"C’est sous la forme du documenteur (ou mockumentaire, comme vous voudrez), que Jean-Pascal Zadi décide d’organiser sa marche. Il fallait une sacrée dose de courage de la part de Wax et Zadi, ainsi que de leurs guests, pour monter le projet. Pourquoi ? Parce que Tout simplement Noir regorge de répliques crues, et mêmes des pires atrocités qu’on puisse s’imaginer sur le racisme, pas seulement anti-Noir. Avec une vertu cathartique. Car oui, on peut dire ces atrocités, pourvu que les intentions et la subtilité soient au rendez-vous. En effet, le film est un objet bien plus subtil que ses atours le laisseraient imaginer. Une pléiade de stars, une sortie estivale en grande pompe… Est-on sûr qu’il ne s’agisse pas là d’une énième comédie populaire bien peu ambitieuse ?La réponse réside dans une écriture fine, des numéros délirants, hilarants, dont on se demande même parfois comment leurs interprètes ont pu accepter de les jouer, et un vrai discours sur le sujet qu’il aborde, loin des clichés qu’il abat en faisant mine de les étayer.On sent avec un immense plaisir les discussions qui ont pu amener à certaines scènes. Les conversations entre amis où chacun, à la fin, se dit : « ça ferait un sacré film ».
Le voilà, le film, et il a des choses à dire. De fait, il démontre ce qu’il souhaite démontrer par l’absurde. Une identité noire ? Une personne pouvant arriver en disant : « je représente les Noirs » ? Comme si un seul continent, l’Afrique, était représentatif ? Mais alors, en Martinique ? Et partout ailleurs ! La meilleure trouvaille est sans doute la démonstration qu’il est impossible de trouver une date commune qui pourrait représenter tous les Noirs. Ce serait manquer très gravement de nuance. Non, ils ne constituent pas un bloc, une entité inamovible. Il faut d’ailleurs voir Zadi lui-même essayer d’expliquer ce qui caractérise une personne noire, pour rire d’abord, réfléchir ensuite.Par ailleurs, si le film n’échappe pas à un effet légèrement dommageable qui est la succession de sketchs, il n’oublie pas de donner du liant avec l’histoire de Jean-Pascal. Ce dernier est attachant au possible, drôle à souhait, le regard un peu perdu lorsqu’il réalise que le sujet le dépasse alors qu’il se trompe lourdement sur la manière de convaincre les gens de le rejoindre, en opposant les causes, ou en excluant.
Finalement, il restera du long métrage quelques numéros absolument mémorables, incroyablement jusqu’au-boutistes. En figure de proue, Kassovitz qui effare par son racisme qui rappelle les pires heures de l’étude anatomique du corps noir, ou encore Lucien Jean-Baptiste, qui fait monter une tension comique incroyable en présence de Fabrice Eboué, et qui va loin. Très loin, pour le meilleur.Une réussite, tout simplement."
Thomas Bonicel