Le projet de Ryan Coogler n’est pas de proposer une quelconque explication – psychologique ou sociologique - des faits aussi tragiques qu’absurdes auxquels nous assistons dans ces premières images documentaires. Ainsi ne suivons-nous qu’Oscar, sa famille, ses amis, et jamais les policiers impliqués dans le meurtre. Il ne s’agit pas d’un film-dossier sur les tensions entre Police et Jeunes aux Etats-Unis. Coogler s’efforce plutôt de donner chair à l’évènement, en nous faisant partager les derniers faits et gestes d’Oscar Grant, ex-délinquant qui tente de repartir du bon pied. (...)
Par le biais de situations quotidiennes, Coogler cherche à restituer l’humanité derrière le fait-divers. Il le fait peut-être de façon un peu trop démonstrative, chaque scène, chaque dialogue semblant concourir à cette unique conclusion : quel gâchis, quelle tragédie… (...) Est-il nécessaire d’avoir recours à des éléments fictionnels aussi édifiants pour que le spectateur prenne conscience de l’horreur de ce drame ?
Le film aurait gagné à se montrer moins explicatif, plus ambigu, plus inattendu. Car en réalité, tout se déroule un peu comme dans une série télévisée, avec ses ficelles, ses clichés, et ses personnages sans vraie complexité. Pas de surprise donc, par rapport au programme du film, identifié dés les premières minutes. Au final, une œuvre honnête et parfois émouvante, mais sans réelle ambition. Ni film politique, ni suffisamment bien écrit pour être un bon mélodrame, Fruitvale Sation emporte fatalement une certaine sympathie, les interprètes d’Oscar et de sa femme Sophina y étant pour beaucoup, mais se montre trop prévisible et policé pour être réellement marquant.
Gaël Reyre