" Ce zombie-là, justement, ne mord pas les vivants pour les manger tout cru ou les changer en cadavres ambulants. A rebours des conventions, il s'approche des morts victimes des mœurs violentes de Los Angeles (clochards clamecés dans leur abri de carton, dealers criblés de balles lors de règlements de comptes) pour pénétrer leurs plates béantes avec un phallus monstrueux, crachant un fluide sanglant qui ramène les macchabées a la vie. Le reste du temps, la créature muette déambule dans les replis désherbés de la cité des Anges, ou s’amassent les SDF.
Film double, L.A. Zombie ne l’est donc pas seulement parce qu'il constitue en fait la version courte d un porno gay plus long de trois-quarts d'heure (...) L'histoire peut en effet se lire de deux façons : celle que nous venons d'exposer, et une autre où le héros serait juste un clodo qui à force de solitude et d'exclusion se serait définitivement perdu dans un monde de fantasmes homo-erotiques et morbides, étant passé au-delà du miroir de la schizophrénie. De fait, on le voit se dédoubler a deux moments où il se regarde lui-même en quelque sorte. Et plus généralement son aspect change d'une scène a l'autre, entre une apparence presque normale et un look de gargouille aux énormes canines proéminentes, comme si son enveloppe corporelle variait en fonction de son environoement ou des fluctuations de son esprrt dérangé. Jusqu'à la fin, LaBruce refusera de trancher entre les deux hypothèses, ce qui est souvent le défaut d'œuvres se lavant les mains de leur histoire en la laissant « à l'interprétation du public ».
La démarche parait cependant idéale dans le cas de LA Zombie, ce dernier tirant sa force de l'écart extrême entre la vitesse du tournage, effectué à l'arrache au milieu des marginaux de la ville et de sidérantes inventions surréalistes.
Déjà, la superbe photo de James Carman transcende l'absence d’effets (et sans doute de matériel sophistiqué) en saisissant des crépuscules empourprés ou des visions sorties de la peinture d’Edward Hopper, comme cette façade de café dont les baies vitrees forment des rectangles tamisés dans la nuit. Mais l'ange du bizarre visite aussi les réalités les plus sordides : voir le carton où a agonisé un clochard, qui devient, à la faveur d'une grossière « erreur » de découpage. un espace immense encombré de symboles mystérieux (un miroir brisé, une licorne en peluche) qui le fait ressembler à un tableau allégorique. Il est d ailleurs a parier que cette ambigüité fonctionne mieux dans la version « soft », le montage X ajoutant une rencontre hard après chaque résurrection. Ici,l'ex-cadavre et son sauveur échangent juste un regard, comme si toute communication à long terme était impossible. Cela culmine dans une des dernières séquences, absolument déchirante en un ultime mélange de réel et d'hallucination, de fausses larmes de sang côtoient de vrais pleurs sur le visage de François Sagat, qui parachève ainsi une performance dont l'intensité physique se passe aisément de tout dialogue. Avec cet incroyable film, il rejoint la lignée de ces créatures fantastiques qui, depuiq le monstre de Frankenstein, errent seules dans un monde où elles n'ont pas leur place."
Gilles Esposito
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C'est beau un monde qui aime !
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