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Autopsie (cruelle) d'un couple. D'un feuilleton télé en six épisodes, Bergman a tiré pour le cinéma une épure de presque 3h. Autobiographique et déchirant.
Johan est maître de conférences, Marianne est conseillère juridique. Ils forment un couple heureux entourés de leurs deux filles. Mais depuis quelques mois, Johan est amoureux de Paula. Il décide après une violente dispute de quitter le domicile conjugal... Bonheur, délitement, destruction... et renaissance ? D'un feuilleton télé en six épisodes qui fut un triomphe, Bergman tira pour le cinéma une épure de presque 3h. Une autopsie (cruelle) d'un couple, récit autobiographique et déchirant. En 2002, Bergman sortit de sa retraite pour en tourner la "suite", avec les mêmes acteurs : "Saraband", face crépusculaire de ce chef-d'oeuvre de la maturité qui consacra le génie de l'auteur de "Persona" et "Cris et chuchotements". Version remastérisée en 2014.
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" ... De cette fresque du quotidien, réalisée comme Le Rite pour la télévision (six semaines, six sé
" ... De cette fresque du quotidien, réalisée comme Le Rite pour la télévision (six semaines, six séquences de cinquante minutes) le film ne nous restitue qu'un condensé (...) mais le film préserve sa cohésion, son unité propre. Il adopte la technique du petit écran, abondance des gros plans des champs-contre-champ, photographie aux couleurs pulpeuses (Sven Nykvist). L'écriture n'a pas la somptuosité plastique de Cris et chuchotements, mais l'intensité d'un psychodrame, la sécheresse d'une étude d'anatomie qui dissèque minutieusement la vie ordinaire d'un couple, une chronique de dix années, où la durée est soumise par le découpage en chapitres, à des ellipses, et à de saisissants rapprochements métaphoriques.
Cet essai sur la « Psychologie du mariage » est celui d'un moraliste lucide et désenchanté, qui a succédé au métaphysicien de jadis.
Essai-enquête où se conjuguent au punch des images la densité et la force percutante d'un dialogue qui révèle l'homme de théâtre, plus strindbergien que jamais dans ses stridences. Et plus bergmaniens que jamais ce regard, ces idées concentrées en un faisceau de lumière décapante. La rigueur, l'acuité de l'analyse déchiffrent dans l'itinéraire et les composantes de la vie du couple ce qui est au-delà des apparences. Sous les masques, la vérité — les vérités — secrète (Il n'y a pas de vérité unique, dit l'un des protagonistes).
Le cinéaste prend en compte l'ambiguïté, la complexité, les conflits de ses personnages : pour être des adultes « raisonnables » — raisonneurs — ils n'en sont pas moins des « analphabètes du sentiment », ni plus ni moins que beaucoup d'autres qui « n'ont rien appris de l'âme », c'est-à-dire d'eux-mêmes.
A l'idéologie de la sécurité (...) Bergman oppose une conception de la liberté comme dialectique de lutte, d'accomplissement, refus des faux-semblants, du camouflage, des accommodements hypocrites. Démonstration ? Non. Méthode d'investigation : Bergman interroge la fonction et la fiction du mariage, décortique ses mécanismes avec une précision chirurgicale, une cruauté même, qui font foin des mythologies.
Distance critique, quasi documentaire : tensions, violences, paroxysmes concourent au tempo dramatique mais agissent surtout en révélateurs d'une crise, d'une succession de crises qui jalonnent le parcours du couple brisé, ressoudé jusqu'à la modification radicale du rapport d'inégalité (supériorité du mâle).
Le « cas » choisi est délibérément banal. Bergman ne cherche pas le typique mais le vrai.
L'histoire de Marianne, avocate (Liv Ulmann) et de Johan, universitaire (Erland Josephson) est liée à leur situation sociale, aisée, qui ne l'explique pas totalement. Les personnages-miroirs réfléchissent et se réfléchissent l'image qu'ils se donnent et nous renvoient, confrontée à leurs actes, ne se dégrade pas du fait de l'incommunicabilité mais du conformisme.
Foudroyante ironie de Bergman : images d'Epinal du « ménage idéal » suédois, fixées par les reporters avec la complicité du couple pour servir de modèle aseptisé aux bien-pensants (...) Bergman va démolir le tableau trop bien huilé (...) Les coups sont feutrés, mais bien ajustés, en forme d'antithèses-chocs.
