Michael Haneke: " Le sentiment d'impuissance m'a donné l'idée du film..."
Avant sa consécration avec La Pianiste et Amour, le cinéaste autrichien avait déjà créé la polémique au fest1
Navigateur non compatible. Veuillez utiliser un navigateur récent
Dans sa solitude, Benny se tourne vers la vidéo et voit son sens des réalités se déformer peu à peu. Sa rencontre avec une fille va alors tourner à l'horreur.
Elevé au sein d'une famille bourgeoise, Benny communique très peu avec ses parents trop souvent absents. Plongé dans l'univers de la vidéo, il voit son sens des réalités et des valeurs se déformer peu à peu. Sa rencontre avec une jeune fille dont il est amoureux va dériver vers l'horreur... Avec "Le Septième continent" et "71 fragments d'une chronologie du hasard", "Benny's video" forme la trilogie dite de «la glaciation émotionnelle» (ou de «la guerre civile») qui vise à dépeindre l'horreur telle qu'elle existe dans notre société moderne.
Le lecteur n'est pas installé ?
Pour votre information, la lecture en mode hors-ligne n'est pas compatible avec le système d'exploitation Linux
" Voilà bien le film le plus terrifiant que l'on puisse voir en ce moment. A des années lumières, pourta
" Voilà bien le film le plus terrifiant que l'on puisse voir en ce moment. A des années lumières, pourtant, des films d'horreur. Aussi dépouillé d’effets spéciaux, d’effets tout court, même, qu’une narration peut l’être sans ennuyer. Presque muet. Dépouillé. Glacé. Et glaçant (...)
Michael Haneke nous parle de notre monde. Celui de l’image. Car c’est l’image, sans doute, qui tue, ici.
Il y a ici, exposées avec une rigueur minimaliste, sans jamais qu'aucune accusation, aucun message, ne vienne perturber le déroulement linéaire du récit, beaucoup de questions posées : celles des relations d’un enfant aparemment choyé, mais terriblement seul, avec ses parents (...) Beaucoup de problèmes. D’amour, de communication, de compréhension, de responsabilité...
Et puis, il y a le rôle de l’image. Celle par qui le monde se déréalise, celle qui met l’émotion en conserve, celle qui fige les réactions, celle qui souvent trompe, celle qui déshumanise. Benny, et ses parents. Qui ont une façon de prendre en charge le meurtre tout aussi aberrante que ce meurtre lui-même. Comme si, dans ce monde par ailleurs confortable, cossu, même, et tout à fait aseptisé, personne ne savait plus à quoi se raccrocher, comme si le réel n’avait plus sa place, tué par l’image qui tue. Oui, vraiment terrifiant !"
" On reconnaît bien ici le style de Michaël Haneke, rigoureux et clinique. Le film s'avère particulièreme
" On reconnaît bien ici le style de Michaël Haneke, rigoureux et clinique. Le film s'avère particulièrement précis dans sa mise en scène et, au travers de cette réalisation quasi chirurgicale, renvoie le spectateur à ses propres angoisses et questionnements. En une seule scène (...), le réalisateur synthétise la pensée principale de son métrage en filmant l'adolescente via un écran de contrôle. Il utilise ainsi un média supplémentaire pour faire du simple spectateur un voyeur à la fois victime et complice du système mis en place.
L'utilisation de filtres blancs ou bleus, l'absence presque totale de musique renforcent un peu plus le malaise que Michael Haneke délivre tout au long du film. À cela on peut également rajouter le montage fait de nombreuses cassures sonores et visuelles qui agissent comme autant d'électrochocs et sortent – heureusement – le spectateur de la routine qui tend à s'installer.
Alors que la technologie télévisuelle semble nous donner un pouvoir certain sur la réalité (se repasser certaines scènes en boucle, au ralenti,...), elle s'avère au final nous couper du monde vivant et induire en lieu et place de cette interaction tant recherchée une déshumanisation totale. L'écran de télévision se révèle alors non pas comme didactique ou éducatif, mais comme un filtre enlevant au tangible toute substance.
En traitant une nouvelle fois de la vacuité du monde moderne, de la culpabilité et du rapport au réel, Michael Haneke réussit un film glaçant et dérangeant autant pour ce qu'il montre que pour ce qu'il suggère."
