Michael Caton-Jones : "Comment raconter le génocide rwandais ?"
"D’une certaine manière, nous sommes tous responsables, nous occidentaux, explique le réalisateur de Shooting Dogs1
1994. Massacres au Rwanda. Une fiction qui veut témoigner pour le plus grand nombre d'un moment d'histoire tragique.
1994. Massacres au Rwanda. Un prêtre catholique anglais et un jeune enseignant coopérant se retrouvent dans le chaos, totalement impuissants, déchirés entre l'envie de rester et de lutter (mais mourir), ou fuir le pays (et vivre). Inspiré de faits réels et tourné entièrement au Rwanda, une fiction qui veut témoigner pour le plus grand nombre d'un moment d'histoire tragique.
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" Le titre, d'abord. Shooting Dogs fait référence à une phrase du livre du général Roméo Dallaire, le chef de la Mission des Nations unies a
" Le titre, d'abord. Shooting Dogs fait référence à une phrase du livre du général Roméo Dallaire, le chef de la Mission des Nations unies au Rwanda (Minuar), qui expliquait qu'après le génocide, ses hommes ont passé l'été 1994 à tuer des milliers de chiens errants qui s'étaient nourris de l'immense charnier à ciel ouvert qu'était devenu le Rwanda.
Ici, pour les besoins du film, la phrase est prononcée par un commandant belge dans l'enceinte de l'Ecole technique officielle de Kigali (ETO), refuge puis piège pour des centaines de Tutsis cherchant à fuir les génocidaires hutus. Après Hotel Rwanda, l'an dernier, et Sometimes in April de Raoul Peck, toujours pas sorti en France, voici un nouveau film grand public sur le génocide de 1994, qui a causé la mort de quelque 800 000 Rwandais, principalement tutsis. Dans un souci didactique évident, les auteurs ont choisi le drame de l'ETO qui offre unité de lieu, de temps et diversité des acteurs. Ils sont tous là : Hutus, Tutsis bien sûr, jeune coopérant européen, père blanc catholique, Casques bleus belges, légionnaires français, journalistes occidentaux...
Dès les premières heures du génocide, dans la nuit du 6 au 7 avril 1994, des centaines de civils tutsis, rejoints par une quarantaine d'Occidentaux, cherchent refuge dans les locaux de l'école qui sert aussi de base à des Casques bleus de la Minuar. Rapidement, le camp de réfugiés improvisé est assiégé par les miliciens Interahamwe, jeunes extrémistes hutus en tenues bariolées, ivres de bière et armés de machettes. Le noeud du problème ne tarde pas à apparaître. Les Casques bleus sont là pour observer la «paix», pas pour l'imposer ; ils ne sont censés utiliser leurs armes que pour se défendre. Les nouvelles du dehors parviennent par la radio ou les rares incursions de Joe, le jeune coopérant idéaliste, et le père Christopher, joué par John Hurt.
L'assassinat de dix Casques bleus belges dans une caserne entraîne les honteuses évacuations des seuls expatriés par l'armée française c'est l'opération Amaryllis puis des Casques bleus belges. Au moment du départ des soldats des Nations unies, un délégué des réfugiés demande au commandant belge : «Nous avons une requête. Nous vous demandons poliment que vos soldats nous tuent. Nous ne voulons pas mourir sous la machette.» Face au refus, il implore : «S'il vous plaît, juste les enfants.» On ne déflorera rien en révélant que 2 500 personnes ont été massacrées à l'ETO de Kigali.
La force de Shooting Dogs est aussi sa faiblesse. En 1 h 54, on apprend et comprend beaucoup. Mais à force de vouloir mettre en scène des archétypes, les principaux personnages sont devenus des allégories. Dans ce cas, où sont passés le prêtre génocidaire, le rebelle tutsi, le général de l'armée rwandaise, l'homme d'affaires complice ? Le souci de réalisme est renforcé par le choix de tourner sur les lieux du drame, la colline de Kicukiro, avec des rescapés comme figurants ou techniciens.
