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Un tournage de 7 jours; tout ce qui est tourné est projeté, sans coupes de montage; une seule prise, jamais deux. Le but : filmer la vie telle qu'elle vient.
Une oeuvre au noir. Une expérience plastique pour répondre aux ténèbres intérieures du cinéaste. Un tournage de 7 jours; tout ce qui est tourné est projeté, sans coupes de montage; une seule prise, jamais deux. Le but : filmer la vie telle qu'elle vient tandis que l'auteur s'entoure de bandelettes blanches, comme l'homme invisible, tandis que l'appartement disparait sous le noir des couches de peinture.
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" La bande son est précise et hétéroclite. Fragments de conversation, échos musicaux. Des lettres lues par plusieurs voix, témoignages trouv...
" La bande son est précise et hétéroclite. Fragments de conversation, échos musicaux. Des lettres lues par plusieurs voix, témoignages trouvés dans un tiroir peut-être. Il est souvent question de la mort, et d'un accident.
La démarche du film repose bien sûr sur l'interaction des images et des mots. L'abstraction froide de la matière filmée prend vie au contact des mots de hasard. Quelque chose se passe qui tient d'une alchimie propre au cinéma. Alain Cavalier, dont on croit deviner tout ce qu'il a mis de personnel dans le film (tout ce qu'il a laissé venir de personnel dans le film) maîtrise la matière inerte au point d'en faire sourdre, inattendue, mais intime et forte, une émotion."
"Ce répondeur… constitue un travail de deuil décapé de toute afféterie cinématographique, brut de taille, pourrait-on dire, sur la mort d’un...
"Ce répondeur… constitue un travail de deuil décapé de toute afféterie cinématographique, brut de taille, pourrait-on dire, sur la mort d’une femme que l’homme s’aperçoit n’avoir pas su aimer suffisamment durant sa vie et qui le vampirise depuis l’outre-tombe. Quelques photos, des lettres d’amour, mais aussi des billets dérisoires sur les courses à faire ou le repas à préparer en puisant dans le frigo sont les signes de l’absence.
(…) tout ce passé entre en contrebande
dans une sorte de happening qui voit le protagoniste peindre son appartement en
noir, y compris les fenêtres et lorsque le noir complet gagne l’écran et que
chacun croit déjà entendre le coup de feu qu’appelle cette démarche suicidaire,
c’est au contraire le craquement d’une allumette et un feu que l’homme met aux morceaux
de la chaise démolie un peu avant : ainsi jaillit une flamme encore mal
assurée mais qui va s’attaquer au noir, et sans doute le vaincre au-delà du
générique de fin .
Tourné en 16mm, pour 20 000 francs fournis par deux mécènes, l’œuvre est une esquisse, un essai, une étude (comme se les permettent les écrivains, les peintres ou les musiciens, et justement pas les cinéastes) : l’appartement est celui de Cavalier qui interprète –masqué- le rôle du protagoniste dont la voix off parle à la troisième personne bien que le film soit profondément autobiographique. Le coté expérimental, gageure à l’esprit souvent proche de celui d’un Luc Moullet (par exemple l’inventaire des sanitaires, du vieux cumulus à la cuvette fatiguée en passant par les tuyauteries usagées mal repeintes d’un horrible bleu agressif) est constamment contesté par de brusques accès de douleur (…) Quelques belles séquences gardent leur opacité inquiétante mais communiquent de vraies impressions de cinéma. Ainsi cette insistance de l’homme à aller frapper à une porte voisine qu’il finira par enfoncer, à descendre et remonter l’escalier, puis à prendre l’ascenseur pour sortir un moment dans la rue (la caméra subjective enregistre quelques vues violemment surexposées avant de rentrer se lover dans l’ombre du couloir), sortes d’essais pour rompre l’enfermement à moins que ce ne soit au contraire pour en provoquer d’autres, question d’air, de lumière, d’espace et de mouvement, en tous cas."
