Walerian Borowczyk : de Goto et de la couleur
Pour son premier long-métrage, le réalisateur polonais choisissait de tourner en noir et blanc dans une prod1
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Sur Goto, le gouverneur fait régner un climat concentrationnaire. Le jour où son épouse s'amourache d'un bel officier, il ordonne de faire tuer le jeune homme.
Goto est la dernière île d'un archipel englouti lors d'un tremblement de terre. Son gouverneur, Goto III, y fait régner un climat concentrationnaire. Lorsque son épouse veut fuir avec Gono, bel et jeune officier dont elle est amoureuse, le gouverneur ordonne de tuer l'amant de sa femme.
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" Il y a du Kafka et du Beckett dans cette fable politique sur un despote réactionnaire tourné dans un noir et blanc trav
" Il y a du Kafka et du Beckett dans cette fable politique sur un despote réactionnaire tourné dans un noir et blanc traversé de surréalistes flashs de couleurs. La sensation d'un théâtre de l'absurde est renforcée par la frontalité des cadres où les personnages semblent en représentation sur une scène... ou figés dans un tableau de maître. Avant d'être cinéaste, Borowczyk étudia en effet les beaux-arts et se fit connaître comme dessinateur d'affiches."
Samuel Douhaire" Chez Walerian Borowczyk, tout commence avec l'amour de l'objet. Choisir l'objet, l'isoler, décider de la surf
" Chez Walerian Borowczyk, tout commence avec l'amour de l'objet. Choisir l'objet, l'isoler, décider de la surface, du fond, de la matière sur lesquels il va reposer, se découper, s’inscrire, juger s'il est bon de lui permettre de signifier où s'il ne sera là qu'en objet, exposé, désigné mais ne relevant d'aucune symbolique et ne participant en rien à l'élaboration du drame. Telles doivent être les préoccupations majeures de Walerian Borotrczyk au moment de rêver un film.
Nous avons vu, dans ses films précédents (qui sont à deux exceptions près des films d'animation pure) les objets définis clairement, identifiables au premier coup d'œil, photographiés avec une sensualité clinique (Rosalie, Gavotte) ou tout au contraire inidentifiables, inquiétants mais doués de la propriété des effets sonores d'autant plus précis que leurs formes et leurs matières étaient incertaines (Les Jeux des anges) Goto, l'île d'amour est peuplée d'objets dont on peut dire immédiatement qu'ils appartiennent à la "collection Borowczyk". Il fallait, pour abriter cette collection, un local assez vaste. Borowczyk a imaginé une île, coupée du reste du monde à la suite d'un séisme, à la fin du dix-neuvième siècle. Etat de pure fantaisie, Goto ne vit pas selon les lois coutumiàres à l'utopie. Ses mœurs ne sont pas les caricatures des nôtres, on n'y mène point une vie à l'envers comme chez Samuel Butler, on n’y voit pas de créatures monstrueuses singeant outrancièrement nos défauts et ridiculisant nos gouvernements comme chez Swift, on n'y est pas voltairien, on ne s'y livre pas aux délices de la science-fiction ou de la fantaisie féerique, comme dans les bandes dessinées. Borowczyk est moins ambitieux et Goto n'est qu'un lieu poétique où caser des choses répugnantes ou jolies qui sont pour lui la poésie même. Ce sont des jumelles, des attrapes-mouches perfectionnés, des bottines, des dentelles surannées présentés sur fond de grands murs lépreux. La technique de ce long métrage est proche parente des techniques de l'animation. Borowczyk présente plan par plan, on serait tenté de dire image par image, ce qui serait bien sûr inexact. Un mouvement d'appareil suit de temps en temps la démarche d'un personnage, mais le jeu de l'acteur est simplifié; réduit parfois à quelques expression, voire à une seule et même expression. Le personnage est caractérisé une fois pour toutes comme le sont les personnages dessinés ou les marionettes (notons au passage qu'il est beau d’imposer une telle stylisafion à un acteur comme Pierre Brasseur).
Sur cette toile de fond se déroule un drame d'amour et d'ambition dont il est inutile de dire qu’il ne nous est pas conté selon les règles traditionnelles. Goto n'est pas une machine à faire frémir, ni même à émouvoir. Ni le paternalisme des petits dictateurs, ni l'amertume des belles jeunes femmes mal mariées, ni la traîtrise des ambitieux humiliés ne sont le véritable "sujet" de Goto. Ce ne sont guère que des motifs dans une tapisserie dont nous avons dit de quels fils elle était tissée. Nous avons d'abord vu ces fiîs, un à un, nous avons admiré la trame et nous sommes tout surpris tout à coup de nous apercevoir que la tapisserie est figurative et qu'elle conte le destin de trois personnes. Cela n'est pas l'un des moindres charmes de Goto qui demeurera sans doute longtemps la plus personnelle, la moins soucieuse des modes parmi les œuvres des nouveaux venus au long métrage."
" Le film de Walerian Borowczyk, Goto, l'île d'amour, récemment couronné du grand prix de la Conféd
" Le film de Walerian Borowczyk, Goto, l'île d'amour, récemment couronné du grand prix de la Confédération Internationale des Cinémas d'Art et d’Essai, et du prix Georges Sadoul, décerné cette année pour la première fois, a enfin trouvé un écran à Paris. Ce film effarouchait distributeurs et exploitants, en dépit de ses qualités extrêmes. Il faut dire que le petit monde de Walerian Borowczyk n'est pas des plus réjouissants qui soient. L'humour polonais, même transposé en France, rejoint un tragique démesuré.