On est véritablement touché lors du générique de fin, lorsque sont passés en revue les membres de l'équipe de tournage, avec une courte notice biographique et une photo."
" Sachant la difficulté du cinéma africain à exister et l'inexistence d'un cinéma rwandais, on le comprend toutefois d'avoir pris le risque
" Sachant la difficulté du cinéma africain à exister et l'inexistence d'un cinéma rwandais, on le comprend toutefois d'avoir pris le risque d'être accusé d'avoir tourné un film colonial (les héros de Shooting Dogs sont des Blancs) pour dénoncer l'abandon des Tutsis par les Nations unies.
Michael Caton-Jones a tenu à tourner au Rwanda, à s'y entourer de survivants du massacre qu'il a reconstitué, et s'il a préféré la fiction au documentaire, c'est pour toucher un maximum de spectateurs (...) la fiction colle au plus près du réel. Le personnage interprété par John Hurt fait référence à un prêtre bosniaque nommé Vjeko Curic, qui périt là-bas assassiné après avoir caché des Tutsis. Et David Belton, le producteur et coscénariste du film, fut de ces journalistes de la BBC que l'on voit filmer les horreurs perpétrées sous leurs yeux, prendre des risques, et fuir, impuissants, emportant avec eux une éternelle culpabilité. "J'ai mis presque sept ans avant d'éprouver le besoin de témoigner, dit-il. Témoigner, c'est précisément la raison d'être de ce film, même si c'est avec dix ans de retard. Témoigner et rendre hommage à tous ceux dont les télévisions du monde entier ont refusé de montrer les images sous des prétextes fallacieux."
Ce point de vue sur un génocide admis sans broncher puis nié pendant un temps (800 000 morts seulement !) est donc celui de Blancs accusant les Blancs d'aveuglement et de lâcheté. Ce qui explique (partiellement) le manque d'épaisseur des personnages africains (...)
le film pose néanmoins la question de l'indicible. Pour y répondre dans les termes prônés par le héros crucifié. Face à un tel degré d'inhumanité, à une sauvagerie si inexplicable, il n'y aurait qu'une issue, la foi, un seul espoir, Dieu.
Plus que dans Hotel Rwanda, les auteurs se risquent à suggérer ce que furent ces dépeçages atroces et la terreur exercée par les extrémistes impatients de se mettre "au travail". Sans basculer dans le film gore, Michael Caton-Jones parvient à figurer la haine bestiale des miliciens flanqués de chiens qui, à quelques mètres, de l'autre côté d'un grillage, guettent l'instant où ils pourront se jeter sur leurs proies."
"... Le film évite pourtant tout manichéisme; Qu'il s'agisse de la journaliste, prête à risquer sa vie pour témoigner, mais qui avoue avoir
"... Le film évite pourtant tout manichéisme; Qu'il s'agisse de la journaliste, prête à risquer sa vie pour témoigner, mais qui avoue avoir du mal à se sentir concernée par ces morts noirs, du commandant belge pris entre ses ordres et sa conscience, ou même du héros, qui finit par abandonner ses amis pour sauver sa vie, tous les personnages laissent entrevoir leurs contradictions, leur ambigüité. Le seul message politique est celui de la complicité de la communauté internationale, de son indifférence.
Quand les militaires français viennent chercher les expatriés réfugiés dans l'école, ils sont clairs : aucun Tutsi ne sera exfiltré. Et quand les Belges partent, ils savent comment tout va se terminer. Au fil de sjours, la foule de tueurs, machettes et gourdins à la main, s'est amassée autour de l'Ecole technique officielle. Au dernier Blanc parti, leur leader siffle le signal du massacre. Ce jour-là, plus de 2500 Tutsi rwandais ont été tués."
"... Il y a, dans Shooting Dogs, des visages que l’on n'oubliera pas, comme celui de cette jeune étudiante rwandaise venue demander à son ex
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