Depardon se raconte. Depuis la ferme de ses parents jusqu'aux images du Tchad, l'itinéraire d'un fils de cultivateur devenu réalisateur et photographe.
Depardon se raconte. Depuis la ferme de ses parents jusqu'aux images du Tchad, l'itinéraire d'un fils de cultivateur devenu réalisateur et photographe. En gros plan, l'oeil fixé sur ses souvenirs, il raconte les premières vingt années de sa carrière artistique.
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" Au-delà du récit, où l’émotion, palpable, semble néanmoins contenue dans un geste mêlant pudeur et humilité, c’est le dialogue permanent e
" Au-delà du récit, où l’émotion, palpable, semble néanmoins contenue dans un geste mêlant pudeur et humilité, c’est le dialogue permanent entre son visage, et sa voix, entre ses clichés et le regard curieux qui les a fait naître qui bouleverse et touche au plus haut point. D’autant plus bouleversant qu’en 1983, au moment où Depardon réalise ce splendide “photoportrait”, on sent que les obsessions qui ont nourri sa jeunesse - l’appel du cinéma, les reportages aux quatre coins de la planète, du Venezuela au Biafra, du Tibesti à l’Afghanistan -et ce désir intense de filmer l'ailleurs pour toucher l’autre sont sur le point de se déplacer, de se recentrer sur des univers en apparence plus familiers (le monde agricole dans Profils paysans) mais au fond tout aussi lointains, parce que tellement fragiles."
Nathalie Dray, 27/6/2006"Très gros plan sur le visage de Raymon Depardon : il est éclairé par une table lumineuse qui se trouve devant lui et sur laquelle il fait
"Très gros plan sur le visage de Raymon Depardon : il est éclairé par une table lumineuse qui se trouve devant lui et sur laquelle il fait défiler des photos choisies parmi les milliers qu'il a pu faire en vingt ans de reportage.
Sa vie se déroule ainsi devant nous, en une suite de clichés (toujours en noir, et blanc) avec parfois un court extrait de films (San Clemente, Reporters, Numéro Zéro, mais aussi les premières images filmées à quatorze ans, quelques reportages politiques, ou encore des essais plus personnels). Depardon commente lui-même son film, improvisant son texte au fur et à mesure, « sans essayer de séduire » (c'est une de ses lignes de conduite, inscrite dans Notes, son livre sur le Liban). .
Cet exercice de franchise autobiographique a été effectué pour les Rencontres Internationales de la Photographie d'Arles qui avaient demandé à Depardon de faire son portrait. De ce film bref, dépouillé, il sourd une réelle émotion. D’abord parce que la voix de Depardon est atone, un peu brisée, presque triste. Elle fait régner sur le film une impression d’angoisse contenue.
Les dernières images nous ramènent aux mêmes sensations que la fin ouverte de Faits Divers : une petite Bohémienne était libérée du commissariat, et Depardon la filmait à son insu, traversant la rue. Pour aller où ? Vers quel ailleurs ? On se pose la même question à la fin des Années déclic : Depardon vient d’apprendre la mort de sa mère, il nous dit qu il va certainement repartir, avec son matériel photo, sans but précis. Un trouble qui s'apparente au vertige de la page blanche chez l'ecrivain saisit alors le spectateur.
Les Années déclic est le film le plus court de Raymond Depardon, mais c’est le plus dense et le plus émouvant."
"Comment un fils d'agriculteurs, d'humbles et braves paysans à l'ancienne, peinant sur leur terre, du côté de Villefranche, en bordure de Sa
"Comment un fils d'agriculteurs, d'humbles et braves paysans à l'ancienne, peinant sur leur terre, du côté de Villefranche, en bordure de Saône, là où passe aujourd'hui l'autoroute du soleil, comment un gamin qui a péniblement poursuivi ses études jusqu'à l'âge de quatorze ans, jusqu’au certificat, est-il devenu l'un des grands reporters-photographes de ce temps, au nom universellement connu et reconnu ? Ce genre de conte de fées, dont le héros lui- même, et tout le premier, demeure émerveillé, ne devient pas réalité si la vocation, le talent, la chance et la volonté ne forment pas une ronde autour du chaudron où mijote l'avenir de Macbeth, ne s'unissent pas en un faisceau de forces protectrices et conjugées.
