Jean-Claude Brisseau : la découverte du cinéma
VIDEO | 2012, 15' | Le réalisateur de Noce blanche et des Anges exterminateurs revient sur ses premières amours ci1
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Stéphane Feuvrier vient de tuer un homme chez elle. Pour légitimer son crime, elle organise une mise en scène pour faire croire à une tentative de viol...
#18 Stéphane Feuvrier vient de tuer un homme chez elle. Pour légitimer son crime, elle organise une mise en scène pour faire croire à une tentative de viol. Son mari, un magistrat intègre qui a hérité d'une très grosse fortune, engage un avocat pour la défendre. Mais l'enquête révèle les secrets d'un obscur passé... Afin de faire vivre son catalogue, StudioCanal a donné carte blanche à Jean-Baptiste Thoret , historien du cinéma et réalisateur, pour créer sa propre collection. Le résultat ? La collection « MAKE MY DAY ! » qui regroupe les films « qui lui font plaisir », une série de pépites rares, méconnues ou oubliées des années 60, 70 et 80. L'Ange noir fait partie de la collection « MAKE MY DAY ! ».
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" C'est une longue confidence, comme murmurée dans le secret d'un confessionnal. Une femme vient de tuer un homme. Elle
" C'est une longue confidence, comme murmurée dans le secret d'un confessionnal. Une femme vient de tuer un homme. Elle s'explique devant son mari et devant son avocat. Puis l'avocat part à la recherche de la vérité. Et chaque personne croisée raconte, se raconte. Il y a les vivants, ceux qui vivent mais la mort dans l'âme, et le mort, qui témoigne lui aussi, grâce à des enregistrements vidéo. Car, comme il existe un théâtre d'ombres, L'Ange noir est un « film d'ombres ». Le film nous en prévient en s'ouvrant par quelques vers d'un poème d'Eluard : « Je sors au bras des ombres/ Je suis au bas des ombres/ Et des ombres m'attendent. »
Il n'y a pas de personnages mais des silhouettes, fantomatiques, qui, au-delà de leurs rôles bien déterminés (la garce, le voyou, le mari trompé), ne sont que prétextes à rêveries, cauchemars et fantasmes. Le rêve commence par un meurtre violent, mais nous ne voyons pas la couleur du sang de la victime. Il y a un couloir obscur et une femme tout de blanc vêtue. Cette couleur rouge qui manque au tableau rend la scène encore plus irréelle. Et ce sont des taches de couleur rouge qui deviendront notre fil d'Ariane, tout au long d'un jeu de pistes qui conduit l'avocat sur les traces du passé. Un canapé, une porte, quelques fleurs : rouge sang. Du sang qui ne coule plus dans les veines de ces morts errants. Leur voix est monocorde, lasse, parfois blessée, toujours retenue. Jamais un cri. Jamais une plainte. Rien ne brise le cours du songe. C'est la raison qui bascule. L'image est un rêve dont le contenu vire au cauchemar.
Renversement des signes : les héros ne sont pas ce qu'ils paraissent. Confusion : l'héroïne s'appelle Stéphane, et révèle sa double nature sexuelle. Elle qui donne la mort, dès les premières images, se prénomme en réalité Zoé (du grec « la vie »). Dédoublements : ceux qui sont inertes (Stéphane et son mari) s'incarnent en des proches qui, à leur place, se mettent à vivre (la fille au teint mat à la place de la mère à la pâleur brillante , l'avocat questionneur à la place du mari silencieux).
Ces glissements finissent par ouvrir la porte aux fantasmes. Pour ces ombres, la chair est un idéal ; le sexe, un interdit convoité. Ils combattent pour gagner un corps.
Car Stéphane (Sylvie Vartan, en magnifique icône assumée) est une madone à la fois lumineuse et ténébreuse, qui, même en prison, reste une image irréelle et parfaite.
Mais, si nous sommes bien dans un « film d'ombres », qui manipule ces ombres ? La caméra découpe l'espace et surplombe les êtres comme un oeil omniscient. Entre son château-prison et sa cellule à la maison d'arrêt, entre son mari (juge), son avocat et son amant (hors la loi), l'univers de Stéphane est celui de la justice. Une justice toute relative. Car celle qui prévaut dans le film est celle des sentiments. Quand, tout à coup, le juge (Michel Piccoli), tiré de sa léthargie, comprend qu'il va perdre le seul être qu'il aime, malgré le scandale, il supplie : « Laisse-moi partir avec toi. » Et alors, il devient bouleversant. C'est au nom de l'amour qui peut, lui aussi, n'être qu'une illusion (qui a vraiment été aimé dans cette histoire ?) que le crime se justifie. Parce que ce film sur le Mal est, en chemin, devenu une quête de pureté ; d'où un final glaçant, mélodramatique et stupéfiant. Car le vrai sujet de L'Ange noir est l'un des plus beaux : l'amour fou."
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"... Brisseau a simplement extirpé en Sylvie Vartan le trésor qu'il est bien le seul à avoir détecté : l'actrice, tout simplement sensationnelle. Et puisque la mariée est si belle, il aurait été malpoli de ne pas la doter d'un rôle magnifique. Du coup, Brisseau peut tout lui demander, et Vartan peut tout se permettre. La voilà donc qui surgit en Stéphane Feuvrier, grande bourgeoise de Bordeaux, mariée à un haut magistrat de la ville. Château, gouvernante, voiture de luxe et gros fric.
