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Manana est mariée à Soso depuis 25 ans et vie avec ses enfants et ses parents dans un appartement qu'ils partagent. Une famille en apparence heureuse...
Professeure dans un lycée de Tbilissi, Manana est mariée depuis 25 ans à Soso. Ensemble, ils partagent leur appartement avec les parents de Manana, leurs deux enfants et leur gendre. La famille est en apparence soudée mais Manama étouffe et veut en réalité reprendre sa liberté. Le soir de son 52e anniversaire, elle annonce qu'elle va partir, pour vivre seule dans un appartement. Sa famille accueille la nouvelle avec consternation...
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Elle a 52 ans et, soudain, elle fout le camp. Prof dans un lycée de Tbilissi, Manana ne supporte plus sa vie. Elle étouffe da
Elle a 52 ans et, soudain, elle fout le camp. Prof dans un lycée de Tbilissi, Manana ne supporte plus sa vie. Elle étouffe dans ce petit appartement, concentré de la société géorgienne patriarcale, où cohabitent ses parents, son mari volage, leurs deux grands enfants et leur gendre. Sans compter les proches et amis qui débarquent pour lui souhaiter son anniversaire et faire la fête. Sans un mot, sans une larme, sans un regret, elle part donc s’installer, seule, dans un studio. Peu lui importe d’être mal jugée par les siens et la société. Elle a trop attendu pour se ressembler, voici venu le jour de sa liberté.
"Une famille heureuse", bel euphémisme, est le portrait sensible d’une mère courage, d’une femme au bord de la crise de nerfs, qui réapprend le bonheur de respirer, de lire, d’écouter de la musique et de contempler, depuis son balcon, le houppier des arbres, au printemps. C’est un éloge de la fuite et un hymne à une seconde vie, loin des siens. Avec, dans le rôle de Manana, une comédienne (Ia Shugliashvili) au physique de tragédienne dont le mutisme, la détresse tue et l’absence marmoréenne sont bouleversants.
On ajoutera, pour vous convaincre d’aller voir ce film ardemment féministe, une mise en scène aussi fluide que chez Claude Sautet et une photo si rigoureuse qu’elle réussit même à saisir les ellipses.
Ces scènes, on les a vues dans des films français, italiens, russes, polonais ou égyptiens... Et jamais on ne s'en
Ces scènes, on les a vues dans des films français, italiens, russes, polonais ou égyptiens... Et jamais on ne s'en lasse. Une grande tablée, des embrassades et des engueulades, trois générations (au moins) rassemblées pour un repas... Un bonheur de cinéma si universel qu'avec cette version géorgienne on se retrouve tout de suite comme à la maison. C'est l'heure du dîner et, des grands-parents aux petits-enfants adolescents, tout le monde s'affaire. Mais, autour de la table, une chaise reste vide : la mère ne veut plus s'y asseoir. Et c'est toute la place de la femme en Géorgie qui apparaît bientôt inconfortable. Dans le grand appartement familial que l'héroïne, Manana, a décidé de quitter résonne la voix d'un prêtre qui dit la messe à la télévision : « Pour qu'une famille soit heureuse, la mère doit être sereine, elle doit se sacrifier pour les siens, élever ses enfants. » C'est si simple, le bonheur ? Avec Manana, rien ne l'est plus.
Elle rejette la vie commune avec mari, parents et enfants, mais elle ne rompt avec personne, elle déserte sans divorcer, elle part si doucement qu'elle semble rester. Elle en devient un mystère pour les siens, déboussolés, et c'est déjà une belle avancée. Du petit appartement où elle s'installe, elle fait son jardin secret. Manger une pâtisserie en guise de dîner, écouter Mozart en buvant un café, et même corriger des copies, tout devient savoureux pour cette prof de Tbilissi. Aux longues séquences collectives, d'un désordre bien orchestré, répondent alors des plans simples, épurés comme la nouvelle vie de Manana. Ces atmosphères se télescopent sans fracas. Au lieu de raconter comme une bataille cette reconquête de l'indépendance, le film surprend par sa douceur conciliatrice. Le trop-plein, souvent drôle, de la vie de famille et la note délicate de la solitude réparatrice sont des joies différentes, pas antagonistes. En témoignent ces moments très réussis où les personnages se mettent à chanter. Ils s'y mettent à plusieurs, et c'est poignant.
