
Jouer au cow-boy ?
VIDEO | 2011, 4' | Après California Company Town, la documentariste poursuit son exploration des paysages et des...
En Utah, les derniers bisons à l’état sauvage font l’objet d’une chasse annuelle par des cow-boys en bout de course.
En Utah, les derniers bisons à l’état sauvage font l’objet d’une chasse annuelle par des cow-boys en bout de course. Vie et mort du mythe de la Frontière, aujourd’hui débité en produits dérivés. Par la réalisatrice de "California Company Town" (à voir également sur UniversCiné), prix des Bibliothèques au festival Cinéma du Réel 2009.
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" En 2009, on avait pu voir California company town de Lee Anne Schmitt, film-paysage par excellence. Elle-même est une artiste multidiscip
" En 2009, on avait pu voir California company town de Lee Anne Schmitt, film-paysage par excellence. Elle-même est une artiste multidisciplinaire : elle fait des installations, de la photo, écrit. Pour la durée des plans, les éléments non-humains qui y bougeaient, California company town n'était pas un livre d'art, type guide touristique illustré pour intellectuels. Le film était radical (uniquement des plans vides de villes californiennes abandonnées), ambitieux (faire une histoire de la Californie) et inédit (la Californie n'est pas spécialement connue pour l'histoire de ses mouvements ouvriers).
The Last Buffalo hunt (Compétition internationale) est bien un film de Lee Anne Schmitt, mais différent. Moins inédit, puisqu'un cow-boy, c'est plus connu qu'un ouvrier américain. Moins ambitieux, puisque la construction du film est en entonnoir : les cow-boys qui chassent encore le bison dans la Grande Nature de l'Utah ne sont finalement que des rouages de l'industrie touristique qui les fait survivre. Les paysages de « Parc Naturel » finissent jalonnés d'enseignes clignotantes et sillonnés des voitures des « visitors ».
Un monde qui se police de ses industries touristiques peut-il faire naître un film aussi vivant que la vie qu'il a tuée ? Lee Anne Schmitt refuse la question, de même qu'elle refuse le point de vue crépusculaire.
L'économie touristique, pour elle, est un révélateur historique. La vie du cow-boy n'a jamais été autre chose qu'un mythe, et les travailleurs du secteur touristique ne sont probablement pas si différents des anciens cow-boys qu'ils représentent. Lorsqu'elle filme la vie de Terry (le cow-boy), elle ne la filme pas comme un mythe. Elle la montre sous son aspect pragmatique, comme un travail quotidien, socialisé et rémunéré.
Le tourisme, dont la vocation est de tendre une image du monde, peut être un piège : les films sur le tourisme, souvent, n'arrivent pas à sortir de l'esthétisation de masse et à briser la glace de l'image. Ils ne produisent qu'une image désespérante de l'image généralisée.
La fin du film de Lee Anne Schmitt n'échappe pas vraiment à cet entonnoir - et Terry, le cow-boy, ou plutôt le guide touristique filmé par Lee Anne Schmitt, est simplement coincé, comme tout le monde. Ca n'a vraiment rien d'inédit que d'être un « travailleur » comme il l'est.
En revanche, The Last Buffalo hunt est plus divers que California company town. Lee Anne Schmitt a mêlé à des inserts d'un rapport du Smithsonian Institute sur le bison ou à des plans de paysage vide - ce qu'elle avait déjà fait dans California company town -, des prises de vue « sur le vif », filmées en immersion, caméra à l'épaule, de chasseurs de bison. Elle dit avoir eu beaucoup de difficultés à faire son film parce qu'elle se méfie de l'immédiateté, et que les images de Terry étaient trop « immédiates » à son goût.
The Last Buffalo hunt est un film qui donne à l'hétérogénéité sa pleine valeur. On ne peut jamais prévoir si la séquence suivante sera faite d'un matériau ou d'un autre. Les ruptures sont multiples, mais on ne perd jamais le didactisme. C'est la preuve d'une certaine intellectualité que l'on opposera à la préciosité et à la sophistication pseudo-intellectuelles et mystifiantes - lesquelles sont les vraies parades. Filmer un bison en train de mourir, un Terry en train de confier sa panade sont choses difficiles.
Et lorsque dans une première séquence de chasse, la balle va atteindre un bison dans le troupeau, on sent la réalisatrice-caméraman hésiter entre les hommes, la bête morte et les bêtes, déchirantes d'inertie, qui ont fui le troupeau."
" ... retour au désert, celui des plaines de l’Utah, vidées de leurs gigantesques troupeaux de bisons. Une fois de plus, c’est arriver trop
" ... retour au désert, celui des plaines de l’Utah, vidées de leurs gigantesques troupeaux de bisons. Une fois de plus, c’est arriver trop tard, après le réel, après le cinéma : cow-boys et bisons sont voués à s’éteindre.
Réalisatrice du remarqué California Company Town, Lee Ann Schmitt a suivi les chasses de Terry et Debby, amateurs d’hécatombes et à l’occasion guides de touristes en mal de sang. It’s complicated, répond-elle lorsqu’on lui demande quel sentiment est le sien vis-à-vis de la cruauté aveugle qu’elle a filmée. Irresolvable, il n’y a pas de solution.
Sur un troupeau de 600 bêtes, si on ne les chasse pas, elles meurent de faim. Restituant l’absurdité comme la complexité du problème, le film fait plus que chercher à susciter la honte, la pitié ou la colère, en dépit de la scène de trois longues minutes où Debby peine à achever un jeune bison à bout portant, devant s’y reprendre à cinq reprises. La femme chasseur est, selon les dires de la réalisatrice, ce qui la choque le plus (...) Tragédie de la conjonction entre ignorance et ennui. Debby aime flinguer des bêtes, elle aime le shopping aussi.
La citation de Frederick Jackson Turner, théoricien du mythe de la Frontière, résume cela en trois mots, blancs sur noir : « the dominant indidualism ». Il n’y a pas grand chose à ajouter.
Sous couvert de parler d’écologie, c’est le tableau de l’humanité actuelle que peint Lee Ann Schmitt. Car Terry est un damné : il voudrait arrêter de chasser, mais ne peut pas. Chaque chasse devrait être la dernière, mais l’économie le pousse à toujours emmener de nouveaux touristes massacrer des têtes (...)
Des bisons ou des cow-boys, qui disparaîtra le premier ? Il semblerait, en fait, que chacune des deux espèces soit vouée à perdurer en tant que social misfits – dans de ridicules petites enclaves qui seront le fantôme d’un romantisme sur fond de soleil levant vicié."
John Wayne au sujet de
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