" Comment dire le choc ressenti à la vision de cette œuvre secrète, dure comme un diamant et teintée, ça et là, d’un humour étrange qui. en...
" Comment dire le choc ressenti à la vision de cette œuvre secrète, dure comme un diamant et teintée, ça et là, d’un humour étrange qui. en l’occurrence, est bel et bien -la politesse du désespoir ».
Cet épanchement, cette confession intime s’inscrit dans une forme qui n’est pas arbitraire. Mais comment le prouver ? Il y a tellement de films ridicules, narcissiques, prétentieux, qui jonglent avec des phrases et des images obscures au nom de l’art ! Le public finit par se méfier de ces accès et excès d’originalité.
Ici. rien de tel. Ce n’est pas du bluff culturel. Tout est pur, tranchant et évidemment sincère. Un homme nous parle. Nous l’écoutons. bouleversés, même si son message n’est pas toujours déchiffrable. Mais pourquoi vouloir toujours tout comprendre? La musique n'est pas figurative..."
" Refermé sur lui-même dans l’appartement que hante le souvenir de la femme qu’il aima (sa femme), morte au cours d’un accident d’automobil...
" Refermé sur lui-même dans l’appartement que hante le souvenir de la femme qu’il aima (sa femme), morte au cours d’un accident d’automobile, se pressent dans sa mémoire, attisées par la douleur, les réminiscences d’un passé qu’il ne se résout pas à considérer comme révolu. Au fil des heures, des jours, il va s’enfermer progressivement de manière définitive dans son propre univers, donnant à la réalité la légèreté et l’aspect insaisissable du rêve. (...)
Le son nous restitue le réel interprété par la mémoire. Elle écrivait... des choses quotidiennes, banales, laissées sur un coin de table le soir avant d’aller dormir : « Tu as un morceau de viande dans le réfrigérateur... Des pommes de terre avec de la crème c'est bon aussi »... De véritables lettres d’amour qui étaient autant d’interrogations sur leurs rapports, l’avenir de leur couple, les raisons qui le rendaient à la fois chancelant et solide. Bref, ces mille et un « riens » qui font parfois de la vie à deux un authentique bonheur.
Ce qui frappe surtout dans le film d’Alain Cavalier, c’est l’économie des moyens d’expression mis en œuvre, la légèreté d’un style qui évoque plus qu’il ne décrit. Une route en lacets luisante de pluie, montrée en plan fixe, avec pour contrepoint sonore le texte d’une lettre où il est question de retrouvailles, se charge tout à coup, d’angoisse en suggérant l’accident. Est-ce à cet endroit-là précisément qu’il eut lieu ? Peu importe. Ce n’est pas le fait en soi, ici, qui compte le plus, mais l’émotion qu’il fait naître."
" Ce film est un cauchemar. Cauchemar dont tout donne à croire qu’il a personnellement été vécu par l’auteur. Ces images sont comme des phra...
" Ce film est un cauchemar. Cauchemar dont tout donne à croire qu’il a personnellement été vécu par l’auteur. Ces images sont comme des phrases griffonnées sur les feuilles d’un journal intime. On pense à Dostoïevski, à Pavese. Du « cinéma-vérité » à la première personne. La violence et le dépouillement d’un cri de détresse, d’un appel au secours. Aucun intermédiaire entre l’émotion brute et son expression cinématographique. « Le film, nous dit Alain Cavalier, a été tourné en sept jours, avec une équipe de trois personnes, dans l'ordre chronologique, sans rature ni reprise au montage. » D’où la pureté, la dureté du récit. L’énigme qu'il recèle. L’angoisse qu’il provoque. Moins un film qu’un message filmé. Une bouteille à la mer. Un exorcisme, peut-être."
Jean de Baroncelli" Sans doute, cet aveu en images n’est-il pas un spectacle pour ceux qui viennent au cinéma pour y chercher une distraction, même dans le dr...
