Arnie Cunningham, un adolescent timide, mal dans sa peau et complexé, est le souffre-douleur de ses camarades de classe, qui le considèrent comme un loser et un raté. Un jour, il tombe sous le charme d'une Plymouth Fury en très mauvais état, baptisée Christine. Contre l'avis de son ami Dennis Guilder, Arnie acquiert la voiture et la remet en état dans un garage. Très vite, le bolide devient possessif.
"Dans une perspective carpentérienne, la voiture/la femme, c’est à la fois tout ce qui anime la société américaine, immense chaîne de montage au service de la croissance capitaliste, et l’objet d’un désir si intense qu’il déborde, donc menace son cadre consumériste et conventionnel. On le comprend à travers le personnage de girlfriend extrêmement subtil, voire télépathe (Alexandra Paul). Chez Carpenter, aussi féministe que Stephen King, la femme est la possibilité d’une multiplicité : belle et sexy et intelligente et empathique et courageuse et loyale et droite. En tant que multiplicité, donc puissance continuelle de métamorphoses, elle terrifie l’homme qui, au mieux, accompagne son devenir multiple, au pire l’entrave. Christine, figuration capitaliste du mal entré dans tous les foyers américains, emprunte l’apparence du cliché phallocrate (la femme identifiée à la bagnole, et réciproquement), avant de scinder l’identification en deux entités, dont l’une (la puissance du féminin) incarne la résistance au triomphe mortifère de la croissance capitalistique."
Hélène Frappat
Le Bleu du Miroir
"Comme le souligne Eric Dufour dans Le cinéma d’horreur et ses figures, l’un des grands thèmes du cinéma de John Carpenter, c’est la représe...
"Comme le souligne Eric Dufour dans Le cinéma d’horreur et ses figures, l’un des grands thèmes du cinéma de John Carpenter, c’est la représentation de l’altérité. On a bien évidemment en tête le masque blanc de Michael Myers, le brouillard de Fog, la créature dans The Thing, le liquide verdâtre de Prince des Ténèbres, ou bien encore cette très chère Christine. L’altérité est une figure incontournable de l’horreur, car elle se caractérise par sa glaçante absence d’humanité. Insaisissable, elle ne s’exprime que dans un décalage entre ce qui apparaît et ce qui est. Dans Christine, la voiture est bien vivante. « C’est l’animé qui revêt le masque de l’inanimé ».
Il n’est donc pas étonnant que le scénariste Bill Philips, en collaboration avec Carpenter, ait axé son adaptation du roman de Stephen King (sorti la même année que le film) sur la figure de la voiture. Christine est le catalyseur de l’horreur, aussi bien dans la dissimulation de sa vraie nature (dont on ne saura rien), que dans la révélation de la part d’ombre du jeune Arnie. Pure incarnation du mal, cette Plymouth Fury de 1958 n’est pas le reflet de son propriétaire : elle est l’altérité lui révélant sa propre violence, notamment dans son rapport à la virilité. Le mal est d’autant plus vicieux qu’il sait très bien où appuyer pour nous faire fléchir. Le film nous montre d’ailleurs très bien la frustration d’Arnie avant sa rencontre avec Christine : au lycée, le jeune homme est souvent relégué au second plan, parfois dans le flou, baissant les yeux après une blague pas drôle. Le plus triste, dans tout cela, c’est qu’Arnie a conscience de ce qu’il est aux yeux des autres : une inadéquation fondamentale à l’égard des normes (physiques, sexuelles, genrées) en vigueur. Or, nous allons comprendre que le jeune homme cache en lui une violence qui ne demande qu’à s’exprimer."
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