Serge Le Péron : Wiseman, le documentaire comme technique de guerre ?
Le critique de cinéma Serge Le Péron établit un lien entre la mise en scène de Frederick Wiseman et les tactiques1
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Vol, drogue, fugue, agression sexuelle... Au cas par cas, en l'année 1974, le quotidien du tribunal pour enfants de Memphis (Tennessee) observé sans relâche.
Vol, drogue, fugue, agression sexuelle... Au cas par cas, le quotidien du tribunal pour enfants de Memphis (Tennessee) observé sans relâche. L'auteur de "National Gallery" met en avant la variété et la complexité des affaires qui sont jugées : placement en famille d'accueil, enfants battus ou sexuellement abusés, consommation de drogue, port d'armes... Sans commentaire, sinon dans le montage lui même, le film expérimente l'art de disséquer la société en laissant tout le temps au regard et à la réflexion.
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" Filmé dans quelques mètres de sol administratif, Juvenile Court appartient avec Welfare et Hospital à cette série de films décrivant des i
" Filmé dans quelques mètres de sol administratif, Juvenile Court appartient avec Welfare et Hospital à cette série de films décrivant des institutions à la fois autarciques et, de par leur nature même, perpétuellement confrontées avec l’extérieur : avec le social le plus trouble ou le plus ahurissant qui ici se mue en inépuisable source d’énigme.
La tâche sans cesse recommencée de ce tribunal est de comprendre ce qui se passe dehors, d’en capter les tenants et les aboutissants, de reconstituer à partir d’instantanés, bribe par bribe, des moments de vie dans toutes leurs ramifications. Et pour cela les fonctionnaires ont une série de paramètres qui est leur complet arsenal, c’est cela que Wiseman cherche à isoler, ces axiomes occultes, cet informulé qui pourtant gouverne.
Le tribunal est aussi gare de triage et on ne le sent jamais aussi bien que par cette séquence où une jeune fille noire, récidiviste, finit par être littéralement dispatchée sur une sorte de maison de redressement. Siège d’affrontements, de négociations, de heurts avec une réalité inquiétante, le tribunal pour mineurs doit être le prototype d’une institution souple, d’une institution élastique, statuant sur le réel, elle ne peut se permettre d’être théorique. Il n’y a jamais dialogue, les accusés sont toujours muets, le débat ne peut être qu’entre le monologue de l’institution (il a plusieurs facettes) et la réalité.
Chaque cas est un exercice de psychologie, art dans lequel les fonctionnaires finissent par avoir une certaine maîtrise : il y a en particulier un moment surprenant dans le débat sur une obscure affaire de moeurs ; un adolescent un tantinet ahuri mais doté d’un tempérament comique irrésistible est accusé d’entreprises à trait sexuel sur la personne de la petite fille des voisins dont il avait la garde ; il nie. Le tribunal se retrouve confronté avec la mère de l’enfant qui fait un numéro de minauderies et de lèche insensé à l’égard de la cour : elle avait tout prévu, ce qu’elle craignait s’est produit. Tels qu’elle les formule, ses arguments étaient de nature à emporter la conviction de n’importe quelle administration, or ici pas du tout. Lors d’un huis-clos subséquent, un des juges réclame en effet qu’on examine le passé de cette dame qui semble obsédée par les tentations qu’offre un enfant à baby-sitter.
Juvenile Court est bâti sur un schéma dramaturgique d’une efficacité redoutable, il s’agit au travers de fractions d’événements de donner un aperçu des rouages de la machine, se présenter tous les cas de figure. On comprend assez vite les règles du jeu, les cartes auxquelles ont droit chacun des participants.
Et soudain, tous ces éléments se réunissent dans un saisissant procès filmé en temps réel où le spectateur est littéralement immergé car – cas unique – il est de tous les côtés à la fois, tous les personnages en même temps saisissant les enjeux de chacun. Le cinéma de Wiseman est là, dans cette application à restituer au cinéma la capacité de la vie à cacher un univers derrière chaque mot. "
" Les locaux du tribunal pour mineurs de Memphis, Tennessee. Allées et venues : agents de police, jeunes filles et jeunes gens en état d'arr
" Les locaux du tribunal pour mineurs de Memphis, Tennessee. Allées et venues : agents de police, jeunes filles et jeunes gens en état d'arrestation (on aperçoit des menottes), des blancs, des noirs, appels téléphoniques aux parents, frayeur ou désinvolture. Des délinquants blancs, beaucoup de noirs.
Fouilles. Séances de photos. Rencontre avec les " psys " de service. Puis nous faisons connaissance avec le juge Turner et ses principaux collaborateurs et collaboratrices.
Avec Juvenile Court, Wiseman semble éprouver une certaine jubilation : il retrouve le monde familier d'un tribunal ; et surtout, il décrit une équipe qui travaille avec compétence et dévouement sur des dossiers difficiles, parfois tragiques.
Parents irresponsables, familles 'monoparentales' dépassées, vols, violences domestiques, agressions sexuelles réelles ou supposées, agressions à main armée, trafic et usage de drogue, adolescents fugueurs… Le juge observe, interroge, écoute les témoignages, consulte les travailleurs sociaux, réunit des commissions… en essayant de ne pas pénaliser inutilement les jeunes délinquants.
Wiseman nous entraîne au-delà d'une approche anecdotique du fonctionnement de la machine judiciaire. " Le tribunal est la figure organisatrice de la démocratie américaine et de son histoire… " dit-il.
Juvenile Court est aussi le premier long documentaire que signe Wiseman. "…Il se peut que ces 143 minutes nous éreintent, mais elles nous auront aussi ouvert l'esprit à des aspects importants de la vraie vie et aussi aux pouvoirs propres à la télévision. " note un journaliste. "
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