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Paris, 1900. L’exposition universelle fête Klimt alors qu'il est condamné à Vienne pour provocation. La controverse éclate lorsqu'il rachète ses propres toiles.
Paris, 1900. Klimt est fêté à l'exposition universelle pendant qu'il est condamné à Vienne comme provocateur. Il vit sa vie comme il la peint, ses modèles sont ses muses. Klimt est en avance sur son temps. Ses relations passionnées avec les femmes et sa quête éternelle de perfection et d'amour se reflètent dans toutes ses œuvres. La controverse atteint son comble lorsque que Klimt détourne ses allégories "scandaleuses" et les rachète.
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" Filmé comme une valse sans cesse recommencée, Klimt danse, tourne, sautille autour des enfants aux corps et mots d'adultes qui le peuplent
" Filmé comme une valse sans cesse recommencée, Klimt danse, tourne, sautille autour des enfants aux corps et mots d'adultes qui le peuplent. A l'évidence, Ruiz s'amuse à faire s'agiter ce petit monde, en une fantaisie éblouissante, dont la liberté de ton ravit. Pions puérils sur le digne échiquier de l'Histoire, les grandes figures de l'époques y sont en effet dépeintes en polémistes de comptoir (le beau est-il fonctionnel?), mômes turbulents cherchant la bagarre ou ados lubriques en quête de fesses. Il faut voir Malkovitch, enfermé dans une cage, un masque de singe rabattu sur le visage, se trouver cerné par des prostituées à moustaches. Il faut ensuite l'entendre reconnaître, parmi ces putains velues, l'une de ses filles biologiques, semées aux quatre vents de ses amours d'un soir… L'art, pourtant, n'est pas en reste. Insistons bien: l'art, pas le discours sur l'art — celui-ci étant, au contraire, justement éreinté. Simplement l'art, donc, comme expression intime, émanation d'un être débordant, d'une émotion incontrôlable. Klimt ici peint peu, on l'a dit, mais prépare sans cesse, griffonnant, recherchant, pillant ses propres œuvres, faisant de son carnet de croquis le miroir de ses pensées. Et le film, rêvé par lui, de s'imaginer à son tour agrégat des toiles que le peintre n'a pas eu le temps d'achever avant de mourir. La prouesse de Ruiz, en cette recherche du temps pictural perdu, est dès lors esthétique. L'écran devient toile, le cinéma peinture animée (on ne croise pas Mélies gratuitement). Gorgé de couleurs chaudes, subtilement cadré (est-ce le cadre qui embellit le tableau, ou le tableau qui embellit le cadre, s'interrogent vainement les esthètes "fonctionnalistes" de l'époque), jouant sur l'horizontalité des corps élancés, nus ou harmonieusement ornementés, les reflets et les enchevêtrements,… Klimt, si l'on veut, est "un Klimt". La boucle se bouclant en une étincelante pluie d'or, mêlant, en une splendide suspension aérienne, et le peintre et son œuvre, éparpillés dans l'image."
