" Adoor Gopalakrishnan, qui a commence sa carrière par la réalisation de courts-métrages en général documentaires, n'a jamais arrête d'en tourner, et en a réalisé plus d'une vingtaine, intercalés entre ses longs-métrages. Beaucoup sont centrés sur la culture la plus authentique du Kerala, à travers les formes d'expression du théâtre (qu'a pratiqué Adoor Gopalakrishnan avant le cinéma, en raison notamment de son environnement familial) et de la danse. La Danse de l'enchanteresse, long métrage, est consacré à la danse du « Mohini Attam » interprétée exclusivement par des femmes, avec l'accompagnement d'un groupe musical d'hommes incluant parfois des femmes.
Comme souvent dans les danses de l'Inde du Sud, la gestuelle est très codifiée par une quantité d'expressions pour toutes les émotions et sentiments, particulièrement les techniques de séduction (l'enchantement), et une des caractéristiques du « Mohini Attam » est parfois d'être réduite à la seule station assise, l'essentiel de l'expression étant recentrée sur le visage.
Sans commentaire, le cinéaste filme le rapport des disciples et des maîtres par lesquels passe la transmission des danses indiennes, l'enseignement, des représentations et quelques gestes ou activités de la vie quotidienne. Fidèle au dépouillement de ses derniers films, Adoor Gopalakrishnan, filme de manière assez large pour saisir la globalité de la danse et du développement de ses courbes harmonieuses, la relation avec le décor, souvent en bois, propres à l'Inde du Sud. Les plans sont longs laissant le spectateur pénétrer peu à peu cet univers de calme et de séduction.
Tourné essentiellement la nuit, avec une photo très contrastée qui sort de l'obscurité les silhouettes habillées de blanc des danseuses, le film est magnifique."
Hubert Niogret