Mais c'est beau aussi quand Manana chante seule, au milieu d'une fête où elle retrouve ses amis du temps de l'université. En menant de front portrait de femme et portrait de groupe, les deux réalisateurs révèlent une vision de plus en plus subtile. Les membres de la famille, qui semblaient d'abord comme les barreaux d'une prison autour de la mère, sont en réalité un voile trompeur, masquant la vérité... Toujours entourée, Manana n'a pas regardé sa propre vie en face. Ce n'est pas seulement la liberté mais la vue qu'il lui faut recouvrer. Prendre ses distances lui permet de comprendre pourquoi elle voulait partir. Le personnage du mari, aimant mais effacé, revient alors au premier plan. Au coeur du chaos familial et familier, un couple ressurgit. Dans cette histoire de séparation sans rancune, des angles morts s'éclairent, des blessures se réveillent. Et aussi, peut-être, des sentiments. Cet étonnant mouvement que décrit le film est empreint, de bout en bout, d'une très belle sensibilité.
«Tu étais ma rose tu es devenu mon chagrin/ Tu m’évites et tu gardes tes distances./ S’il te plaît di
«Tu étais ma rose tu es devenu mon chagrin/ Tu m’évites et tu gardes tes distances./ S’il te plaît dis-moi si tu as trouvé meilleure que moi», entonne Manana d’un chant ardent, l’écho d’un amour déchu. En filigrane, une autre plainte demeure : ne pleure-t-elle pas l’érosion de sa liberté ? A l’aube de ses 52 ans, cette femme, professeure dans un lycée de Tbilissi, marque un pas de côté, quitte sa famille (son mari, ses enfants, ses parents dans le même petit appartement) pour partir s’installer seule.
Une famille heureuse, deuxième long métrage géorgien signé par la réalisatrice Nana Ekvtimishvili et l’Allemand Simon Gross, suit le chemin de celle qui s’esquinte à devoir expliquer sa décision. Une lourde bataille qu’elle doit mener au sein d’une société géorgienne marquée par la religion orthodoxe et le symbole de la famille soudée ; société qui conçoit, entre autres mœurs, que l’homme ait plus de droits que la femme. Les auteurs confient : «Personne n’a vraiment d’intimité en Géorgie, la famille entière a forcément une influence sur chacun de ses membres.» Manana n’en a cure, elle n’a pas d’explication magistrale à donner si ce n’est celle, silencieuse et évidente, de vouloir se retrouver. Le corps familial s’est englué en un bloc de relations, de devoirs, de conflits dont elle souhaite se séparer sans mal pour pouvoir rencontrer et secouer cette personne clandestine qu’elle est devenue sans même y prendre garde. Questionnée et blâmée de tous (ou presque), elle enjambe l’incompréhension et retrouve quelques amies d’enfance : «Je me sens vraiment bien, les filles.» Celles-ci n’écoutent pas, lui prêtent des motivations qu’elle n’aurait pas même pu imaginer.
La beauté du récit filtre dans cette fuite qui n’en est pas une. Par le chemin d’une seconde naissance, Manana installe son nid de quiétude : elle reprend le chant, respire enfin, restaure son individualité longtemps perdue. Cette subtile incarnation peut donner l’envie de (re)parcourir «l’Hypnose du bonheur familial», lumineux chapitre de la journaliste et critique Mona Chollet glissé dans la publication Chez soi (2005). Elle y décortique les stigmatisations (plus fortes pour la gent féminine) qui se collent à la peau lorsqu’on assume un désir de vivre seul et convoque (entre autres) les propos de l’universitaire Chantal Thomas qui, quand on l’invite en lui disant «Vous êtes seule ?» répond brillamment : «Oui, mais permettez-moi de le rester.»
