"« A l'époque où j'ai découvert le cinéma, explique aujourd'hui Barbet Schroeder, tous les réalisateurs avaient un certain âge. J'en ai conclu que c'était un art de la maturité ! Et j'ai décidé de passer par la production. » A travers Les Films du Losange, il commence donc par produire Rohmer, Rivette, travaille avec Godard. Puis signe enfin (à 28 ans !) son premier film, More, l'histoire d'un jeune Allemand qui meurt junkie à Ibiza.
Présenté à Cannes en 1969 — « mais, hélas, pas en compétition, le producteur avait "oublié" la sélection officielle, alors que nous ne serions sans doute pas repartis les mains vides » —, le film fait scandale, tarde à sortir, devient culte : parce qu'il fait le portrait d'une génération (junkies contre hippies) et parce qu'il y a la musique des Pink Floyd.
Mais, paradoxalement, la drogue en est moins le thème central que l'amour (auto)destructeur. « Je voulais raconter l'histoire d'une femme fatale en tee-shirt. J'avais remarqué Mimsy Farmer dans des séries B américaines, où il y avait, parfois, deux ou trois plans d'elle fulgurants. C'est un film où la plastique compte beaucoup : mes références n'allaient pas vers Warhol-Morrissey, qui avant moi avaient montré l'univers de la drogue. Plus vers Murnau, ou Nicholas Ray qui, à l'époque, habitait chez moi. » Témoignage sociohistorique, More peut se voir aussi comme une sorte d'étrange documentaire sur l'amour fou et ses ravages..."
Aurélien Ferenczi