Qu'est-ce qui va l'amener à se retrouver derrière les barreaux ? Une mécanique judiciaire implacable. Sean, corbeau impavide au charme ténébreux, en pince pour la douce Deanna qui s'affiche avec les joueurs de l'équipe de hockey. Son attraction pour Sean est réciproque mais la jeune fille n'ose vivre leur amitié au grand jour, par souci d'intégration. Sean subit régulièrement les brimades de ses camarades sportifs, jusqu'au jour où une altercation éclate, filmée par une armée de téléphones portables.
C'est là le début de l'enfer judiciaire pour Sean (...)
Peut-on condamner un être sur ses intentions quand elles ne sont que pure spéculation ? Oui, nous dit le film qui s'adosse à une loi à double tranchant, destinée à protéger les jeunes au Canada. Le principe de précaution jette Sean dans un engrenage où le dérèglement de tout un système juridique, carcéral, fait jour, en plus d'une crise de la famille patente. Rien d'étonnant à ce que Kafka soit cité au détour d'un plan (une lecture de Sean dans sa geôle) car c'est bien un sentiment d'absurdité qui domine le film.
Entre film fantastique à la Minority Report, teen movie et drame hitchockien avec sa figure de faux coupable, Blackbird se révèle un film passionnant. Loin des stéréotypes sur la jeunesse, le réalisateur restitue toute la complexité d'un âge dit, ironiquement pour Sean, de tous les possibles. En prison avec d'autres jeunes criminels, il expérimente le même type de violence hiérarchisée que dans son lycée. De corbeau à brebis galeuse au sein de sa communauté, le garçon pourrait virer mouton enragé.
Mais le propos de Jason Buxton n'est pas là. Le réalisateur a à cœur d'éviter toute forme de déterminisme. Il agit, en cela, à l'inverse de la machine judiciaire qu'il dénonce. Cette intelligence se retrouve dans les dialogues et la qualité de l'interprétation. Dans le rôle de Deanna, Alexia Fast (vue dans Jack Reacher) compose un personnage de fille populaire, tout en nuance. Quant à Connor Jessup, moue boudeuse et regard sombre, il est épatant."