" La cruauté et la souffrance peuvent s’exprimer dans l’hystérie. Ou dans la froideur, solution adopté
" La cruauté et la souffrance peuvent s’exprimer dans l’hystérie. Ou dans la froideur, solution adoptée par Michael Haneke, cinéaste autrichien, pour son film Benny’s Video (...) C’est l’histoire d’un adolescent fou d’images. Fou au sens littéral. Dans la jolie maison bien rangée où il vit avec ses parents - Angela Winkler et Ulrich Mühe, -bourgeois à métiers intellectuels modernes, règne la pénombre des lieux inhabités. Les fenêtres de sa chambre sont occultées, l’extérieur lui parvient par l’intermédiaire d’une caméra vidéo. La réalité pour lui, qui est réfugié au centre d’un monde virtuel, est ce qui apparaît sur un écran, qui peut s’effacer, se répéter, se recommencer, se choisir, revenir en arrière, se modifier, se refouler, disparaître dans l’oubli infini contrôlé par l’électronique.
Benny - Arno Frisch - est beau, doux, charmant, bon élève. Le lycée, les gens, le monde qui l’entoure, lui sont les éléments d’un rêve imposé, accepté sans révolte. Et puis un jour il tue (...)La mort ne peut pas s’effacer, même si l’on parvient à enfouir les traces du crime. La mort fait intervenir le réel. Le réel, c’est aussi le silence, et derrière les volets de la chambre enfin ouverts une rue vide, un mur. C’est un ensemble de choses que Benny n’est plus en mesure d’assumer.
Déjà, dans son précédent film, le Septième Continent, également présenté à Cannes par la Quinzaine des réalisateurs, en 1988, Michael Haneke racontait sans pathos le suicide d’un jeune couple aisé, uni, décidant d’entraîner dans la mort sa petite fille. Il n’y avait pas de grands mots, pas d’explication, seulement la tranquille obstination de la famille à déchiqueter minutieusement ses meubles, ses biens, son univers. Longue séquence silencieuse dont on sortait glacé, sans avoir eu le temps de reprendre son souffle. Comme de Benny’s Video.
Cent cinq minutes de calme désespérance. Un engrenage sans recours. Les personnages ont un cœur, ils s’aiment, possèdent la culture, et semblent privés de sentiments, y compris du sentiment de peur. « Auparavant ils se cachaient derrière les mots, aujourd’hui ils se cachent derrière les images» disait Michael Haneke. Quand ils sont trahis par les images, les mots leurs manquent. Ils ne savent rien se dire de vrai. Perdu, cherchant inconsciemment et en vain, un repère - un père - quelque chose de concret en tout cas, la seule solution pour Benny est de s’en remettre aux autorités administratives.
Ces gens sont des mutants : des êtres de chair, intelligents, capables de morale, de plaisir, de désir, mais robotisés, socialement programmés. Michael Haneke ne porte évidemment aucun jugement sur eux. Il filme leur charme, leur grâce, avec une attention presque tendre, quasi admirative, qui accentue notre pitié angoissée envers eux, envers nous.
Benny’s Video est un superbe film, et qui reste en mémoire. Un film terrible en même temps que vivifiant.
«Dans la tragédie grecque, la description d’un destin anéanti doit provoquer un effet de catharsis», dit Michael Haneke. Il cite Robert Bresson, interrogé au sujet de son pessimisme : « Vous confondez le pessimisme et l’évidence. »
Au commencement, une vidéo apparaît sur l’écran de cinéma. Dans une cour dé ferme, un homme s&rsquo
Au commencement, une vidéo apparaît sur l’écran de cinéma. Dans une cour dé ferme, un homme s’efforce de maîtriser un porc tandis qu’un autre braque un pistolet sur le crâne de la bête. Une détonation éclate. Le cochon s’effondre. Tout à coup, l’image se fige. La bande repart en arrière - puis la scène d’abattage recommence, cette fois au ralenti. Dans son fauteuil, le spectateur éprouve un malaise. Il recherche les causes de son inconfort. Rien d’épouvantable en soi dans ce rituel quotidien de la vie paysanne. Le malaise est ailleurs : quelqu’un a filmé cette mise à mort ; il était très proche de la scène et, maintenant, il la visionne avec un soin méticuleux. On s’interroge.