Penché sur sa visionneuse, au cœur d'un studio plongé dans l'ombre, un homme fait défiler devant lui les archives de sa vie, vues fixes, séquences animées prises ou filmées entre 1957 et 1977. L'homme relève la tête, il a un beau regard, lumineux, transparent, un beau visage grave et un peu douloureux, éclairé par un unique projecteur. Pendant une heure, tantôt voix off, tantôt apparaissant à l'écran, dans les conditions du direct, hésitations et lapsus compris, repentirs interdits, Raymond Depardon va présenter et commenter l'histoire de sa vie, des souvenirs Intégralement écrits en images, écrits par lui, et d'où il est donc presque toujours absent physiquement. Dans les « Mémoires d'un œil », l'œil est naturellement toujours présent, et la seule chose qu'on ne voit pas.
Photographe, Depardon s'efface derrière ses photos. Journaliste, il n'est, ne peut ou ne veut être rien d'autre que ce qu'il fait. Premières photos, prises à quinze ans, avec un appareil médiocre : la ferme, ma chambre, mon chien, les vaches — et dès ces premières photos, malgré la banalité des sujets, en contraste avec cette banalité, le talent éclate, le don plus précisément, cette capacité que seuls ont certains privilégiés à saisir, à capter l'essence même du réel. A seize ans, le petit Depardon monte à Paris : grouillot, débutant, pigiste, journaliste encarté enfin, au fur et à mesure que, ramant comme un forcené sur la galère de l'actualité, il progresse, l'horizon s'élargit.
D'autres personnages apparaissent sur l'album d'où disparaissent le père, la mère, le frère, les voisins, Villefranche. Des footballeurs de troisième division et des miss Arpajon on passe aux starlettes, puis aux vedettes, puis aux grands de la terre, français, étrangers, des papes, des présidents, des révolutions. La technique change : l'instantané succède à la pose, la caméra synchrone au méchant Rolleiflex et Depardon comprend — eureka ! — que ce qui est intéressant, c'est le vrai, mais le vrai oblique, à demi-caché, les coulisses, les marges, les au-delà, tous les envers de ce vaste monde dont la photographie officielle donne l'image à la fois matériellement exacte et moralement mensongère.
D'où la création de l'agence Gamma, révolution aussi idéaliste et presque aussi illusoire que le mouvement soixante-huitard dont elle est à sa manière une retombée. Avec Gilles Coron et Hubert Henrotte, Depardon rêve de changer la condition du reporter-photographe, exploité, méprisé, traité en objet, ou en simple objectif, d'en finir avec les sujets imposés, la chronique d'une actualité toujours tissée des mêmes mondanités, faite par les mêmes vedettes, composée des mêmes visages. Qu'en est-il resté ? Une coopérative où les photographes sont au moins traités en auteurs et propriétaires de leurs négatifs, mais le monde n'a pas changé, ni sa vision, pour l'essentiel. Ce n'est pas l'œil qui compose le menu, ce n'est pas la photo qui change la réalité.
Raymond Depardon cultive tout au long de son film une bien curieuse amertume, à la limite choquante chez quelqu'un qui n'a pas à se plaindre de la vie, et qui s'en plaint pourtant. On serait tenté d'y voir le symptôme d'une propension chronique et agaçante à la geignardise. Certaines réflexions sur son service militaire, effectué à Paris, comme reporter, « non payé » (sic), ou sur les servitudes du travail en équipe, inciteraient à le croire — mais j'aime mieux y voir le signe d!une aspiration enfantine et désespérée à on ne sait trop quoi, être le romancier ou le philosophe du monde, puiser dans l'expérience et le voyage une sagesse d'où tirer des leçons — aller plus loin, plus haut, plus profond. Souvent émouvant, mais singulièrement maladroit, cette maladresse même étant émouvante, Depardon fait preuve d'une étonnante inaptitude à s'exprimer.
On devine des inhibitions, des blocages, une grande pudeur, on constate une déficience dans le maniement des mots et des idées. Depardon sait mieux faire parler ou laisser parler les autres que lui-même — en témoignent les séquences prises à la sauvette dans l'asile psychiatrique italien de San Clemente ou la fameuse interview de Françoise Claustre, prisonnière d'Hissène Habré. Il sait capter les temps forts du quotidien, mais jette un regard d'enfant attardé sur la réalité comme s'il ne savait pas, le premier, que l'époque était révolue du fameux : « Attention, on ne bouge plus », comme s'il voulait encore croire que de la boîte magique le petit oiseau bleu, un jour, allait sortir."
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