Claudine Bories dans la tourmente des amours perdues
Après avoir réalisé en 1999 un moyen-métrage documentaire où elle allait "à la rencontre du masculin "(Julie1
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"Madame" et "Monsieur" se sont aimés. Et puis, on ne sait comment, leur vie est devenue un enfer. Ils ont décidé de se séparer. Qui va garder l'enfant?
"Madame" et "Monsieur" se sont aimés. Et puis, on ne sait comment, leur vie est devenue un enfer. Ils ont décidé de se séparer. "Je garde l'enfant, a-t-elle dit, il est à moi." "C'est le mien, a-t-il répliqué, je le veux..." Le recours à la loi s'est imposé. Un juge a délivré l'ordonnance provisoire qui les a envoyés ici, à "Aadef Médiation", un "lieu neutre" pour couples séparés au rez-de-chaussée d'une tour. Ici s'exercera le "droit de visite" légal à l'enfant. Quand Madame et Monsieur arrivent, ils sont perdus et ne parviennent même plus à se parler. Des médiateurs les accueillent. Avec eux, ils vont tenter de briser le mur d'incompréhension et de haine qui les sépare. "Madame" et "Monsieur", c'est ainsi que les médiateurs désignent les parents qui viennent à Aadef. Les noms de famille ne sont jamais prononcés.
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" (...) On pressent ce qu'un tel sujet peut comporter comme potentiel voyeuriste, la présence d’enfants renforç
" (...) On pressent ce qu'un tel sujet peut comporter comme potentiel voyeuriste, la présence d’enfants renforçant le risque de sensiblerie facile.
Or, Monsieur contre madame est absolument exempt de ces défauts et Claudine Bories a évité les pièges avec talent en abordant son projet avec les bonnes questions et les intentions justes. D’abord, avant de tourner son premier mètre de pellicule, la cinéaste a passé beaucoup de temps dans le centre, observant les choses, discutant avec le personnel et les visiteurs, nouant quelques liens après un long et patient travail d’approche. Ce travail hors champ se sent dans le film : jamais elle n’aurait capté ce qu’elle a capté en débarquant à la dernière minute comme une équipe TV lambda. Par ailleurs, la cinéaste n’a superposé aucun commentaire et s’en est strictement tenue au centre, évitant ainsi la sociologie explicative ou le mélodrame facile.
Et qu’a-t-elle capté ? Des petits détails, des gestes, des regards, des positions de corps, des attitudes, une façon de se tenir dans un couloir, le rythme d’une porte qui s'ouvre ou se referme, des paroles diverses, une configuration des lieux qui matérialise parfaitement les stratégies et mesquineries des familles divorcées.
Concrètement, cela donne un couple où monsieur évite absolument de croiser le regard de madame (qui n’est qu’à un mètre), un enfant qui dort pendant que monsieur lit le journal (dilapidant ainsi son précieux temps de visite), un garçonnet qui roule sur son petit camion de la pièce papa à la pièce mitoyenne maman... , Il y a ici beaucoup d’affects explosifs, de ressentiments rentrés, de la tragédie, mais aussi un brin de comédie ; un monsieur s’impose comme véritable personnage burlesque et joue le rôle de sa vie.
En refusant de s’intéresser aux causes et raisons de chacun ou de prendre parti pour l’un ou l’autre, Claudine Bories a filmé la théâtralité des couples déchirés, le “cinéma” des affects familiaux, la “scène” où se croisent l’intime et le social. Et c’est ainsi quelle fait œuvre de cinéaste. "
" Que reste-t-il aux couples qui n’ont plus que la haine ou l’indifférence en partage ? En réponse à
" Que reste-t-il aux couples qui n’ont plus que la haine ou l’indifférence en partage ? En réponse à ce sujet de prédilection du cinéma moderne, l’administration française a créé Aadef Médiation, structure d’aide à l’enfance et à la famille.
Claudine Bories a tourné ce documentaire, chaque samedi, durant neuf mois, dans un local de Bobigny. Il accueille les couples séparés avec enfants qui ne parviennent pas à se conformer aux droits de visite fixés par le tribunal.
