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Ibiza, début des années 90, Jo, DJ venu de Berlin, veut rejoindre la révolution électronique. Il se lie d'amitié avec Martha, sa voisine, de 50 ans son aînée.
Ibiza. Début des années 90, Jo a vingt ans, il vient de Berlin, il est musicien et veut faire partie de la révolution électronique qui commence. Pour démarrer, l’idéal serait d'être engagé comme DJ dans le club L'Amnesia. Martha vit seule, face à la mer, depuis quarante ans. Une nuit, Jo frappe à sa porte. La solitude de Martha l'intrigue. Ils deviennent amis alors que les mystères s'accumulent autour d'elle : ce violoncelle dont elle ne joue plus, cette langue allemande qu'elle refuse de parler… Alors que Jo l'entraîne dans le nouveau monde de la musique techno, Martha remet en question ses certitudes…
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"Que reste-t-il d’un pays dont on veut tout oublier ? Une pointe d’accent, quelques souvenirs qui ne parviennent pas &agra
"Que reste-t-il d’un pays dont on veut tout oublier ? Une pointe d’accent, quelques souvenirs qui ne parviennent pas à se décoller de la mémoire malgré tous les efforts, de la musique ou de la poésie. Des choses du passé, donc, des fragments d’un pays devenu fantomatique, voire fantasmatique. Mais du pays actuel, entité instable et mouvante, rien. Martha, héroïne d’Amnesia, de Barbet Schroeder, a environ 70 ans. Elle vit à Ibiza, dans un cadre paradisiaque : une maison blanche qui donne sur la mer. Elle n’a pas d’électricité, s’éclaire à la lampe à pétrole, vit seule.
Cette très belle femme - dont le quotidien ne semble n’être justement rythmé que par le quotidien - a un secret, qui se devine en quelques secondes. Elle est allemande, mais refuse de l’être. Et ce depuis 1945, date à laquelle elle a définitivement refusé d’avoir quelque chose à voir avec le pays, la culture, la terre ou la langue des bourreaux. Alors, dans cet exil magnifique, Martha vit dans une précarité suspendue, économique mais aussi mentale, arqueboutée sur ce dégoût ancien, cette impossibilité de parler allemand, ne serait-ce que pour dire des banalités. Elle refuse également de rentrer dans une Volkswagen (la voiture de Hitler) ou de boire du vin venu de Berlin.
On est en 1990, et un jeune homme, Jo, vient s’installer dans la maison attenante. Ibiza est alors encore cette terre déserte, simplement peuplée de roche brute et d’arbres secs. Un vent nouveau arrive : la techno. Jo rêve de devenir DJ. Il fait découvrir à sa voisine les sonorités électroniques. Le temple de sa génération est l’Amnesia, «el mejor club de la historia». Martha, elle, méprise l’amnésie dans laquelle l’Allemagne s’est plongée.
Le lieu, l’île des Baléares, l’appréhension de l’histoire, la musique comme vecteur narratif… Tout dans Amnesia évoque More, premier film de Barbet Schroeder (1), œuvre charnière de l’esthétique hippie où, dans les vapes de la drogue, planait déjà l’ombre du nazisme à peine achevé. Mais le fil entre More et Amnesia n’est pas une simple question de décor, de cette terre où «le blanc resplendissant des murs, même dans l’ombre, saute aux yeux», évoquée par Walter Benjamin dans ses Carnetsen 1932, ni même de la possibilité de voir en Martha/Marthe Keller un personnage de More qui aurait survécu et se serait installé là. Ce qui se dessine est d’une toute autre ampleur. C’est l’obsession de Barbet Schroeder, 73 ans, à comprendre son siècle et qui construit toute sa filmographie, qu’il s’agisse des malades mentaux devenus dictateurs africains (Général Idi Amin Dada : Autoportrait) aux personnages si troubles qu’ils en deviennent romanesques (l’Avocat de la terreur, sur Jacques Vergès), en passant par l’assassinat de Kennedy dans un épisode qu’il réalisa pour Mad Men. A relire, sonder et analyser tout ce qui a fait ce temps passé, la posture de Schroeder est-elle actuelle, moderne ? A peine, mais elle est fondamentalement contemporaine, selon la définition de Giorgio Agamben : «Celui qui appartient véritablement à son temps, le vrai contemporain, est celui qui ne coïncide pas parfaitement avec lui ni n’adhère à ses prétentions, et se définit, en ce sens, comme inactuel.»
