" L'argument a déjà tant servi qu'on est curieux de voir ce qu'un jeune réalisateur (...) va bien pouvoir en tirer. Une famille bourgeoise se disloque sous l'influence d'un intrus, révélateur de toutes les névroses, de tous les désirs jusque-là enfouis. Mais dès lors qu'on prend en compte le titre du film, l'ambiance boulevardière qui règne dans le pavillon pimpant, et surtout la nature du fameux intrus (un rat domestique !), la curiosité change de cap. Exit les fantômes intimidants de Buñuel ou de Pasolini. Place au pastiche, à la farce.
Au départ, les personnages de Sitcom ne sont pas vraiment des personnages. Plutôt des clichés proprets et ridicules, surgis d'un feuilleton bas de gamme. Des automates que François Ozon va se faire un plaisir communicatif de malmener, de détraquer, de rouler dans la luxure (...) cet acharnement de François Ozon à dévoyer, à éberluer son petit monde, a ceci de plaisant qu'il s'en prend moins à une famille de chair et de sang qu'à des conventions narratives et psychologiques antédiluviennes, toujours en vigueur dans les mauvais films... et les « meilleures » sitcoms. C'est tout un répertoire de scènes de genre (exemple : madame et monsieur au lit, faisant « le point » sur la famille) qui passe à la moulinette du grotesque, de l'outré, de l'absurde.
L'efficacité comique vient d'une détonnante alliance entre la froideur impassible de la mise en scène et le délire libidineux du scénario. La parodie déjantée, à la fois kitsch et trash, produit, malgré quelques ratés ici ou là, de vraies étincelles. Si ce n'était que ça, il n'y aurait tout de même pas de quoi fouetter un rat. Après tout, la télé se charge souvent elle-même de se pasticher. Or, il y a ici quelque chose d'un peu plus personnel qu'une grosse plaisanterie bien vue. Quand la dinguerie culmine dans la maisonnée, quand la famille modèle a épuisé son festival de transgressions tous azimuts, on craint la panne sèche. Et puis non. Subrepticement, François Ozon a désigné en toute « mauvaise foi sincère » le responsable unique du chaos. Le vrai rat, c'est papa ! (...) Dans son élan, le réalisateur caresse alors, avec une cruauté qui fait plaisir à voir, ce rêve enfantin de liquidation du père et d'anarchie familiale. Le projet n'est peut-être pas très plausible, ni très politiquement correct. Mais, en tant qu'utopie, il ne manque pas de piquant "
Louis Guichard
Pas tout compris à la fin !