Guillaume Massart" Raoul Ruiz n'a pas filmé une biographie du peintre viennois Gustav Klimt (1892-1918), mais une fantasmagorie "à la manière de Schnitzler"
" Raoul Ruiz n'a pas filmé une biographie du peintre viennois Gustav Klimt (1892-1918), mais une fantasmagorie "à la manière de Schnitzler" dit-il, imaginant une structure narrative en forme de spirale qui multiplie les jeux de miroirs, attise l'impression de voir surgir des échos et résonances comme lorsque l'on est sur un manège et que la répétition d'un certain nombre de motifs, de personnages, de sensations brouille les lois de la chronologie. Dès le début, où nous trouvons Klimt agonisant sur son lit de mort et où nous sommes invités à suivre la manière onirique avec laquelle le peintre se remémore sa vie, il apparaît que Raoul Ruiz se livre à une tentative d'exploration de ce que Marcel Proust appelait la "psychologie dans l'espace", et son film est d'ailleurs assez proche de son adaptation du Temps retrouvé, de l'art avec lequel il y orchestrait l'embouteillage des flux de mémoire, transfigurait le souvenir, transformait la conscience d'un homme en une maison hantée par des personnages réels ou rêvés, des visions projetées par une lanterne magique qui privilégie la distorsion et l'hallucinatoire, favorise les variations discursives et les bifurcations du quotidien vers la folie. Dans ce choix d'un flash-back mental, il s'autorise même l'anachronisme, par exemple lorsqu'il fait se rencontrer Klimt et Georges Méliès. Ce n'est pas seulement que tout se mélange dans la tête d'un Klimt qui défendit le droit aux chimères, c'est aussi que Ruiz, as du bricolage visuel, rappelle que c'est chez le mage de Montreuil que s'opéra la mutation entre peinture et cinéma. Et suggère une parenté entre le goût de l'insolite, du trucage, des effets irréels chez l'un et le culte du visage énigmatique, du décor mosaïque, de la silhouette sinueuse, du motif extravagant chez l'autre. Klimt est une tentative de transposition à l'écran de la peinture de cet adepte de l'ornement byzantin, kitsch, anti-académique : Ruiz accumule pour cela les mouvements de caméra, les angles de prises de vues inhabituels, les débauches de couleurs, déplacements de décors, changements de lumière (...)
Ce portrait d'un Klimt éminemment "ruizien" est celui d'un exilé du réel, entre la vie et la mort, qui ne sait plus qui il est, quels vertiges l'assaillent, quels jeux prédominent chez lui, ceux de l'amoureux ou du voyeur. D'où la profusion de miroirs, brisés, sans tain, ou présentés devant ses lèvres pour vérifier qu'un souffle l'anime encore. Le harem de ses modèles nus, ces prostituées à moustache au bordel où trône un gorille, cette Lea de Castro rencontrée à Paris (en réalité Cléo de Mérode) qui se dédouble et additionne les rendez-vous manqués, comme les infirmières qui flirtent avec Eros et Thanatos dans un hôpital où tombe la neige, composent une fresque qui tient évidemment de l'imaginaire, une sarabande exhumée d'un crâne fervent d'allégories."
" Le Grand Palais nous avait offert il y a quelques mois une somptueuse exposition autour des peintres viennois. Klimt est bien dans l’air d
" Le Grand Palais nous avait offert il y a quelques mois une somptueuse exposition autour des peintres viennois. Klimt est bien dans l’air du temps, et Raoul Ruiz vient tout naturellement nous en donner son interprétation personnelle. Une vision de l’art qu’il aiguise de film en film, réexplorant les classiques, de Proust à Saint-Exupéry en passant par Alain-Fournier quand il ne s’échappe pas du côté du réalisme magique qui a nourri son enfance chilienne. Klimt n’est rien d’autre qu’une pièce de plus au labyrinthe qui fait l’univers de Raoul Ruiz. Une exploration inlassable de l’art et de ses zones d’ombre pour tenter d’approcher le mystère de la création. Klimt n’est donc en rien une biographie mais un va-et-vient incessant entre la vérité et son reflet dans les enfilades de miroirs des cafés viennois. Car au cœur du propos, il y a évidemment l’image. Celle de Klimt, l’image impossible de la femme impossible, celle qui se dédouble pour mieux disparaître, celle qui pourrait être toutes les autres si ce n’était une enveloppe vide, une inexistence dont le peintre cherchera la substance jusqu’à sa mort. Celles de Georges Méliès, aussi, qui étourdit Paris de cette réalité à n’y pas croire, qui s’y substitue, qui usurpe des identités, des certitudes. Enfin, il y a l’image de Raoul Ruiz, enivrante, tourbillonnante, fuyante, désertant son rôle de miroir du réel pour transformer les êtres et les choses en illusions triomphantes et faire de la biographie d’un peintre une "fantasmagorie" d’ors et de mystères, un voyage à travers une vie et une œuvre où s’effacent progressivement les limites qui les distinguent. L’univers de Raoul Ruiz est bien là. Ces brouhahas, ces valses capricieuses d’une caméra qui refuse de se fixer, qui cherche à tout embrasser. La lumière de Raoul Ruiz se fond dans celle de Klimt, dans ces mordorés qui ne sont ni le jour ni la nuit, pas plus que la vie ou la mort. On ne reviendra pas non plus sur la présence éclatante de John Malkovitch, perdu dans cet entre-deux avec dans les yeux tout l’égarement de celui qui ne verra jamais le monde du commun."
