Peter Greenaway : "Eisenstein, mon premier héros de cinéma"
Le réalisateur érudit et inclassable s'explique dans cet entretien à l'occasion de la sortie de son film Que viva1
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En 1931, rejeté par Hollywood, le réalisateur du "Cuirassé Potemkine" se rend au Mexique où, initié par son guide, il vit une nouvelle révolution : homosexuelle
En 1931, le réalisateur du "Cuirassé Potemkine" est fraîchement éconduit par Hollywood et sommé de rentrer en URSS. Il se rend alors à Guanajuato, au Mexique, pour y tourner "Que Viva Mexico !" Mais, plus que son nouveau film, c'est la passion et un nouveau territoire (homo)sexuel qu'il explore, initié par son guide sans tabous. Dix jours passionnés qui sonnent comme une nouvelle révolution.
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" ... Peter Greenaway, fasciné depuis toujours par le maitre russe, qu’il considère comme "le plus grand cinéaste que le monde ait jamais c
" ... Peter Greenaway, fasciné depuis toujours par le maitre russe, qu’il considère comme "le plus grand cinéaste que le monde ait jamais connu", s’est intéressé au tournage de ce film inachevé par Eisenstein ; en concluant que, dans l’œuvre du cinéaste russe, il y avait clairement un « avant » et un « après » Mexico.
Que s’était-il donc passé pendant ces dix jours qui bouleversèrent en octobre 1931 la vie de Sergueï Eisenstein ? (...) Il est par ailleurs manifeste que Peter Greenaway, dans son hommage à Eisenstein le visionnaire, n’a pas souhaité traiter de la naissance d’un film (on y parle très peu de cinéma !), mais bien de l’épanouissement sexuel du cinéaste. Le réalisateur britannique retrouve ainsi avec Que Viva Eisenstein ! les deux principales sources d’inspiration de ses précédentes œuvres : la mort et le sexe. Cinéaste esthète, Greenaway célèbre également le génial Soviétique en faisant preuve comme lui d’une passion folle pour l’image et le montage.
Son inventivité en matière visuelle est ici extraordinaire : magnifiques travellings latéraux, amples mouvements tournoyants de la caméra, gros plans saisissants, incrustations d’images d’archives d’Eisenstein et de ses films, split screen (écran divisé), utilisation du numérique au service notamment d’un montage rapide…
On retrouve aussi, dans ces décors flamboyants et baroques, une très forte théâtralité. Le cinéaste britannique a de fait choisi pour tenir les rôles principaux deux acteurs venus du théâtre : Elmer Bäck, acteur finlandais à la puissante stature, qui avec son visage poupon et une coiffure hirsute donne une dimension grandiose à Sergueï Eisenstein, et Luis Alberti, acteur mexicain tout aussi impressionnant dans le rôle de Palomino Cañedo. Sans oublier la large place laissée à la musique de Sergueï Prokoviev, collaborateur d’Eisenstein pour Alexandre Nevski et Ivan le Terrible.
Cette audace, cette démesure, cette folie dont fait preuve Peter Greenaway dans Que Viva Eisenstein ! en font une œuvre profondément humaine, émouvante et… superbe ! "
" En ce début des années 1930, à Guanajuato, où il tourne son film inachevé (Que viva Mexico !), Eisenstein vit dans un temps suspendu. Il
" En ce début des années 1930, à Guanajuato, où il tourne son film inachevé (Que viva Mexico !), Eisenstein vit dans un temps suspendu. Il est comme en apesanteur. Hollywood, qui l'a triomphalement accueilli, l'a vite rejeté. A Moscou, Staline le considère déjà comme un ennemi du peuple, à éliminer au plus vite. Cette petite ville devient, donc, un havre de paix provisoire : un purgatoire après le paradis perdu et l'enfer prévu. Ces jours heureux qu'il sait comptés, Eisenstein les étire, les étale, les exalte. Il ne parle plus : il se saoule de mots. Il ne filme plus : il accumule des kilomètres de rushes (...). Lorsqu'il se découvre gay, c'est un plus. L'apothéose : il jouit sans mesure de son amant, comme une provocation supplémentaire aux conventions de l'Ouest, à la morale de l'Est.
C'est cette outrance que saisit Peter Greenaway, dans le style abracadabrant qui est le sien : rythme frénétique, écrans divisés, logorrhée sonore et visuelle. Avec, par moments, des mouvements de caméra magnifiques : ce panoramique qui glisse de droite à gauche pour saisir, dans le hall soudain démultiplié de l'hôtel, les invectives permanentes d'un Eisenstein hystérique, face à ses producteurs, américains, communistes et incompétents (...).
Evolution. Révolution. Révélation : même s'il ne résiste pas, ironie british oblige, à montrer Eisenstein comme un moujik mal dégrossi et son amant comme la caricature d'un danseur de tango, Greenaway, pour la première fois, filme le bonheur qui s'évanouit au moment où il surgit... Car la mort rôde à Guanajuato. Dans les rues. Et dans cet hôtel étrange où un ouvrier invisible semble réparer, sans cesse, une plomberie déficiente. On entend des coups réguliers et sourds : des années plus tard, à Moscou, victime d'une crise cardiaque, Eisenstein frappera longtemps sur les radiateurs de sa chambre pour demander du secours à ses voisins. En vain. "
" ... Le film de Peter Greenaway se compose d’éléments documentaires, d’images d’archives, de photographies, d’extraits de films, associés
" ... Le film de Peter Greenaway se compose d’éléments documentaires, d’images d’archives, de photographies, d’extraits de films, associés avec une virtuosité folle à des scènes avec acteurs. Les visages des différents interprètes se trouvent confrontés sur l’écran à ceux des protagonistes historiques, qu’Eisenstein fut amené à rencontrer, pour former un kaléidoscope au pouvoir de séduction assez extraordinaire.
Autant qu’il l’a reconstituée, Greenaway a rêvé cette histoire mexicaine, érigeant en probabilité ce qui était suggéré dans la correspondance d’Eisenstein et à travers quelques rares témoignages. Le film établit qu’à Guanajuato l’auteur de "La Grève", grâce à Palomino Cañedo, son guide, a découvert la sexualité à 33 ans. Il s’est familiarisé avec la mort, présente à chaque instant au Mexique, notamment à ce moment de l’année. Et toutes ses certitudes, déjà bien ébranlées, se sont effondrées.
Portrait d’un génie désemparé, écartelé entre ses différents commanditaires (Staline, les riches intellectuels américains, Mrs. Upton Sinclair en première ligne), confronté à la brutalité de la passion amoureuse et de l’amour physique, "Que viva Eisenstein !" est un des plus beaux films jamais consacrés au cinéma.
Son principe exigeait que les acteurs choisis ressemblent en effet à leurs modèles : Greenaway, qui voulait que l’interprète principal ait l’âge du rôle, est allé chercher en Finlande le sidérant Elmer Bäck, dont le visage, l’allure, les façons d’être, la diction sont désormais, et pour toujours, ceux de S.M. Eisenstein.
Un personnage d’exception saisi dans des décors sublimes, des images montées avec un art hallucinant, un mystère de l’histoire du cinéma mis au jour, on ne voit guère ce qui pourrait manquer à "Que viva Eisenstein !" pour qu’il apparaisse dès à présent comme une manière de classique. "
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