qu'on met à exposer sa collection de poupées. En sa compagnie, Lou Doillon trouve enfin la mesure de son personnage de mère délibérément indigne et tout à fait aimante (les deux partenaires masculins s'en tirent moins bien, particulièrement Samuel Benchetrit, dont on veut croire qu'il fait exprès d'être aussi fat).
La ressemblance de l'actrice avec sa mère, Jane Birkin, qui jadis illumina de ses larmes quelques films de Doillon est une autre raison d'aller voir Un enfant de toi, pas forcément bonne, mais séduisante pour les plus vieux des spectateurs. Cette ressemblance n'est pas constante, elle surgit par éclairs au gré des angles de la caméra, de la lumière et des expressions de l'actrice, suscitant des échos de séquences qu'on croyait oubliées. Ces moments rappellent qui est Jacques Doillon et font espérer que ce long moment d'incertitude n'est qu'un passage vers un regain d'intensité.
Doillon ne cesse de visiter les atermoiements du couple et les états d’âme de l’enfance. Amoureux du dialogue, de la prise longue, de l’épu
Doillon ne cesse de visiter les atermoiements du couple et les états d’âme de l’enfance. Amoureux du dialogue, de la prise longue, de l’épuisement de l’acteur, il compose une valse langoureuse dans Un enfant de toi, où les mensonges des adultes sont décousus par l’innocence factice de l’enfant. On retrouve le meilleur de son cinéma dans ce film, dont la longueur et la verbosité annulent pourtant des qualités certaines.
Aya (Lou Doillon) vit avec Victor (Malik Zidi) et Lina (Olga Milshtein), une fille de sept ans qu’elle a eu avec Louis (Samuel Benchetrit). Aya veut faire un autre enfant, mais ne sait pas avec qui : Victor, le dentiste raisonnable, ou Louis, l’éternel adolescent ? Aya joue un marivaudage lascif pour définir les contours de sa famille et de son couple, au-delà des concepts sociétaux et d’après son cœur. À l’heure où l’on commence à dire timidement qu’une famille ce n’est pas toujours « un papa, une maman, un/plusieurs enfants(s) » et que ce modèle-là peut être autant dysfonctionnel que d’autres, Doillon explore la famille recomposée, ou plutôt décomposée. Dans le rôle de Lina, la jeune Olga Milshtein cannibalise le film de son énergie et de son naturel. Ses dialogues sont peut-être les mieux écrits, dans leur simplicité consternante, prête à faire exploser un trio qui n’en finit plus de se chercher. Doillon sait écrire pour les enfants et les diriger : cette qualité s’impose encore une fois à l’écran. Si l’assertion paraît évidente, elle mérite d’être rappelée, car les cinéastes sont peu nombreux capables de réussir ce tour de force avec autant de finesse. Chez Doillon, la liste des films qui sondent cette période de la vie où tout est encore possible mais semble inaccessible est bien longue. Le réalisateur du Petit Criminel, de Ponette et de Petits frères sait regarder et comprendre tous les âges de l’enfance et de l’adolescence avec sensibilité et respect, sans complaisance. Mais cette acuité rare ne parvient pas toujours à prendre une forme cinématographique qui dépasse la simple admiration de ces êtres dont l’immaturité est montrée chez Doillon comme un vernis friable. Simple construction sociale définie par des parents souvent perdus dans leur propre quête de repères, l’innocence supposée de l’enfant est démentie par tout le cinéma de Doillon. Lina en est sûrement le plus bel exemple, tant elle participe à la valse hésitante d’adultes aux réactions enfantines.
Tout en montrant la perspicacité d’une enfant dont l’intelligence vive est celle de son âge, le cinéaste donne à entendre un dialogue flottant plus qu’il ne construit des situations. Le verbe paralyse le mouvement de personnages dont les considérations deviennent désuètes. Dans Un enfant de toi, le regard de Lina n’est pas le seul prisme de lecture des atermoiements adultes. Les « grands » sont parfois filmés entre eux et c’est peut-être le tort d’un film qui n’assume pas son idée de dispositif. On ne peut s’empêcher de penser à la petite Maisie d’Henry James dans Ce que savait Maisie, un roman où tout est écrit selon le point de vue d’une enfant de divorcés, bien en peine pour donner un sens à la complexité des rapports adultes. Le regard unique de Maisie permettait de signifier toute la violence, l’ironie, la stupidité des adultes dans ce roman de 1897. Sans cette radicalité, l’inconstance des adultes finit par lasser chez Doillon. La mère, le père et l’amant font étalage d’une inconséquence d’abord jouissive (oui, les parents peuvent être indignes, et alors ?), mais versent très vite une superficialité pesante. Le délitement du point de vue conduit à la dissolution de la forme. La caméra, omnisciente par sa multiplicité et boulimique par sa capacité d’enregistrement numérique, dessert le prétendu naturel du jeu de l’acteur, perdu dans la vacuité d’un verbiage répétitif. La prise de vue à deux caméras, devenue habituelle chez Doillon, permet un gain de temps au tournage, mais elle emprisonne aussi le corps de l’acteur dans la longueur d’une situation inerte. Le cinéaste refuse l’ellipse et la syncope d’une écriture et d’un montage trop contractés, se repaît de plans-séquences pour laisser le temps au temps sur le plateau. Mais il ne s’interdit pas de combiner ces longs plans pour redécouper le film au montage, lui offrant une béquille rythmique pour masquer la longueur de scènes.
La théâtralité est de mise dans ce film où les personnages sont enfermés dans leurs intérieurs à la décoration stérile ou paralysés à la terrasse d’un café dont l’environnement a cessé pour eux d’exister. Mais la théâtralité de l’écriture n’a pas le brio d’un échange claudélien et s’entend uniquement sur le plan de la joute dialoguée. Les bonnes intentions de Doillon (donner une place centrale à la voix et au texte, favoriser le naturel sans plonger dans le naturalisme) se noient dans l’inconsistance du propos d’un film replié sur lui-même. Évidemment, le cinéaste brouille les cartes : il mêle sciemment quête de naturel et artificialité volontaire dans la direction de ses acteurs. Le titre du film est chargé d’ironie, reprenant celui d’une chanson niaise des années 1980. Mais voilà un jeu bien périlleux que de vouloir multiplier à outrance les actes d’une comédie de remariage et instiller l’effet fragile de degrés de lecture multiples. Film sur l’incertitude, Un enfant de toi nous laisse lui-même dans l’incertitude quant au regard à poser sur un objet oscillant entre habileté et platitude. Il faut aimer très fort le cinéma de Jacques Doillon pour aimer vraiment ce film-là.
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