En installant son récit en 1990, transpercé par la mémoire de la Shoah, et donc apparemment décalé de nos préoccupations quotidiennes, le cinéaste cherche à comprendre les racines des comportements et sentiments. Dans les notes du film, il écrit avoir eu pour ambition de «tenter de faire d’un refus d’une langue le principal ressort dramatique d’un film» ; et de «faire le récit d’une histoire d’amour se développant hors sexualité, mais grâce à une succession de non-dits.» Cinéaste ayant montré qu’il dispose d’une gigantesque boîte à outils formels, il parvient ici à montrer l’impossibilité de la relation amoureuse entre Martha et Jo. Et dans le décor ensoleillé, il esquive tout mélo pour atteindre une forme d’épure. Les premiers mots de la vieille dame en allemand sont ceux d’une comptine qu’elle se met à chanter alors qu’elle joue aux ombres chinoises avec Jo, comme le décor improvisé d’un film expressionniste - le cinéma étant chez Schroeder le révélateur absolu des temps et des êtres."
"Amnesia est une plongée introspective dans l’histoire, bien au-delà (ou en deçà) des ann&eacut
"Amnesia est une plongée introspective dans l’histoire, bien au-delà (ou en deçà) des années flower power. Martha (superbe Marthe Keller) vit à Ibiza dans une jolie maison sans électricité. Martha est peut-être une figure maternelle pour Barbet Schroeder, ou la Mimsy Farmer de More qui aurait vieilli dans ce petit paradis des Baléares.
Dans la maison voisine débarque Jo, un jeune Allemand qui vient gagner quelques sous comme DJ. D’entraides entre voisins en discussions, Martha et Jo se lient d’amitié. Mais Martha a ses mystères, ses secrets. Pourquoi vit-elle ici seule ? Pourquoi cache-t-elle à Jo qu’elle est elle aussi allemande ?
Barbet Schroeder met en place une mécanique théâtrale à la fois concrète et symbolique, intimiste et politico-historique, une pièce à feu doux qui explose quand arrivent les parents de Jo, et notamment son père. La relation d’amitié, de fascination, voire d’amour entre Martha et Jo devient une bataille de mémoire sur l’histoire de l’Allemagne, ce passé qui décidément a du mal à passer et qui continue de hanter l’Europe. L’Amnesia n’est pas seulement la boîte techno où mixe Jo, c’est selon Schroeder un état général de nos sociétés qui contribue à l’ignorance hédoniste d’un pan des jeunes générations.
L’allégorie est parfois un peu raide et schématique, d’autant que la période nazie est l’objet de multiples articles, livres, films ou émissions de télé, et la performance très extravertie de Bruno Ganz n’aide en rien à alléger l’affaire. Mais face à lui, Marthe Keller et le jeune Max Riemelt sont remarquables de bout en bout. Et ce qui est beau dans ce film, c’est de parvenir à faire entrer un sujet aussi vaste et lourd que l’histoire de l’Allemagne au XXe siècle dans la simplicité dépouillée d’un petit théâtre de verdure, sans grands effets de manche et de mise en scène.
Cinéaste plutôt intimiste et cinéphile, pas vraiment politisé au sens militant du terme, Barbet Schroeder ne s’est pas moins régulièrement intéressé à la politique et à l’histoire (Idi Amin Dada, une autobiographie, L’Avocat de la terreur). On a le sentiment que cet Amnesia s’inscrit dans la lignée de son docu sur Vergès, comme une tentative de repenser son temps, de regarder en arrière, de faire une sorte de bilan politique, existentiel et romanesque des années dans lesquelles il a vécu, de dénouer le nœud de ses origines germaniques. Un bilan qui serait dressé non pas en juge, en sociologue, ou en idéologue, mais en cinéaste désireux de transmettre aux générations d’après.
A ce souci de legs s’ajoute le désir plus secret de filmer Marthe Keller, actrice qui subjugua beaucoup de monde (dont le très jeune ado que j’étais) quand elle apparut dans le feuilleton La Demoiselle d’Avignon à l’orée des années 70. On ignore si c’est à cette occasion que Schroeder découvrit sa quasi-compatriote, mais son plaisir de la filmer et de la magnifier est patent d’un bout à l’autre de ce film."
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