" Sans doute, cet aveu en images n’est-il pas un spectacle pour ceux qui viennent au cinéma pour y chercher une distraction, même dans le drame. Mais il restera comme un exemple de ce que peut le cinéma dans le domaine de la confession publique et aussi comme un pont de feu entre un auteur bouleversant et un auditoire bouleversé."
Robert Chazal" ... la caméra ne cadre que des fragments du décor et du personnage, elle s'attache à des détails qui peuvent sembler traduire un point de...
" ... la caméra ne cadre que des fragments du décor et du personnage, elle s'attache à des détails qui peuvent sembler traduire un point de vue obsessionel de l'homme (ainsi une fissure à travers un mur, ce qui rappelle tel plan de Bergman dans A travers le miroir); vers la fin, l'image bascule un instant, comme si elle exprimait subjectivement le déséquilibre psychique du personnage (...)
... interviennent des éléments visuels et sonores qui exigent un certain déchiffrement mais qui ne sont pas donnés comme éléments d'une explication rationnelle des actes du personnage et qui jouent donc avant tout comme des signifiants génériques et symboliques de violence et de mort : des images de cadavres (on identifie ceux des auteurs de l'attentat contre Heydrich à Prague, en 1942), une allusion aux crématoires nazis (à propos d'une tranche de pain brûlé) et surtout des extraits de lettres..."
" Il est possible d’imaginer, à voir cet objet étrange, Ce répondeur ne prend pas de message, que Cavalier trace un trait désormais définit...
" Il est possible d’imaginer, à voir cet objet étrange, Ce répondeur ne prend pas de message, que Cavalier trace un trait désormais définitif sur son passé de cinéaste dans le Système et à sa conception du cinéma, à son discours et même à sa conception de la vie. Pourquoi pas ? Ou bien ce changement ne l’est-il qu’en apparence ? La narration à l’état léthargique, l’unique personnage qui se refuse à la parole, le choix « conceptuel » du tournage en une seule prise et sans montage (tout est monté bout à bout) sont autant de choix esthétiques qui font de ce film un cri muet de désespoir dont une blessure, jamais explicitée, est le moteur.
L’espace devient prison, les actions (marcher, peindre les murs et les fenêtres en noir) un lent mais inexorable désagrégement de l’être (et par conséquent de sa pensée, de ses sentiments), le silence, divinement obsédant pour qui attend un déchirement sonore, exaspère (mais c’est déjà ça !). On désirerait que cet homme, dont on ne sait pas qui il est (d’abord hors-champ, présenté ensuite le visage enveloppé dans de la bande velpo), ni d’où il vient, offre une clef si minime soit-elle sur son histoire et sur sa passion déchue qui doit avoir atteint un degré ultime de désespoir pour en arriver à cette déchirure de l’âme, dont parle Aragon, à cette abolition de l’être.
Qui est cet homme ? Vers quoi, vers où veut nous emmener Alain Cavalier ?
Ce refus de mettre les points sur les « i » marque un profond désarroi chez un cinéaste qui a retrouvé, pour une durée indéterminée, la direction de sa caméra. S’enfoncerait-il dans un éloignement de plus en plus sensible du pourquoi il filme ou, peut-être, le film se propose-t-il d’en être la réponse ?
Ce trouble manifeste apparaît très nettement dans ce passage du blanc au noir, de la lumière à l’obscurité, de ces bris de chaises, de cette impossibilité de communiquer qui, incontestablement, est repoussée d’entrée et ce n’est pas pour rien que toutes les portes se ferment une à une.
Dans cette attitude à coordonner renfermement sur soi et suicide moral et social, à partir d’un état défectueux de la cogitation, d’une peur effrénée du dire, où veut nous emmener Alain Cavalier ? Du côté de films comme Hôtel Monterey de Chantal Akerman ou de Leave me alone de Gerhard Theuring ? Ou du côté des derniers films déchirés de Philippe Garrel ? "
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