Installant sa caméra au cœur de l’appartement, la cinéaste filme les entretiens entre les parents et le médiateur, le mépris avec lequel se toise le couple, l’instrumentalisation des enfants, qui deviennent des enjeux de pouvoir. Laissant hors-champ les causes qui ont mené à ces désastres, la mise en scène consiste à enregistrer leurs effets : l’incompréhension, l’hostilité, l'évitement, la rancune et la volonté de faire mal.
Les hommes, généralement privés du droit de garde, s’y dévoilent plus faibles et plus démunis que les femmes : on est ici dans l’envers du décor social, sur la face d’ombre du désir, au bout des mots, au-delà de la chair. "
" (...) A Bobigny comme ailleurs, cet espace, où des médiateurs travaillent avec les couples dans la durée, inter
" (...) A Bobigny comme ailleurs, cet espace, où des médiateurs travaillent avec les couples dans la durée, interdit aux parents tout emportement revanchard, n'autorise que des passions raisonnées. Ici, pas de Kramer contre Kramer. A Bobigny comme ailleurs, Monsieur et Madame se frôlent pour s’échanger des enfants (qui ne souhaitent que jouer), des regards (de fournaise), parfois des mots. A Bobigny et pas ailleurs, Claudine Bories a planté sa caméra chaque samedi pendant neuf mois, entre Monsieur et Madame.
Le procédé n’est pas nouveau. Il a déjà permis à Raymond Depardon de réussir il y a une quinzaine d’années un Urgences assez hallucinant où le spectateur trouvait vite sa place dans un dispositif de mouche, logé quelque part dans un angle du mur. On ne sait jamais vraiment si l’intérêt que l’on peut prendre au film-mouche est voyeuriste (bienvenue chez les fous, les divorcés, les "vrais gens"), ethnologique (la séparation difficile dans les grands ensembles de la banlieue parisienne), ou s’il découle d’une ambition plus haute: être une grande leçon d’humanité assortie de son impitoyable effet-miroir, désavantageux, cruel et juste.
Parce qu'il sait capter dans le reflet des vitres l’ennui et la gêne de ces après-midi déplacés, qu’il ménage des effets d’attente (le suspense du quotidien) et qu’il laisse suffisamment de place pour qu’on s’y réfléchisse, Monsieur contre Madame est d’ores et déjà une leçon de patience. Ce n’est pas à proprement parler un film qui file à un train d’enfer façon traitement télévisuel, mais davantage une esquisse qui ne demande qu’à progresser, des croquis d'adultes que la vanité, l’aveuglement et tout ce qui a à voir, de près ou de loin, avec un quelconque pré carré à défendre, conduisent à se comporter devant d’autres adultes exactement comme des enfants capricieux.
Ces adultes infantilisés, évidemment, nous ressemblent dans nos pires moments. Le regard que Claudine Bories pose sur eux ne tient pas à en rester là; elle fait partie de ces obstinés pour qui un et un feront toujours trois. Dans la première heure de ce champ d’après bataille, la documentariste laisse l’enfant hors champ. Lorsque celui-ci apparaît, au moment même où l’on commençait à l’oublier, il vient démontrer que ce dispositif n’est pas neutre, mais équitable. Il ne juge pas, ne blâme pas, ne préfère pas... mais rappelle que celui qui a le plus droit à l’image (et, a fortiori, à l’écoute) c’est l’enfant, otage de guerres bien intestines. "
"Un film où l'on rit, où l'on pleure, où l'on se reconnaît pleinement dans ces hommes et ces fem
"Un film où l'on rit, où l'on pleure, où l'on se reconnaît pleinement dans ces hommes et ces femmes aux prises avec leur propre violence, leur maladresse et le désir de s'en sortir... Ils sont étonnants, touchants, effrayants, drôles. Ils sont au-delà du raisonnable. Ils sont grands... Humains trop humains. "
Retrouvez le texte complet sur le site de l'ACID.
L'ACID est une association née en 1992 de la volonté de cinéastes de s'emparer des enjeux liés à la diffusion des films, à leurs inégalités d'exposition et d'accès aux programmateurs et spectateurs. Ils ont très tôt affirmé leur souhait d'aller échanger avec les publics et revendiqué l'inscription du cinéma indépendant dans l'action culturelle de proximité.
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