Mais aussi bien, aussi sec, on la déniche en garce au passé peu à peu décomposé : petite amie d'un ennemi public numéro un qu'elle vient de flinguer, ancienne pensionnaire d'un claque chic, ex-actrice de porno, homosexuelle, menteuse, voleuse, truqueuse, épouse manipulatrice, maîtresse intéressée, méchante fille et mauvaise mère. Sylvie Vartan se hausse alors au gynécée des sombres blondes hollywoodiennes qui de Grace Kelly en Kim Novak; allient physique de glace et tempérament de feu.
L'allusion à Hitchcock n'est pas fortuite. Il y a du Vertigo dans l'Ange noir quand, bien loin de s'arrêter à une expertise, d'ailleurs assez bâclée, sur les vices et turpitudes de la grande bourgeoisie provinciale (école Chabrol), Brisseau active une enquête autrement inquiétante. Sylvie-Stéphane, Joconde sans sourire, n'est qu'une collection de masques. Reste à savoir, c'est le vrai suspens de ce film accessoirement policier, s'il y a un visage derrière pour tous les porter.
Sous l'oeil d'une caméra le plus souvent distante ou en surplomb, comme si elle redoutait ce qu'elle filme, l'Ange noir dévoile un monde sans rédemption, où, grandiose ou minable, règne le mal (...)Se donner sans se perdre : ça pourrait être la maxime profonde du film mais ça pourrait être aussi le titre d'une chanson idiote (de Sylvie ?). D'où l'étrange beauté dérangeante de l'Ange noir, qui se risque à tutoyer le cliché (...) Il serait rapide de lui en tenir rigueur. D'une part, parce que tout phantasme est un cliché. D'autre part, parce qu'un cliché, surtout quand il est sciemment aggravé à ce point, n'est bien souvent que le travesti d'une véritable innocence.
On pourrait donc dire de la beauté tragique de l'Ange noir comme de la beauté singulière de Sylvie Vartan en personne, qu'elle remplit la fonction que Lacan assignait à la beauté des victimes chez Sade :
« Barrière extrême à interdire l'accès à une horreur fondamentale ».
« Depuis son premier film, Un jeu brutal jusqu’à Céline, les personnages des films de Brisseau se réfugien
« Depuis son premier film, Un jeu brutal jusqu’à Céline, les personnages des films de Brisseau se réfugient dans le rêve lorsque l'expérience vecue est trop difficile à vivre. Avec l'Ange noir, c'est tout le film qui est traité sur le mode du cliché, comme si le réalisateur avait perdu confiance dans le naturalisme pour atteindre la vérité et qu'il lui fallait revenir à une autre forme de récit.
Succession de références aux grands films noirs hollywoodiens, l'Ange noir est à prendre comme le geste d'amour fou d'un réalisateur shooté aux images depuis sa tendre enfance et qui fait ici acte d'allégeance à ses maîtres. La noirceur du propos s'inspire des mélodrames de Curtiz et de William Wyler, mais la construction du récit vient tout droit de chez Hitchcock.
L'Ange noir, c'est Vertigo dans le Bordelais, la splendeur de Kim Novak en moins et les magouilles du show-business en plus. Le film se déroule comme une enquête au cours de laquelle un homme, il est ici avocat, va remonter les différentes étapes du passé de l'héroïne. En femme fatale qui dissimule un secret, Sylvie Vartan impose une extraordinaire présence. Le film lui doit beaucoup. Et même si, dans sa naïveté, Brisseau n'évite pas toujours le ridicule, il manifeste, souvent, des audaces salutaires. »
" ... Seul cinéaste de l'Hexagone à avoir sérieusement travaillé la question sociale de pair avec une
" ... Seul cinéaste de l'Hexagone à avoir sérieusement travaillé la question sociale de pair avec une curieuse fascination pour le paranormal, le sexe et le mysticisme dans tous ses états : le petit en forme de cliché new-age, le grand comme point d'interrogation métaphysique. Avec L'Ange noir, Brisseau se surpasse dans l’étrange. Qu'est-ce que ce film ? Un mélodrame marxiste, comme on le souffle à ma gauche ? Un précipité chabrolo-bunuelien, comme on le susurre à ma droite ? Un film extraordinairement ambitieux et non moins extraordinairement planté, comme on le suggère un peu partout ? Inutile de se creuser les méninges et de jouer au Monopoly référentiel : L'Ange noirne ressemble à rien de connu.
C’est un film qui se contrefout des chapelles et des qu'en-dira-t-on. Un film qui n’a pas peur de travailler au corps les archétypes. Sans ricanement. L'Ange noir traque les secrets enfouis sous les apparats bourgeois, les pulsions du sexe et de la mort qui s’agitent frénétiquement sous les dorures (...) Brisseau cultive ici son paradoxe préféré. Il dépeint les passions les plus brûlantes avec une froideur spartiate. Territoire de la contradiction permanente où la pulsion joue au poker menteur avec la morale. Comme il n’a jamais renié son double héritage marxiste et freudien, Brisseau délivre un film férocement satirique sur le charme discret de la bourgeoisie et, simultanément, une épure bouleversante qui plonge dans les zones d’ombre de l’intériorité. Noce blanche et Céline malmenaient les clichés du roman de gare pour se colleter sévère avec la transcendance.De bruit et de fureur et les brouillons antérieurs auscultaient dix ans avant tout le monde les dérives des jolies banlieues. Cet ange-là se débat dans le fait divers et les codes du film noir pour radiographier les arcanes du désordre mental et de la frénésie sexuelle qui balaie tout sur son passage. Sombre comme l’enfer. Beau comme le mal. "
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