(...) l'auteur étant avant tout un homme de cinéma. Tout son film tient dans un décor crasseux, délabré, où chaque chose inutile prend une valeur de richesse, où la dérision de certains actes tourne au drame. Incontestablement chaque scène, chaque séquence, ironique ou douloureuse, provoque un malaise.
Tout rapport entre le film de Borowczyk et certaines situations réelles n'est certainement pas fortuit, le cinéaste cultivant le paradoxe et la rhétorique avec une suprême habileté. On quitte cette oeuvre, vaguement décontenancé, écrasé par cette ironie douce-amère qui nous entraîne entre des chevaux immaculés, des pommes pourries, des exécutions capitales, des chiens méchants, des mouches, des ascenseurs-prisons, des combats singuliers et le drame d'une trop jolie femme perdue dans ce monde triste et sans espoir. La fin est sublime."
" Oeuvres admirables où se signale, plus encore qu’une évidente cohérence formelle, une sorte d'ent&eci
" Oeuvres admirables où se signale, plus encore qu’une évidente cohérence formelle, une sorte d'entêtement calme à disposer, pièce après pièce, expérience après expérience, les jalons d’un même discours "hanté", auto-ironique, salubrement pervers, diaboliquement agencé et contrôlé. (...)
La forme du récit peut être qualifiée de fable, indépendamment des références plastiques ou théâtrales qui s’y font jour : forme peu explorée au cinéma, mais qu'on peut pourtant, en raison de quelques réussites éclatantes (pour mémoire : les premiers Chaplin, Rossellini avec Où est la liverté?, Renoir avec le Testament du Docteur Cordelier, Godard avec les Carabiniers, Pasolini avec Des Oiseaux petits et grands...) tenir pour éminemment cinématographique.
Jalonnant ce strict parcours, en ordonnant les péripéties, les lois de l’île, et sa géographie, dessinent tout autre chose qu'une simple toile de fond : la définition méthodique et minutieuse d'un ordre symbolique qui régit, autant que les agissements des personnages, le récit lui-même et ses articulations. Les lois, découvertes au fil de cérémonials dérisoires, tirent leur puissance d’oppression d’un arbitraire rigoureux, proche de Carroll, Kafka ou Roussel : le vol d’une paire de jumelles se juge sur le même plan que l’assassinat de douze personnes, et la sentence est livrée aux hasards du cirque. (...) Toute fuite est hors de question : et qui dit qu’ailleurs brille de plus d’attraits ? ( " Ailleurs ce n’est pas mieux, c’est différent ").
La géographie de l’île se partage en intérieurs délabrés et en extérieurs sinistres, qu’unifie une photographie uniformément "sale", entre la grisaille et l’anthracite, comme si le support avait été préalablement enduit de charbon : remises et greniers poussiéreux, entrepôts et hangars sordides, manèges sombres et réduits aux murs détériorés constituent la Cour de Goto.
Mais la véritable distribution de cet espace ne s'opère ni par la narration, ni par les personnages, mais par les objets, le film apparaissant vite comme un pur et simple processus de fétichisation, investissant peu à peu jusqu'aux personnages, eux-mêmes fétichisés. Trois "séries" privilégiées cristallisent ces rapports au sein d’une érotisation progressive de l’espace : les machines, les animaux, les corps.
Les machines d'abord, oppressantes ou familières, "naturelles" ou monstrueusement "bricolées", sont objets de contrainte, de torture, ou encore mystérieux totems, oracles : cage d'ascenseur, treuils, wagonnets, guillotine, que signalent et différencient toute une gamme de grincements et stridences métalliques ; ou boîte attrappe-mouches, instruments de musique, support à chaussures : débarassés de tout coefficient décoratif, ils ont pour fonction d’asservir les personnages et d’instrumentaliser le récit, agents ou substituts de délicats vertiges d’où tout masochisme n'est pas absent.
La série-animaux (chevaux, chiens, mouches), intermédiaire entre les machines et les corps, leur sert de relais et fixe, sensuellement et métaphoriquement, le mouvement ininterrompu des hantises et des désirs, que vient parfaire la vision soudaine des corps offerts, au bain ou à l’adultère (...).
Un amour maniaque des matières préside à ces arrangements où la présence sensible du bois, du métal, des étoffes, des épidermes (des bruits aussi, admirables de densité, et des voix) n'efface pas celle de la main qui les a ordonnées. Encore Bruno Schulz: "le démiurge rend la matière invisible, la fait disparaître sous le jeu de la vie. Nous, au contraire, nous en aimons le grincement et la résistance, nous adorons sa maladresse de golem". Ici reparaît Borowczyk-animateur : par delà la mise en œuvre de cette magistrale fable rase où se déploie, atrocement drôle, une conception particulièrement originale du burlesque morbide, tout nous invite à considérer ce nouveau "traité des mannequins" comme l'accomplissement de l’œuvre antérieure, autant que comme nouveau départ."
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