Une femme s’en va. La cinquantaine à peine passée, Manana (la Shugliashvili, impressionnante actrice géorgienne)
Une femme s’en va. La cinquantaine à peine passée, Manana (la Shugliashvili, impressionnante actrice géorgienne) quitte mari, enfants et parents, tous rassemblés sous le même toit encombré. Rien de spectaculaire dans son geste, mais les répercussions agiteront le cercle intime et au-delà. On avait d’abord suivi cette femme, alors inconnue, dans sa visite solitaire d’un appartement plutôt lugubre. On ne pouvait guère s’y figurer de précédents occupants nageant dans le bonheur. Lieux abandonnés au quatrième étage d’un immeuble sans ascenseur. La coupure de courant ne suffisait pas à épargner lèpre des murs et plomberie douteuse. Le charme très discret des balcons filait flou. La visiteuse, pourtant, accordait à sa déambulation d’un espace à l’autre le temps de l’attention prospective.
Au moment où la concierge qui la guidait, s’évertuant comiquement à enjoliver le tableau, lui demandait si elle avait une famille, le silence de la réponse s’était dilué dans la coupe du plan. Le suivant ouvre les portes d’un appartement familial envahi de ce mélange de fluidité et d’agacements, voire d’exaspérations que la promiscuité impose. On y fraye par obligation au détour d’un dédale de meubles qui peinent à contenir le désordre. Ici cohabitent Manana et son mari, Soso, leurs deux enfants, jeunes adultes, et le vieux couple de parents de Manana. Il faut ajouter Vakho, époux de Nino, la fille aînée. Une situation commune en Géorgie, représentée sans outrance. Le chaudron est bouillant de vie. Vie commune qui imprime la caractérisation des personnages au prisme des générations.
La vieille dame râle tout le temps sur tout le monde, à la manière de qui, par tradition, règne sur la sphère domestique et seulement là. Son mari, assis dans le rôle patriarcal qui lui a été dévolu de droit, n’a sans doute apaisé sa férule qu’en raison du grand âge. Le fils de Manana, Lasha, se décolle des écrans pour atteindre le frigo. Son père, Soso, ne reproduit pas le modèle d’autorité prévu par un ordre si peu naturel qu’il s’en abstient. En somme, tout le monde va bien, compte tenu des vicissitudes ordinaires. Rien que Manana veuille fuir. Elle part pour se forger une existence qui lui convienne, sans même envisager de briser les liens profonds qui l’attachent aux siens. Pour elle, le postulat se tient tout entier dans ces termes qui réfutent explications et bilans. Les déflagrations produites par son attitude s’en trouveront enflées ou atténuées selon le degré de compréhension de chacun, de son positionnement dans le réseau des codes et des affects. On convoquera le ban et l’arrière-ban des aïeux et alliés pour tenter de la dissuader du péril qu’encoure forcément une femme qui prétend se délester.
Toutes sortes d’épisodes de la vie familiale ramèneront Manana dans une arène qu’elle n’a jamais souhaité déserter. Une grande part de l’originalité du film réside dans celle de ses angles d’approche. Ce n’est pas le récit d’une conquête par l’exposé de ses entraves. Une observation fine et subtile de Manana nous conduira dans ses pas à mesure de la construction du havre qu’elle se ménage en conformité avec ce qu’elle est, à une distance qui trouve sa justesse en restant mouvante, à de nouvelles frontières qui ne marquent pas d’absolu. Le plaisir d’un sourire au marché de son nouveau quartier un jour qu’ensoleille des retrouvailles avec une amie devenue fromagère, les oiseaux par la fenêtre de l’appartement qu’elle a décrassé à fond. Une petite omelette qui voisine avec un verre de vin sur la table où cette enseignante corrige ses copies. Un livre ouvert qui n’attend qu’elle. Le vent dans les arbres. Le désir abouti de ces riens immenses dessine le personnage, mais ne le résume pas. Manana est une femme qui s’active à sa liberté, non une statue échappée de son socle. Les larmes de sa fille, qu’elle pousse à l’émancipation, la bouleversent. Le choc d’un gros chagrin conjugal rétrospectif la fait vaciller. Les deux réalisateurs parviennent à convertir les épisodes de ce cheminement en moments prenants et éclairants. L’édifice en construction donne à voir par ses interstices des pans de société dans laquelle les personnages sont ancrés. Ce qui a été mis en branle ne reviendra pas à son point de départ. À la différence de l’adage, une porte n’est pas ouverte ou fermée.
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