Pour l’auteur de « Benny’s Video », l’ennemi, c’est le « divertissement», c’est à dire la télévision et le cinéma qui singe la télévision. Manier la caméra comme un pistolet d’abattage, filmer à bout portant, sacrifier à l’impératif spectaculaire du crac-zoom-hue sont autant d’attentats contre la morale de la perception. La confusion des valeurs procède de la confusion des images, en Autriche, où prospère l’extrême-droite populiste de Jorg Haider, comme ici. « Difficile pour un adolescent de faire la distinction entre les images virtuelles, les images publicitaires et les images de la guerre en Yougoslavie. » Au cinéma donc de nettoyer les écuries d’Augias. Prenez Benny, un jeune bourgeois, fou de vidéo. Des stores noirs masquent les fenêtres de sa chambre. Il n’aperçoit la rue qu’à travers un écran de contrôle. Un jour, Benny tue une fillette avec le pistolet d’abattage désormais familier au spectateur. Le massacre a lieu chez lui, sous l’œil d’un Caméscope. La scène est hors champ. « Sur l’écran de cinéma, il y a une vidéo. Sur la vidéo, rien. On entend seulement des cris. D’habitude, les spectateur "vient au cinéma pour consommer des images de violence. Ici, il n’y a rien à consommer." [...]
Chez Haneke, regarder la télévision semble l’événement cinématographique par excellence. Le Viennois filme magnifiquement les visages face à l’écran, ces figures fades, lointaines, sans contre-champ, comme en proie à une extase négative. Le comble de l’horreur, dans « Benny’s Video », film ingrat, subtil et glacé pour étudiants en narratologie, c’est que les parents contemplent le petit assassin avec cet œil rond, absent et humilié, dont on regarde la télévision.
" Déjà réalisateur chevronné pour la télévision et auteur d’un long métrage (l&
" Déjà réalisateur chevronné pour la télévision et auteur d’un long métrage (l’excellent et glaçant Septième Continent), Michael Haneke fait son entrée fracassante dans le concert cinématographique international avec ce film qui déclenche d’emblée un débat sur le lien entre violence et images (...) Infusé par une érudition et une réflexion profondes (par exemple, la symbolique du cochon dans l’imaginaire nazi), déployant une esthétique froide, distanciée, comportementaliste, incontestablement impressionnant..."
" Peut-être fallait-il être Autrichien pour faire un film aussi terrible sur un sujet aussi terrible. Michael Haneke n'
" Peut-être fallait-il être Autrichien pour faire un film aussi terrible sur un sujet aussi terrible. Michael Haneke n'a jamais pardonné à ses compatriotes d'avoir tourné des comédies viennoises au sentimentalisme larmoyant à l'heure même où ils commettaient des crimes nazis. Aussi se refuse-t-il toute émotion pour dénoncer chez ses personnages une monstrueuse absence d'émotion. (...)
Benny ressemble à un mutant. Pourtant, le monde que peint Haneke dans cette fable est un peu trop proche du nôtre pour que nous ne soyons pas terrifiés. Est-ce ainsi que seront nos fils ? Chez nous aussi, on chante encore Bach, mais l'on ne pense qu'au fric. Ecoutez ces lycéens chanter en choeur une musique céleste, tandis que, derrière leurs dos, ils se passent des billets de banque pour jouer, comme les adultes, au « jeu de l'avion ». Ce jeu qui revient par trois fois au cours du film. Chabrol souhaitait que les spectateurs de L'OEil de Vichy détectent le mensonge et la propagande dans les actualités allemandes et vichyssoises de l'Occupation. Haneke, lui, veut que le spectateur de Benny's video tire la morale des images glacées et distanciées qu'il lui donne à voir, au lieu comme Benny de se laisser piéger par elles."
Nos offres d'abonnement
BASIQUE ETUDIANTS
1 | € |
le 1er mois(1) |
SANS ENGAGEMENT puis 4,99€ /mois
Sur présentation d'un justificatif(2)
BASIQUE
1 | € |
le 1er mois(1) |
SANS ENGAGEMENT puis 6,99€ /mois
PREMIUM
9 | ,99€ |
/mois |
SANS ENGAGEMENT
* A l'exception des films signalés
CINÉPHILE
15 | ,99€ |
/mois |
SANS ENGAGEMENT
*A l'exception des films signalés
BASIQUE ETUDIANTS
49 | ,99€ |
/an |
Sur présentation d'un justificatif(2)
BASIQUE
69 | ,99€ |
pour 1 an |
PREMIUM
99 | ,99€ |
pour 1 an |
* A l'exception des films signalés
CINÉPHILE
175 | ,99€ |
pour 1 an |
* A l'exception des films signalés
Vous devrez fournir un justificatif de scolarité (carte étudiante ou certificat, en .pdf ou .jpg).
UniversCiné se réserve le droit d'annuler l'abonnement sans possibilité de remboursement si la pièce
jointe envoyée n'est pas conforme.
Offre valable 12 mois à partir de la date de l'abonnement
_TITLE