Andreï Zviaguintsev : " Qu'ils essaient d'interdire le film pour voir..."
VIDEO | 2016, 6' | Kleist, Hobbes et un fait divers. Andreï Zvyaguintsev revient sur ce qui a fondé l'écriture de1
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Lorsque Vladimir, le mari d'Elena, décide de léguer sa fortune à sa fille issue d'un précédent mariage, celle-ci voit s'effondrer l'espoir d'aider son fils...
Vladimir est un homme riche et froid, Elena une femme modeste et docile. Ils se sont rencontrés tard dans la vie et chacun a un enfant d'un précédent mariage. Le fils d'Elena, au chômage, ne parvient pas à subvenir aux besoins de sa propre famille et demande sans cesse de l'argent à sa mère. La fille de Vladimir est une jeune femme négligente, un peu bohème, qui maintient son père à distance. Suite à un malaise cardiaque, Vladimir est hospitalisé. A la clinique, il se rend compte qu'il pourrait mourir prochainement. Un moment bref mais tendre partagé avec sa fille le conduit à une décision importante : c'est elle qui héritera de toute sa fortune. De retour à la maison, Vladimir l'annonce à Elena. Celle-ci voit soudain s'effondrer tout espoir d'aider financièrement son fils. La femme au foyer timide et soumise élabore alors un plan pour offrir à son fils et à ses petits-enfants une vraie chance dans la vie.
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" On se croirait d'abord dans un roman français du XIXe siècle : Balzac quand il parle d'argent. Ou Octave Mirbe
" On se croirait d'abord dans un roman français du XIXe siècle : Balzac quand il parle d'argent. Ou Octave Mirbeau, lorsqu'il aborde les rapports de classe. Mais non : nous sommes dans cette Russie moderne dont romanciers et cinéastes ne cessent de déplorer l'inanité. La perte d'âme. Et sans son âme, comme chacun sait, la Russie ne vaut plus rien (...) Ce couple étrange, à l'affection comme muselée, dont le rituel de vie ressemble à une chorégraphie désincarnée, se croise dans un appartement luxueux, vaste et froid, dont le cinéaste observe les coins et les recoins en une suite de longs plans-séquences virtuoses... C'est le plan fixe, en revanche, qu'il utilise pour filmer l'appartement étriqué, asphyxiant du fils d'Elena (...)
C'est entre ces deux hommes que la vie d'Elena balance, c'est entre ces deux mondes qu'elle oscille. Son riche mari ne quitte jamais le sien, sauf pour se rendre dans sa salle de gym, au volant d'une voiture qui l'isole comme dans une bulle. Elle, c'est tout le contraire : Andreï Zviaguintsev la montre, à pied, en bus, en train, effectuant des kilomètres pour essayer de faire coïncider ces deux univers irréconciliables. Ironiquement, il l'accompagne, dans ses efforts inutiles, d'une musique grondante, obsessionnelle, qui vrille les esprits et les nerfs... Bref, ça tombe sous le sens : quelque chose va finir par craquer. En Elena. Et en Russie (...)
C'est que, dans la Russie actuelle, Dieu, la patrie, l'ordre et la morale sont devenus des mots vides de sens. La famille, pas encore. Comme le Parti, jadis, le clan exige qu'on respecte ses oukases. Elena s'y plie sans trop réfléchir, sans même songer à discuter... L'habileté du cinéaste, c'est de ne jamais filmer ses sentiments, mais ses comportements. Devant la porte de celui qu'elle vient d'assassiner, Elena hésite, va, revient, s'arrête, repart : ce sont ses actes manqués qui révèlent la profondeur de son désordre mental et non les quelques larmes qu'elle verse par devoir. Le plan-séquence, magnifique, qui observe son errance, dure plus de dix minutes..
Avec son doux visage qui évoque - ironie féroce ! - les grandes héroïnes « positives» de jadis (La Mère de Gorki, par exemple), Elena garde, tout de même, une petite chance de rester un être humain. Car subsiste, au fond d'elle, sans même qu'elle s'en doute, ce bon vieil humanisme que le cinéaste (lucide ? réac ?) refuse obstinément à ses héros plus jeunes - la fille de la victime, le petit-fils d'Elena - qu'il juge déjà « out ». Détruits par leur indifférence et leur désenchantement..."
" Zviaguintsev demeure certes un esthète qui calibre ses cadrages, ses déplacements de caméra et ses lumiè
" Zviaguintsev demeure certes un esthète qui calibre ses cadrages, ses déplacements de caméra et ses lumières avec la plus grande minutie, mais ce coup-là, sa virtuosité est mise au service d’un film noir, prenant de bout en bout (...°
L’écart de niveau social entre les deux familles est le grain de sable qui va modifier les rapports au sein du couple, comme une nouvelle version de la lutte des classes ramenée à l’échelle domestique. Il y a du Dostoïevski dans Elena, par le nœud tissé entre condition sociale, crime et perturbation des frontières morales.
Le film brosse aussi un tableau social, architectural et topographique de la nouvelle Russie, vision sombre et inquiétante qui a aussi valeur universelle, avec l’argent comme puissance létale pour ceux qui n’en ont pas assez, morbide pour ceux qui en ont trop."
"... on a le sentiment de se retrouver devant ce genre de film mutique mais éloquent, où se décante la proph&eacu
"... on a le sentiment de se retrouver devant ce genre de film mutique mais éloquent, où se décante la prophétie feutrée d’un dérèglement social profond pouvant tout simplement, et presque innocemment, conduire au crime.
C’est donc une sorte de thriller où la lutte des corps serait transposée dans la lutte des classes. Un thriller social ouaté, sans agitation ni brutalité. Une étude de mœurs et de sentiments qui débouche sur une implacable leçon de marxisme en actes. Le film ne l’est pas, marxiste, dans le sens où il prendrait parti pour les pauvres contre les riches. Mais il est d’origine russe et porte en lui cette infusion politique unique, où s’entremêlent un rapport maladif à l’Etat, une gangue orthodoxe empotée, une méfiance terrible du collectif (surtout depuis qu’il est décollectivisé) et, enfin, une violence symbolique ancestrale (...) sous la glace de l’écran impassible que nous tend Andreï Zviaguintsev, sous sa mise en scène patiente et soyeuse, sous la composition parfaite de couleurs crémeuses et de lumières tamisées, le spectateur est très tôt alerté, par les sens, par une forme d’intuition, qu’un feu magmatique couve sourdement sous nos yeux.
«Je pense, comme Dostoïevski, qu’il y a le crime, puis le châtiment», nous déclarait le metteur en scène au dernier Festival de Cannes. Cela n’arrangera peut-être pas les affaires, ou les certitudes, du spectateur déboussolé, mais cela dit assez bien la crête presque impossible où se situe, avec une hauteur splendide, cet étrange Elena, qui semble porter en lui toutes les tempêtes sans aucun tapage."
brilise au sujet de
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