Catherine Le Ferrand"...Méliès et Proust sont les deux figures tutélaires, inspiratrices et protectrices, de Ruiz, cinéaste qui n'est jamais si virtuose que re
"...Méliès et Proust sont les deux figures tutélaires, inspiratrices et protectrices, de Ruiz, cinéaste qui n'est jamais si virtuose que replongé dans l'Europe d'il y a un siècle, celle de l'apocalypse joyeuse et des expérimentations tous azimuts.
L'entrée du film dit cet esprit et cette forme qui font briller notre Chilien national. On y trouve, dans le capharnaüm d'un hôpital viennois de 1918, les obsessions stylistiques et les thèmes ruiziens, du visage de la femme à celui de la mort, un squelette composé de bouts ramenés de tous les pays de l'Europe, trimballé sur roulettes dans les longs couloirs d'un mouroir où une infirmière propose des bibles aux patients, un cul de jatte fornique dans un coin après avoir ôté ses prothèses, tandis que le médecin de service classe des photos de mutilés avec désinvolture. Enfin, alors que tout se met à tourner autour d'un axe mystérieux figure de style emblématique du Temps retrouvé, la caméra pénètre dans une chambre, la dernière, à l'orée des ténèbres, où repose Klimt, agonisant, allongé sur un «lit d'eau» aux reflets et effets miroir. Brusquement apparaît Egon Schiele, archange de la mort qui exerce sur son aîné une maïeutique sarcastique digne de Karl Kraus et concluant la danse funèbre.
Raoul Ruiz a placé cette scène au début de son film alors qu'elle a tout d'une fin, parabole d'un monde qui s'écroule dans un ravissement de décadence, une débauche de friandises vénéneuses, une multiplicité de faux-semblants baroques. Images d'un homme qui meurt, aussi : Klimt raconte donc sa vie depuis son lit de mort, déjà raide, muet et froid comme un cadavre et rarement acteur n'aura aussi bien porté le masque mortuaire que John Malkovich.
Ce récit à rebours, «revenant» d'un macchabée (autre figure retorse qu'adore Ruiz, à la Sunset Boulevard), fait de ce film le contraire d'une biographie filmée, ce qu'on appelle de nos jours un «biopic» : davantage une fantaisie, une fantasmagorie, comme rêvée par Klimt sur sa propre vie. Ruiz va jusqu'à dire que la caméra de son film est le regard même de Klimt. Ce qui n'est pas le plus mauvais point de vue sur le Vienne 1900. Car l'autre intérêt de ce Klimt est la reconstitution, elle, absolument historique on conseillera de voir ce film avec, à la main, l'essai classique de Michael Pollack (1) d'un milieu foisonnant et anticonformiste de la Sécession viennoise et de sa revue Ver Sacrum.
Ce Klimt emprunte le récit du «roman rêvé» à Schnitzler, la magie du cinéma primitif à Méliès (notamment dans les épisodes parisiens des amours du peintre avec la demi-mondaine Cléo de Mérode), sa lumière d'or au plus impressionnant des tableaux du maître visionnaire, Pallas Athénée, pour composer une valse à trois temps : tout à la fois personnelle, individuelle et collective. On y voit, ensemble et séparément, Ruiz, Klimt et Vienne.
(1) Michael Pollack, Vienne 1900, Juillard/Gallimard, «Archives», réédité en 2005. On lira également le solide dossier sur ce film proposé par la revue Positif, n° 542, avril 2006.
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