" Betelnut Beauty cite assez explicitement le Goodbye South, Goodbye de Hou Hsiao-hsien. Il s'agit d'une plongée dans le quotidien de jeunes gens de Taipei avec des embardées du côté du polar (...) Vêtues très légèrement, fort maquillées, les jeunes hôtesses du bétel sont sous la «protection» de gros bras de la mafia, aussi les connexions entre ces inoffensives échoppes en bord de route et le commerce de la drogue, la prostitution et les tripots ne manquent pas. Un ado, Feng, craque sur Fei-Fei et la drague. Il finit par devenir son petit ami et, pour gagner l'argent du ménage, se lance simultanément dans un boulot réglo et des truandages un peu pathétiques.
Le récit suit non sans une certaine paresse suave et hypnotique les démêlés de ces jeunes gens avec une société asphyxiée, violemment urbaine et matérialiste.
L'impression de surplace, qui transforme les personnages soit en rongeurs cavalant dans leur cage ou en victimes de sables mouvants, est renforcée ici par l'étroitesse des enjeux qui agitent les différents personnages (...) Une étrange frénésie, un essorage des nerfs, encore accrus par l'accablante chaleur estivale, traversent les personnages et les laissent pantelants sans raison quelques plans plus tard. Parfois, rescapés de la gabegie teenage, flottent des instants de grâce, quand Fei-Fei et Feng cessent de se chamailler et s'accordent amoureusement comme dans cette belle séquence de balade nocturne en scooter dont on voudrait, comme eux sans doute, qu'elle ne s'arrête jamais..."
Didier Péron