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Trois réalisateurs remontent à l’origine des clichés racistes afin de les questionner et mieux les démonter. Episode 1 : Les Arabes
Trois réalisateurs remontent à l’origine des clichés racistes afin de les questionner et mieux les démonter. Ils confrontent leurs singularités à des discours antisémites, xénophobes et racistes tenus par des militants, des politiques, ou des éditorialistes. De ces échanges ressort toute la contradiction de ces dérives idéologiques, en passe d’être banalisées. Episode 1 : Les Arabes
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Pendant près de dix ans, Alexandre Amiel a été grand reporter pour l’agence CAPA et Canal+ avant de créer Caméra Subjective, une société pr
Pendant près de dix ans, Alexandre Amiel a été grand reporter pour l’agence CAPA et Canal+ avant de créer Caméra Subjective, une société produisant des magazines et des documentaires incarnés tel l’excellent Made in France.
Sans doute le producteur serait-il demeuré à l’écart du terrain si, peu après les attentats de janvier 2015 contre Charlie Hebdo et l’Hyper Cacher, son fils de 11 ans n’était venu lui lancer un matin : « Pourquoi nous détestent-ils, nous les juifs ? » Avant d’évoquer Mohammed Merah et Amédy Coulibaly pour étayer son interrogation, puis de demander à son père s’il ne serait pas mieux de quitter la France.
« Réveillé par [son] fils », qui le renvoyait, confie-t-il, à l’image « d’un néo-juif de l’entre-deux-guerres », Alexandre Amiel a choisi de répondre par ce qu’il sait faire le mieux : à savoir réaliser et produire un documentaire. Ou, plutôt, afin « de ne pas tomber dans le film communautariste », une série déclinée en trois volets intitulée : Pourquoi nous détestent-ils, nous les Arabes ? ; nous les Juifs ? ; nous les Noirs ?
Une série extracommunautaire dont le didactisme mâtiné d’humour, la richesse des propos et des intervenants, mais aussi et surtout les partis pris formels et de narration la distinguent des récentes productions visant à déconstruire les discours raciste et antisémite ; et avec eux, ces « communautés imaginaires », pour reprendre l’expression de l’historien Pierre Birnbaum, qui menacent dangereusement la cohésion sociale.
Ainsi, à l’approche scientifique choisie par Christophe Nick dans le remarquable La Fabrique des préjugés (2014), Alexandre Amiel a préféré l’incarnation en confiant deux des trois volets à l’humoriste Amelle Chahbi, connue notamment pour ses stand-up et sa pièce Amour sur place ou à emporter, coécrite avec Noom Diawara ; et au comédien Lucien Jean-Baptiste, dont la filmographie en tant que réalisateur (La Première Etoile ou 30° Couleur) témoigne de ses interrogations sur la place des Noirs en France.
Rien de superficiel et aucune paillette dans ce casting dont on mesure le sens à travers le récit de leur parcours, qui témoigne d’une époque où la mixité sociale était encore peu ou prou de mise.
Comment celle-ci s’est-elle fissurée, puis délitée au cours de ces dernières années, pour laisser place aux crispations identitaires et au repli communautaire, ferment de peur et de violence, sous-tendus par la libération d’une parole raciste et antisémite ?
C’est à cette question que tentent de répondre Alexandre Amiel, Amelle Chahbi et Lucien Jean-Baptiste en confrontant leur histoire personnelle et familiale à celle des cinquante dernières années en France.
Entre singulier et universel, entre paroles intimes et paroles d’experts (historien, sociologue, ethnobiologiste…), illustrées de saynètes, de témoignages et d’images d’archives, bien loin du « roman national » que certains tentent de remettre au goût du jour à coups de « Nos ancêtres les Gaulois… », chaque documentaire concourt à dessiner un petit précis d’histoires de France plurielle.
Au-delà des clichés et des préjugés qu’il s’attache à défaire avec beaucoup d’à-propos, en particulier dans la confrontation directe et saisissante de chaque auteur avec des militants ou des représentants d’extrême droite (on pense au face-à-face entre Lucien Jean-Baptiste et Henry de Lesquen, patron de Radio Courtoisie, ou celui d’Alexandre Amiel avec Jérôme Bourbon, directeur de Rivarol, qui loue le talent revigorant d’un Dieudonné…), ce triptyque met en évidence la faillite coupable des politiques, de droite comme de gauche.
A cet égard, il faut écouter Hanifa Taguelmint relater la Marche pour l’égalité et contre le racisme de 1983 à laquelle elle participa (« On demandait de vivre simplement ») et, sans mâcher ses mots, la manière dont François Mitterrand et Jacques Attali ont tué ce mouvement en créant SOS-Racisme.
Ou encore Samuel Trigano, fondateur de l’Observatoire du monde juif, sur la montée des actes antisémites (5 000 entre 2000 et 2006) et « le choix du gouvernement [de Lionel Jospin] de faire silence sur ces événements pour “éviter de jeter de l’huile sur le feu” », selon l’expression de Daniel Vaillant, alors ministre de l’intérieur.
Sans parler de Samia Ghali, sénatrice (Parti socialiste, PS) des Bouches-du-Rhône et maire du 8e secteur de Marseille, qui ne cache pas ici avoir ressenti pour la première fois le racisme au sein de sa propre formation politique lorsqu’elle se porta candidate à la primaire PS pour les élections municipales de la cité phocéenne.
Même si cette série souffre de quelques faiblesses – en particulier dans le volet « arabe » –, elle s’offre comme une véritable bouffée d’air pur...
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