D'un côté les certitudes béates du « ménage idéal », de l'autre la haine explosive du couple ami qui s'entredéchire au cours d'un dîner sur le ton Qui a peur de Virginia Woolf ? ; l'enfer avoué, le ratage intégral, les griefs sentimentaux qui s'ajoutent aux intérêts financiers. Mais pour les bonnes consciences, l'enfer c'est toujours les autres.
La cliente de Marianne veut divorcer après vingt ans de traversée d'un désert sans amour qui l'a tellement desséchée qu'elle a même perdu le sens de la soif, comme celui du contact avec les êtres et les choses. Terrible évidence du mariage-illusion, du mariage-mensonge où l'on se réfugie dans le simulacre permanent, la résignation ou la destruction réciproque.
Malgré ces signes de malaise, la catastrophe arrive pour Marianne sans crier gare. La façade de la réussite était lézardée. Elle s'effondre brutalement. Johan quitte Marianne pour une autre. Humiliation, désespoir froid (elle croit encore l'aventure éphémère), de celle qui fut l'enfant sage et la jeune fille rangée de l'album de photos qu'elle commente. Constatant la faillite, le gâchis depuis longtemps consommé, elle cherche à comprendre.
Qu'est-ce qui l'a rendue si vulnérable ? Une trop grande aptitude au conformisme : « J'ai toujours fait ce que l'on me disait de faire ». Soumission le plus souvent synonyme de démission. Du coup Marianne découvre que sa vie conjugale fut un terrain miné : corvées, obligations familiales, habitudes devenues routines, érosion du désir, frustrations déguisées, auto-mystification. Le mariage fut une école d'aveuglement, la séparation devient pour Marianne (...) l'apprentissage de la liberté, de la clairvoyance.
Elle sera désormais une vraie femme et non « la femme d'un ménage » même quand elle renoue avec Johan que sa fugue a déçu. Retours de flamme épisodiques, le divorce, imposé par Marianne, provoque d'autres déchirements et tentatives d'anéantissement. Entre Johan et Marianne, qui ressemblent maintenant à leurs amis, la réconciliation est impossible (...) Dix ans après, remariés chacun de leur côté, ils redeviennent amants. Naufragés, plutôt, qui l'un par l'autre espèrent encore le sauvetage. La passion les rapproche sans doute, un éclair du ravivé, mais aussi la conscience d'avoir perdu leur vie à se chercher, à être eux-mêmes, dans le mariage manqué, les déconvenues de l'aventure.
En fin de compte, c'est Johan qui s'avère des deux le plus fragile, le plus désarmé. Marianne, délivrée du conformisme qui l'étouffait, est sortie de l'épreuve meurtrie, mais endurcie. Johan peut exprimer sa crainte : Te sera-t-il possible de ne pas m'écraser par ta force féminine ?
Ce retournement, c'est la leçon de l'histoire, qui ne s'achève pas en happy-end, puisque rien n'est acquis : la jonction de deux êtres, à travers leur solitude, peut être encore celle de deux égoïsmes. Mais s'il n'y a pas de vérité unique, il reste toujours une vérité à conquérir.
Bergman retrace les péripéties de cette conquête comme un corps à corps, un face à face, un « huis clos » dramatique où la tendresse se combine à l'incandescence, la crudité provocante des mots à la sensualité des images. Ecriture admirablement contrôlée, servie par des acteurs prodigieux : Liv Ulmann toujours sublime, transparente et opaque, Bibi Anderson irradie dans sa brève apparition, Erland Josephson, moins connu (il a été l'interprète du Rite) accomplit une performance digne de sa partenaire (...)
La réalité du couple marié, traquée dans ses aspects sordides, grotesques ou douloureux, ses tabous et ses détresses dissimulées, a rarement soumise à une si parfaite radioscopie.
Moins pessimiste que d'ordinaire, plus décantée, la vision de Bergman n'en est pas moins celle des bords du gouffre, du vertige, faite de la chair et du sang de ses personnages, du feu dévorant du désir et de la passion. Elle désigne à la liberté un chemin qui commence en chacun de nous et ne traverse l'enfer de « l'autre » que pour en conjurer la fatalité."
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