Née le 30 avril 1954 à Wellington, Jane Campion a trois particularités : elle est la seule cinéaste néo-zélandaise de renommée mondiale ; ensuite, elle est l'unique réalisatrice à avoir décroché la Palme d'or du Festival de Cannes – et enfin, elle est la seule à l'avoir obtenue dans deux catégories différentes, le court métrage en 1986 avec Peel, le long métrage en 1993 avec La Leçon de piano...
La puissance maîtrisée de ce grand mélodrame d'aventures romantiques, qui valut à Holly Hunter l'Oscar de la meilleure actrice, n'a pas surpris les spectateurs de ses deux films précédents, Sweetie, et surtout Un ange à ma table, d'après l'autobiographie de l'écrivain Janet Frame, magnifique portrait de femme en lutte contre la pesanteur de la société néo-zélandaise.
Ce combat féminin, Campion le filmera à nouveau, dans l'adaptation d'un roman d'Henry James, Portrait de femme (1996), avec Nicole Kidman dans l'un de ses premiers grands rôles. En revenant à l'époque contemporaine, elle adopta un ton résolument déroutant pour dresser le portrait d'une Kate Winslet envoûtée par un gourou puis désenvoûtée par Harvey Keitel (Holy Smoke, 1999).
Son récent changement de genre – In the Cut (2003) est un thriller situé à New York, dans lequel Meg Ryan connaît une expérience passionnelle avec un policier sur fond de tueur en série - manifeste une évolution dans le choix de ses sujets, mais le thème profond, celui de la description psychologique de femmes combattives plongées dans des situations troublantes (toujours incarnées par des actrices remarquables), demeure inchangé.
C'est d'ailleurs ainsi qu'elle aborde un épisode de la vie de John Keats dans Bright star (2009), fondant le film sur la sensibilité d'une jeune étudiante amoureuse du poète. La cinéaste néo-zélandaise y renoue avec l'essence du romantisme, qu'elle dépouille subtilement de ses oripeaux et clichés trop longtemps associés, et offre une expérience sensorielle de cinéma, au plus près du marivaudage des deux amants, incarnés par de jeunes acteurs qui débutent leur carrière, Abbie Cornish et Ben Whishaw.
Quatre ans plus tard, Jane Campion présente sa première série, Top of the Lake, production américano-australo-britannique. Sur fond de thriller psychologique, porté par l'actrice Elizabeth Moss, la cinéaste jette un regard glaçant sur la violence perpétrée à l'égard des femmes dans les régions reculées de son pays.
Lucien Logette