Nasser a passé vingt-quatre mois derrière les barreaux. Tout juste sorti de prison, il revient dans son quartier, Pigalle, où il retrouve ses amis et son grand frère Arezki, patron du bar Le Prestige.
Nas est bien décidé à se refaire un nom et Le Prestige pourrait bien lui servir de tremplin…
" Arriver trop tard, comme après la bataille : voilà le beau thème mélancolique paradoxalement choisi, pour leur premier long métrage, par Hamé et Ekoué, figures du groupe de rap La Rumeur. A sa sortie de prison, Nas (Reda Kateb) se prend d'intérêt pour le bar quasi désert tenu, à Pigalle, par son grand frère (Slimane Dazi). Il rêve d'un lieu pour noctambules, bondé jusqu'à l'aube, propice aux trafics lucratifs, sans comprendre que ce coin de Paris, autrefois interlope, s'est « gentrifié ». Les rois y sont désormais les grandes enseignes mondialisées, et non plus les petits Tony Montana de quartier.
Un peu comme Go Go Tales, d'Abel Ferrara, sur la fin du New York sulfureux et frauduleux, le film offre le portrait d'un monde en voie de liquidation, un univers fait pour la nuit, mais montré le plus souvent de jour, comme pour mieux le renvoyer à son obsolescence. Les « derniers Parisiens » du titre sont des hommes, des mecs, pour la plupart d'origine maghrébine ou africaine, et qui n'ont plus guère que leurs joutes verbales pour continuer à exister : leurs combines à l'ancienne sont repoussées vers la périphérie. Une grande lame de fond sociologique et immobilière les guette.
Ces hommes entre eux, ou renvoyés à leurs solitudes respectives, sont filmés dans une tradition naturaliste qui remonte à Pialat et passe par Kechiche. Les réalisateurs y glissent leur romanesque familial, les blessures fratricides entre le grand frère rangé des voitures et Nas, le chien fou qui n'a déjà plus l'âge de l'être.(...) Un film noir, sur la violence du monde, et pourtant sans crime au sens propre. Sans autre victime que des caïds amateurs, appelés à devenir des laissés-pour-compte."
Louis Guichard
Les Inrockuptibles
" Les duettistes de La Rumeur passent du rap au cinéma avec bonheur. Ce n’était pas gagné d’avance. Outre les difficultés économiques, il y...
" Les duettistes de La Rumeur passent du rap au cinéma avec bonheur. Ce n’était pas gagné d’avance. Outre les difficultés économiques, il y avait dans leur projet de raconter leur quotidien et leur quartier un potentiel de clichés : la ville, la nuit, ses bars, ses petits truands et petits trafics, un grand frère rangé des voitures, un cadet sorti de prison et toujours tête brûlée, une femme au milieu, on croit avoir vu ça dans des dizaines de films noirs américains et français.
Tout le talent de Hamé et Ekoué est de ne pas s’en tenir à ces codes classiques et de les nourrir d’amples coulées de vécu au ras du pavé, prenant le temps de se hâter lentement. Mais les références des auteurs sont autant parisiennes qu’américaines : ici, pas de flingues, pas de courses-poursuites en bagnole, pas de gunfight spectaculaire, pas de montage cocaïné, mais des personnages ancrés dans la réalité urbaine d’aujourd’hui, dialoguant avec une gouaille mêlée de tous les parlers hybrides contemporains, comme si les classiques de Becker ou de Melville étaient réécrits par Joeystarr ou PNL.
En passant au cinéma, les gars de La Rumeur ne lâchent rien de leur vision rugueuse, abrasive, dissensuelle.Au début du film, une séquence de bar pourrait faire grincer quelques dents, certains des protagonistes se livrant à un concours de vannes sexistes. Mais la façon dont les vanneurs se font finalement virer, et la place dévolue plus tard à Mélanie Laurent et à sa relation avec Slimane Dazi prouvent que le film est plus subtil et nuancé que certains de ses personnages secondaires.
C’est toute l’honnêteté de Hamé et Ekoué que de ne pas enjoliver à tout prix la réalité qu’ils veulent montrer. Et ce qu’ils montrent, c’est qu’à rebours de tous les discours sur le refus de s’intégrer, les habitants de Paname issus de l’immigration ne sont, certes, ni des anges ni des démons mais à tout le moins des Parigots pur jus, aussi légitimement enracinés dans cette ville que les descendants de Fréhel ou Gabin."
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